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Lettre à Arafat
Par Jihad Al Khazen - Al-Hayat (quotidien londonien de langue arabe)
Article mis en ligne le 19 mai 2004

Traduction CID

Notre cher frère Yasser Arafat,

Je suggère que tu démissionnes. Tu as fait de ton mieux. Le moment est venu de laisser ta place à la barre à une génération plus jeune.

L’administration américaine veux que tu tires ta révérence, et Ariel Sharon veux ta peau.

Leurs raisons son connues. Ils ont pris position à ton égard par inimitié. Si je suis parvenu à cette conclusion, c’est par amour car je suis inquiet pour toi.

Tu n’es plus si jeune que ça. Ta santé n’est pas des meilleures. Ta cause est encore plus affaiblie que toi. Elle requiert un esprit brillant et des bras fermes qui ne tremblent pas.

Je te demande de démissionner parce que je suis ton ami. Je ne te veux que du bien et que ta cause vive.

Tu es un président démocratiquement élu. Si des élections présidentielles se tenaient demain dans les territoires palestiniens, tu les remporterais à nouveau haut la main. Voila pourquoi j’espère te voir quitter la présidence en position de force, et non par la petite porte, contraint et forcé. De cette manière, tu resterais pour toujours le père de la révolution et de la patrie.

Je sais que tu n’aimes pas entendre quelqu’un te demander de démissionner. Mais je suis ton ami, et en tant que tel, je me dois de te parler sincèrement.

Te souviens-tu comment notre amitié a commencé, en 1967, dans le bureau du camp d’Al-Hussein, à Amman ? Peut-être pas ; car tu as des milliers d’amis. Moi, je me souviens des escaliers que j’ai grimpé, me menant à une grande pièce d’où on entrait dans ton bureau. Nous en sommes sortis après une rencontre qui avait duré moins d’une heure, pour prendre des photos sous une ampoule qui pendait du plafond.

Trente-sept ans ont passé. J’aurais aimé en compter quarante, cinquante même.

Je t’ai revu au camp Wahadat, puis au camp Al-Fakhani. Je t’ai revu à Londres, Washington, Paris et Davos.

Notre amitié n’a pas été altérée par les erreurs de la révolution en Jordanie et au Liban. J’étais à Washington pendant l’invasion israélienne. Je t’ai vu prendre le chemin de la Tunisie. Je t’ai boycotté pour protester contre les erreurs accumulées au cours de ces cinq années.Plus tard,j’ai baissé pavillon en face de la révolution et de son leader, et nous avons repris notre amitié.

Souvent, pendant la guerre civile [au Liban NDCID], je t’apportais des messages à propos de Camp David I. Combien de fois ne t’ai-je pas parlé, et n’ai-je pas parlé de toi.

Puis il y eu les accords d’Oslo et la poignée de mains dans les jardins de la Maison Blanche.

De nombreux dîners et conversations nous réunirent à Davos ; et de Washington à Londres.

Te souviens-tu de ce dîner, à Davos, lorsque j’étais à ta table, à côté de celle du président Moubarak et de son épouse, et que Benjamin Netanyahu avait une table dans un coin au fond de la salle.

Et les rencontres d’après dîner avec les supporters. Il y avait beaucoup de Juifs soutenant la paix. Où sont ils maintenant ?

La dernière chose dont je me souvienne à ton propos à Davos est ton discours désastreux, fin janvier 2001. Mais qui a bien pu te conseiller de prononcer un pareil discours ? Qui l’a écrit ? Pourquoi ? Tu ne nous a fourni aucune réponse
satisfaisante quand avec d’autres amis, nous t’en avons fait le reproche, ce soir-là dans ta suite.

James Wolfensohn, le président de la Banque Mondiale, abondait dans notre sens. C’est un juif australo-américain qui fait de son mieux pour aider l’Autorité palestinienne et les Palestiniens. Je sais pour en avoir été témoin comment il coordonnait avec toi la meilleure manière de demander de l’aide aux pays du Golfe et aux Européens. Où sont les Wolfensohn maintenant ?

Je me souviens quand nous avons chanté « Joyeux anniversaire » à Afif Safiyeh, ton ambassadeur à Londres... C’était un 4 mai, à l’hôtel Claridge. Tu te préparais à déclarer l’Etat palestinien ce jour-là, mais tu te vis interdit de le faire. (Le président Bush a annoncé son soutien à la création d’un état palestinien indépendant le 24 juin, il y a deux ans ; le 24 juin, c’est mon anniversaire, mais je ne crois pas que ce soit un meilleur présage que celui d’Afif).

Ô mon ami. J’écris tout ceci après une nuit blanche que j’ai passée à penser à toi et à ta situation.

Je ne veux pas revenir sur les erreurs de Jordanie et du Liban. Je ne veux pas réouvrir la question de ta position sur l’occupation du Koweït, ni de tes relations avec Saddam Hussein. Je ne veux pas faire la liste des occasions manquées du processus de paix.

Ce que tu endures, comme nous tous, est déjà bien assez.

La cause est dans une impasse, celle dans laquelle tu l’a conduite. C’est la vérité. La cause est enfermée dans le siège que tu subis.

Est-ce que je t’entends te lever pour déclarer : "J’ai fait de mon mieux,
j’ai eu raison et j’ai commis des erreurs, mais j’ai remis le nom de la Palestine sur la carte" ?

Est-que je t’entends déclarer : « Je démissionne, et je laisse la place à un leadership qui pourra transférer ce nom de la carte à la terre de Palestine » ?

Depuis Trente-sept ans avec toi, je n’ai jamais douté de ton patriotisme.

Tu t’es moulé dans la cause. Et c’est pourquoi je ne veux pas que tu permettes à Yasser Arafat de devenir un obstacle ou une barrière à la création de l’Etat palestinien.

Peu m’importe ce que diront les ennemis. C’est toi qui m’importe. Mais plus que tout, c’est la cause palestinienne qui m’importe, et tu dois toi aussi la placer désormais au dessus de ta personne.

Quoi qu’il en soit, tu as fait de ton mieux pour la Palestine. C’est ton droit de jouir maintenant d’un juste repos.

Si tu démissionnes aujourd’hui, tu partiras la tête haute.

Un président arabe démocratiquement élu démissionne. Les élections démocrati-ques sont rares dans nos pays. La démission l’est encore plus.

Ami, Démissionnes. Trop, c’est trop. C’est ta seule chance. C’est la seule chance qui reste à la cause.


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