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La Bande de Gaza et le Droit international
Par David Ruzié, professeur émérite des universités, spécialiste de droit international
Article mis en ligne le 23 janvier 2009

L’Association Avocats sans frontières et d’autres ONG viennent de décider de porter plainte auprès du procureur de la Cour pénale internationale (CPI), siégeant à La Haye, contre les principaux dirigeants du Hamas pour crimes de guerre et crimes contre l’humanité. Ces associations demandent, par ailleurs, au Président de la République française de saisir, de son côté, le procureur de ladite Cour.

Il faut savoir que la semaine dernière plusieurs associations ouvertement pro-palestiniennes avaient entrepris une démarche analogue visant les responsables israéliens de l’opération « Plomb durci » et Amnesty International, dont la partialité dans le conflit du Moyen-Orient est apparue à différentes reprises, ces dernières années, a, de son côté, demandé, il y a quelques jours, au Conseil de sécurité des Nations Unies d’inviter, comme le permet le Statut de la CPI, le procureur de cette Cour à ouvrir une enquête – comme il l’a fait à propos du Darfour et en République démocratique du Congo, enquêtes qui, elles, ont abouti à plusieurs inculpations. Et on apprend que le MRAP, jamais en reste lorsqu’il s’agit de mettre en cause Israël, a annoncé qu’il allait également déposer une plainte.

Cependant, aucune de ces démarches, même celles qui nous apparaissent, manifestement, fondées, comme celles visant les dirigeants du Hamas, n’est susceptible d’aboutir, du fait des règles régissant la compétence de la CPI.

En effet, le Statut de la CPI prévoit qu’un Etat ne peut être mis en cause, au travers de ses ressortissants, que s’il est Partie au Statut de la Cour, ce qui n’est le cas ni d’Israël, ni du Hamas, qui d’ailleurs ne constitue même pas une entité étatique, seule capable de se lier par un traité international.

On ne peut donc poursuivre des personnes devant la Cour que si les crimes ont été commis sur le territoire d’un Etat Partie ou s’ils sont ressortissants d’un Etat partie.

Et cette même exigence vaut que le procureur de la CPI soit saisi par un Etat ou par le Conseil de sécurité (v. démarche d’Amnesty International).

Mais, un Etat peut, par une déclaration déposée auprès du greffe de la Cour consentir à e que la Cour exerce sa compétence à l’égard d’un crime dont il est fait état.

Donc, tout dépend de la volonté d’Israël de voir la CPI être saisie des crimes de guerre commis par le Hamas.

Pour l’instant ce n’est pas le cas et, la semaine dernière, Nicola Fletcher, une porte-parole du procureur de la CPI, aurait souligné que la Cour n’avait pour le moment « pas compétence à Gaza ».

Or, incontestablement, le Hamas est coupable.

La démarche d’Avocats sans frontières a relevé non seulement la commission de crimes de guerre (viser délibérément la population civile israélienne, tirer des missiles et des obus à partir de zones civiles - écoles, hôpitaux -, utiliser des symboles humanitaires tels que des ambulances pour tenter de jouir de l’impunité), recruter, former des enfants à la guerre, les utiliser comme boucliers humains), mais également le crime de génocide et un crime contre l’humanité (appeler publiquement au génocide ou à l’assassinat pour des raisons religieuses ou raciales comme le prévoit la charte du Hamas).

Même si les chances de voir les dirigeants du Hamas effectivement déférés devant la CPI sont minimes, il n’en demeure pas moins la nécessité de dénoncer la caractère criminel de leurs agissements.

Mais, en même temps, il faut, comme s’efforce de le faire – sans être vraiment écouté – le gouvernement israélien, écarter toute présomption de commission de crimes de guerre à la charge des dirigeants israéliens.

On ne reviendra pas sur la légitimité de l’opération de légitime défense entreprise fin décembre en vue d’essayer de mettre fin aux tirs incessants de roquettes, depuis des années, depuis la Bande de Gaza en direction du territoire israélien.

Il y a peu de jours, nous soulignions ici-même (Disproportion ou plutôt retenue ?) qu’en l’occurrence la notion de « disproportion » devait céder la place à celle de retenue.

De fait, c’est par rapport à la densité dans les zones peuplées de la Bande de Gaza, à savoir près de 6 000 habitants au km2 (ce territoire couvrant un peu plus de 300 km2) qu’il faut rapporter le nombre des victimes imputées aux tirs israéliens.

Il semblerait d’ailleurs – fort heureusement – que les chiffres avancés par les sources palestiniennes soient tout à fait exagérés. D’après Guysen.Israel.News , : « le Hamas a gonflé le bilan des victimes, selon un médecin gazaoui de l’hôpital Shiffa. Interviewé par le journal italien Corriere della Sera, ce dernier a indiqué que le Hamas a obligé les équipes médicales à exagérer les chiffres, et que le bilan réel serait compris entre 500 et 600 victimes, soit la moitié des 1.330 morts annoncés officiellement ».

