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Kofi Annan décrit l’antisémitisme comme une manifestation de haine, d’intolérance et de persécution unique dans l’histoire à l’occasion du séminaire organisé au siège de l’ONU
Communiqué de presse de l’ONU - SG/SM/9375 - HR/4774 - PI/1590
Article mis en ligne le 28 juillet 2004

La déclaration liminaire prononcée par le Secrétaire général, M. Kofi Annan, à l’occasion du Séminaire sur l’antisémitisme du Département de l’information, à New York, le 21 juin, est reproduite ci-après :

Bienvenue au Siège de l’Organisation des Nations Unies.

En proposant cette série de séminaires, l’Organisation se montre fidèle à l’un des premiers buts poursuivis par les peuples du monde entier lorsqu’ils ont décidé de la créer, à savoir « pratiquer la tolérance et vivre en paix l’un avec l’autre dans un esprit de bon voisinage ».

Musulmans, juifs, chrétiens, hindous ou bouddhistes, tous ceux qui ont la foi, tous ceux qui se reconnaissent dans une identité culturelle, nationale ou religieuse fondée sur des valeurs de vérité, de dignité et de justice, ne sauraient rester indifférents dans la lutte contre l’intolérance.

Mais pour gagner ce combat, nous devons inculquer à nos enfants le respect d’autrui et faire nous-mêmes des efforts en ce sens. La tolérance et le respect ne sont pas innés, mais s’apprennent.

Les prochains séminaires seront consacrés à d’autres groupes spécifiques victimes d’intolérance dans de nombreuses régions du monde, notamment les musulmans et les migrants, groupes qui se recoupent dans une certaine mesure, mais qui malheureusement se heurtent chacun de leur côté à des préjugés.

Il est cependant bon de commencer par l’antisémitisme, qui constitue une manifestation de haine, d’intolérance et de persécution unique dans l’Histoire. L’antisémitisme se manifeste même dans des communautés où n’ont jamais vécu de Juifs, et il est souvent le signe avant-coureur d’autres formes de discrimination. La montée de l’antisémitisme dans un pays est toujours une menace pour le monde entier. Ainsi, en luttant contre ce phénomène, c’est pour l’avenir de l’humanité que nous nous battons.

La Shoah, ou l’Holocauste, sont l’illustration de ce fléau. L’Allemagne des années 30 était une société moderne, à la pointe des progrès techniques et d’une grande richesse culturelle. Pourtant, le régime nazi qui a pris le pouvoir a entrepris d’éliminer les Juifs de la face de la Terre.

Même si nous ne parvenons toujours pas à comprendre comment on a pu en arriver là, nous savons que 6 millions d’hommes, de femmes et d’enfants innocents ont été tués pour la seule raison qu’ils étaient Juifs. C’est un crime contre l’humanité qui dépasse l’entendement.

L’expression « Nations Unies » a été forgée pour désigner les pays alliés qui ont combattu ce régime barbare et notre Organisation a été créée juste après la découverte horrifiée des camps de concentration et d’extermination par le monde entier. Il est donc juste de dire que l’Organisation des Nations Unies est née sur les cendres de l’Holocauste, et ce serait renier notre histoire que de négliger le problème de l’antisémitisme dans le cadre de nos activités de défense des droits de l’homme.

C’est un sentiment général d’indignation face à ce terrible génocide qui a animé la rédaction de la Déclaration universelle des droits de l’homme. Comme indiqué dans son préambule, « la méconnaissance et le mépris des droits de l’homme ont conduit à des actes de barbarie qui révoltent la conscience de l’humanité » et ce n’est pas un hasard si, à la veille de son adoption de la Déclaration en 1948, l’Assemblée générale a adopté la Convention pour la prévention et la répression du crime de génocide.

Il est absolument incroyable que l’antisémitisme réapparaisse 60 ans après la tragédie de l’Holocauste et pourtant, on ne peut nier que l’on assiste à l’heure actuelle à une résurgence alarmante de ce phénomène sous de nouvelles formes et manifestations. Cette fois, le monde ne peut pas et ne doit pas se taire.

Nous nous devons à nous-mêmes, ainsi qu’à nos frères et sœurs juifs, de condamner fermement cette vague de haine sans comparaison qu’est l’antisémitisme. Pour ce faire, nous devons étudier de manière plus approfondie la nature des manifestations contemporaines de l’antisémitisme, ce qui est le propos même de ce séminaire.

Force est de reconnaître que les actions de l’Organisation des Nations Unies en matière d’antisémitisme n’ont pas toujours été à la mesure de ses idéaux. Il est déplorable que l’Assemblée générale ait adopté en 1975 une résolution dans laquelle elle assimilait le sionisme au racisme et je me félicite qu’elle soit depuis revenue sur sa position.

