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Le retour de la brutalité en politique
Shmuel Trigano | Professeur des Universités
Article mis en ligne le 19 avril 2012

Avec Jean Luc Mélenchon, c’est le style brutal qui ressurgit en politique, un style qui avait disparu en Europe depuis la deuxième guerre mondiale et qui, aujourd’hui trouve à s’exprimer dans un discours qui appelle à « prendre le pouvoir » et à prôner la violence envers « les riches », un discours qui, joignant le geste à la parole, fait de l’occupation de la rue la répétition d’on ne sait quelle prise de la Bastille à venir.

Mélenchon promet tout et joue avec l’inquiétude sociale et économique. Comme tout leader prophétique, il accomplira des miracles, si vous prenez le pouvoir. Son clip de campagne commence sur une musique messianique annonçant la frénésie des lendemains qui chantent. Son charisme est foudroyant au vu de sa popularité mais aussi l’indulgence des commentateurs politiques, au fond séduits et émerveillés, et qui ne soufflent mot de l’inanité de son programme politique et économique. On ne peut s’empêcher de contraster cette indulgence – dont bénéficie aussi le pathétique Poutou – avec l’acrimonie rituelle envers certains candidats, dont Marine Le Pen est la figure principale. S’ils étaient conséquents avec eux-mêmes, ils devraient mettre en demeure Hollande de ne passer aucun accord avec ce « populisme » qui est, comme on le voit « politiquement correct », ce qu’explique sans doute un reste de la nostalgie de l’idéologie soixante-huitarde…

Marine Le Pen ne se trompe pas quand elle prétend être le centre de gravité de la campagne sauf qu’elle enfonce une porte ouverte car c’est bien le cas depuis 20 ans, depuis que Mitterrand a créé de toutes pièces Le Pen comme un épouvantail autour duquel toute la vie politique française allait se structurer.

Néanmoins, elle ne dit qu’une demi-vérité car on peut voir dans le phénomène Mélenchon une métastase du lepénisme, un lepénisme d’extrême gauche. N’a-t-il pas récupéré l’électorat populaire que Jean Marie Le Pen avait ravi à un PC en décomposition ? Son inimitié violente avec le FN en dit long sur la concurrence des deux « populismes » qui sévissent désormais en France et annoncent des lendemains qui déchantent pour la paix sociale. Ce développement pourrait bien être en effet le produit incontrôlé de la réforme imposée à son parti par la présidente du FN, dans sa quête d’une respectabilité et d’une légitimité républicaines.

La trajectoire de Mélenchon est désormais à observer. Son pouvoir s’annonce considérable car il ne dépend d’aucun parti, tout en s’appuyant sur les ruines d’un parti que l’histoire a déchu. Gageons qu’il drainera vers lui d’autres lambeaux d’autres courants politiques, rassemblant une masse disparate que sa seule magie personnelle réunira. Comme toujours, dans l’histoire, ces masses désorientées et en rupture de banc avec le système et le marché attendaient depuis longtemps un semblable guide suprême. Jusqu’alors, les candidats ne se pressaient pas dans une galerie d’hommes politiques sans envergure ni verbe puissant. Mélenchon pourrait bien devenir l’homme providentiel d’une situation historique.

Toutes proportions gardées et sur le plan de la politologie, nous avons connu une semblable situation dans les années 20 et 30 en Italie. « Prendre le pouvoir », partir à l’assaut du pouvoir, parce que tout est possible au « peuple », fut un thème typique du fascisme italien. N’oublions pas qu’il se crût aussi socialiste…

Quel que soit le résultat de ces élections, rendez vous dans 5 ans pour le duel entre Marine Le Pen et Jean Luc Mélenchon, les futurs leaders de la droite et de la gauche. Ils sont les 2 pôles de la recomposition inattendue de la scène politique française. Le centre de gravité va devenir la poutre maîtresse du système.

*A partir d’une tribune sur Radio



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