Quant à l’imputation de crimes de guerre, lancée du côté arabo-palestinien, dès le déclenchement de l’opération israélienne, nous nous étions efforcés (Vous avez dit « crimes de guerre » ?) par référence à la définition donnée par les textes et la doctrine de faire apparaître qu’à partir du moment où Israël ne visait pas directement et volontairement des civils ou même des cibles civiles, qui ne seraient pas utilisées par l’adversaire à des fins militaires, Tsahal ne pouvait être accusée de commettre des crimes de guerre.

A cet égard, nous nous permettons de renvoyer à Un écho d’Israël , un site chrétien basé en Israël (un-echo-israel.net), qui, répondant à des internautes demandant pourquoi il y avait autant de civils tués indique, notamment « il y a des témoignages innombrables de diverses sources que le Hamas met ses tireurs près d’hôpitaux ou d’écoles, ou attrape des gosses au vol en courant et les entasse près des mortiers (je l’ai vu) » (souligné par nous). Ce site se réfère, d’ailleurs, également à des erreurs de tirs reconnues (bavures admises ou cas de soldats de Tsahal, tués par des « tirs amis »).

Et on ne peut que déplorer le « déchaînement » des correspondants français de la presse écrite ou de radio, qui recueillent n’importe quel témoignage, pris pour argent comptant : le correspondant du Monde donne la parole, dans le numéro daté du 22 janvier, à un Palestinien racontant qu’une bombe tirée durant la trêve de 3 heures aurait tué 6 personnes de sa famille (quelle preuve a-t-on que cette bombe aurait été lancée durant une période de trêve ?) ou à un autre demandant « pourquoi ce champ d’oliviers a été ravagé ? qu’avaient fait ces arbres aux Israéliens (comme si ces oliviers n’avaient pas pu servir de couverture à des lanceurs de roquettes…) ou encore le témoignage recueilli par le correspondant de RTL, le 23 janvier au matin, d’une jeune palestinienne de 13 ans donnant manifestement l’impression de réciter une leçon qu’on lui avait demandé d’apprendre par coeur….Et ces exemples d’un « professionnalisme » léger, pourraient être multipliés.

Quant aux armes utilisées, aucune preuve n’existe que Tsahal aurait eu recours à des armes interdites par le droit international (une enquête est en cours du côté israélien concernant l’usage de bombes au phosphore, qui ne sont généralement utilisées que comme fumigène).

Par ailleurs, il est patent que même durant les combats, Israël a laissé entrer de très nombreux camions d’aide humanitaire (selon le Ministère israélien des affaires étrangères – non démenti – depuis le début de l’opération militaire et jusqu’au 15 janvier, donc une semaine avant la fin de l’opération, 1 028 camions – soit 25.322 tonnes - d’aide humanitaire ont été acheminés vers la Bande Gaza, dont 435 en provenance d’organisations d’aide internationales et de gouvernements., priorité étant donnée à l’approvisionnement humanitaire « en conformité avec les besoins évoqués par la communauté internationale et le Comité civil palestinien »).

Et lorsque, dans le cadre du point de presse quotidien, du porte parole du Quai d’Orsay un « ami qui veut du bien à Israël » demande, le 22 janvier : « Au vu du droit international le blocus est-il un « acte de guerre » ? Si oui, faut-il, d’après vous, que le Conseil de sécurité se prononce » ?

Le diplomate répond - bien évidemment sans répondre - : « Comme nous l’avons exprimé depuis le début du conflit, nous appelons au respect du droit international applicable aux Territoires palestiniens, notamment les dispositions de la quatrième Convention de Genève relatives à la responsabilité de la puissance occupante en matière de protection des populations civiles ».

On chercherait vainement en quoi Israël a manqué à une quelconque disposition de ladite convention, qui, par ailleurs, autorise la puissance occupante à prendre des mesures pour assurer sa sécurité.

Et s’il est vrai que, suivant le porte-parole du Quai d’Orsay : « Bernard Kouchner a rappelé hier, lors de la réunion des ministres européens avec Tzipi Livni à Bruxelles, la nécessité d’une ouverture permanente de tous les points de passage dans le cadre d’un règlement durable de la crise de Gaza », la précision que nous avons donnée concernant l’entrée de centaines de camions d’aide humanitaire (même s’il est avéré qu’une grande partie de cette aide est détournée par le Hamas) répond à cette demande, au moins partiellement.

Car, le maintien d’un certain « blocus » se justifie par le souci d’Israël de s’opposer à une contrebande d’armes qui, d’après le reportage publié dans Le Monde du 23 janvier, n’a pu que reprendre, au moins grâce aux tunnels que la carence, qui ne peut être que volontaire, des autorités égyptiennes permet. Du moins, par voie terrestre, Israël veille au grain n’en déplaise aux donneurs de leçon.



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