Mais il faut demeurer vigilant et combattre énergiquement et sans ambiguïté ceux qui essaient de nier l’Holocauste ou le fait que cet événement soit sans comparaison possible, et ceux qui continuent de propager des mensonges et des stéréotypes abjects sur les Juifs et le judaïsme.

Par ailleurs, en nous efforçant, comme c’est notre devoir, d’obtenir justice pour les Palestiniens, nous devons clairement nous dissocier de tous ceux qui essaient d’exploiter la situation pour inciter à la haine contre les Juifs, en Israël ou ailleurs.

Les entités des Nations Unies chargées des droits de l’homme sont mobilisées dans la lutte contre l’antisémitisme et elles doivent poursuivre leurs efforts. J’appelle instamment les rapporteurs sur la liberté de religion et les formes contemporaines de racisme, en collaboration avec le Haut Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme (qui a récemment renforcé son service chargé de la lutte contre la discrimination), d’étudier activement les moyens de combattre plus efficacement l’antisémitisme à l’avenir. Le Secrétariat dans son ensemble doit aussi se montrer vigilant et, bien sûr, comme toujours, je compte sur nos amis de la société civile pour nous aider à être à la hauteur de la tâche. Je me réjouis à cet égard de voir de nombreuses organisations non gouvernementales représentées ici aujourd’hui.

Mes chers amis, nous fêterons au mois de janvier prochain le soixantième anniversaire de la libération du premier camp de la mort par les forces soviétiques. Les États Membres ne sauraient trouver meilleure occasion de condamner l’antisémitisme sous toutes ses formes, sur le modèle, par exemple, des résolutions adoptées par le passé au sujet de l’apartheid ou de l’admirable résolution adoptée récemment par la Commission des droits de l’homme, qui a chargé le Rapporteur spécial sur les formes contemporaines de racisme d’étudier la situation des populations musulmane et arabe dans diverses régions du monde, en accordant une attention particulière aux violences et voies de fait dont leurs lieux de culte, leurs centres culturels, leurs commerces et entreprises et leurs biens étaient la cible. Pourquoi les Juifs n’auraient-ils pas droit aux mêmes égards et au même degré de protection ?

[Les États Membres pourraient s’inspirer à ce sujet de la Déclaration de Berlin récemment rendue publique par le Président de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE), qui constitue une remarquable initiative.

Je tiens à vous rappeler que la Déclaration a condamné sans réserve toutes les manifestations d’antisémitisme, ainsi que tous les autres actes d’intolérance, de provocation, de harcèlement ou de violence perpétrés à l’encontre de personnes ou de communautés, sur la base de leur origine ethnique ou de leurs convictions religieuses, où qu’ils se produisent.

La Déclaration a également condamné tous les actes motivés par l’antisémitisme ou par toutes autres formes de haine ou d’intolérance religieuse ou raciale, notamment les attaques menées contre des synagogues et autres Lieux saints, lieux de culte ou sanctuaires, et elle a déclaré sans ambiguïté que les développements internationaux ou questions politiques, notamment en Israël ou ailleurs au Moyen-Orient, ne sauraient justifier l’antisémitisme.

J’espère que tous les États Membres de l’Organisation des Nations Unies adopteront ces principes consacrés par la Déclaration de Berlin. Ils devront aussi veiller à leur application et s’efforcer d’accomplir chacun de leur côté des progrès dans ce domaine. La lutte contre l’antisémitisme doit être notre combat et les Juifs du monde entier doivent savoir que l’Organisation des Nations Unies est aussi la leur.]*

Il importe de concrétiser cette vision avant que les derniers survivants de l’Holocauste ne disparaissent, comme mon cher ami Elie Wiesel, avec qui j’ai l’immense honneur de partager cette tribune. C’est le moins que nous puissions faire.

J’aimerais conclure par une citation d’Elie qui pourrait définir merveilleusement le but de cette série de séminaires sur le thème « Désapprendre l’intolérance » :

« Il y a quelque chose de divinement beau dans l’apprendre, tout comme il y a quelque chose d’humainement beau dans la tolérance. Apprendre, c’est accepter que la vie ne commence pas avec moi. D’autres ont vécu avant moi et je marche sur leurs traces. Les livres que je lis ont été écrits par des générations de pères et de fils, de mères et de filles, de maîtres et de disciples. Je suis la somme de leurs expériences, de leurs quêtes. Et vous aussi. »

Merci pour ces mots, Elie, et pour tout ce que tu nous donnes. Je te passe maintenant la parole.


  • Ces paragraphes ont été modifiés pour refléter ce que le Secrétaire général avait l’intention de déclarer.

http://www.un.org/News/fr-press/docs/2004/SGSM9375.doc.htm



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