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Effets de la 2ème guerre du Liban sur la vie culturelle et artistique en Israël
Par Nathalie Szerman pour © Israël Magazine
Article mis en ligne le 1er janvier 2007

La deuxième guerre du Liban s’est officiellement terminée le 14 août 2006 - officiellement, car viennent ensuite les conséquences, qui peuvent être longues à essuyer. 12 juillet-14 août : la guerre s’est étalée sur les deux mois d’été où les touristes affluent. En Israël, peut-être plus encore qu’ailleurs, les artistes sont tributaires des touristes : 80 pour cent de leurs revenus se gagnent pendant l’été.

Les quartiers d’artistes en danger

La guerre a eu un effet rappelant celui de l’Intifada : d’une part la fuite des touristes, de l’autre l’humeur peu ludique les Israéliens, guère disposés à s’offrir le luxe d’objets d’art. Depuis l’Intifada, Houstot Hayotser, le quartier des artistes de Jérusalem, autrefois très fréquenté, est quasiment mort. En avril dernier, les 26 artistes de Houstot Hayotser avaient entrepris de dynamiser le quartier par des opérations de rénovation et de marketing. La 2 e guerre du Liban a coupé court à tous ces efforts, dont ils n’ont jamais récolté les fruits.

L’anglophone Avraham Loewenthal, qui réalise des peintures d’inspiration kabbalistique, est l’un des artistes les plus prisés du quartier des artistes de Safed. Il relate les vitrines brisées et la fermeture des boutiques pendant la guerre. Après le cessez-le feu, certains artistes sont retournés à leurs studios, d’autres pas. A Safed aussi, le quartier des artistes est moribond.

Vente des œuvres à l’étranger

Face à ces difficultés économiques, on assiste à un phénomène de plus en plus répandu en Israël : les marchands d’œuvres d’art, et notamment les propriétaires de galeries, partent pour l’étranger, avec une sélection de choix, faire connaître leurs artistes. C’est le cas du propriétaire francophone de la galerie George 5 de Jérusalem, fermée depuis quelques mois. Elle devait rouvrir, mais il a visiblement trouvé plus avantageux de se passer de galerie pour le présent : il part aux Etats-Unis une semaine tous les trois mois, à New York et Los Angeles, et y vend une partie de ses toiles.

L’inconvénient pour les peintres est qu’ils ne sont plus exposés. L’artiste Dyani, qui réalise de grandes toiles aux couleurs fraîches représentant Jérusalem, voyait ses peintures placées bien en évidence dans la vitrine de la Galerie George 5, en face de l’Hôtel King David de Jérusalem. Aujourd’hui, elle souffre de ne plus être exposée car pour elle, « un tableau se partage ».

Le peintre Motke Blum part vendre ses œuvres au Japon ou en Finlande. « Ils aiment Israël, mais pas au point de faire le déplacement, » dit-il. Et chaque été, une délégation d’artistes de Safed part pour les Etats-Unis présenter une sélection d’objets d’art. Le terrorisme et la guerre auront au moins eu le mérite de regrouper les artistes de quartiers, qui s’efforcent de se sortir ensemble de leurs difficultés communes.

Concerts d’artistes : annulations et maintiens

Si les peintres, les sculpteurs et les céramistes n’ont pas vendu cet été, ce sont aussi des concerts d’artistes étrangers qui ont été annulés, comme à chaque fois qu’un conflit éclate. La plus grande annulation de l’été a été celle du concert de Dépêche Mode, prévu à Tel-Aviv. Plus proche de nous, le Français Arthur a aussi annulé sa tournée.

Si les annulations ont été jugées normales par la population, déçue malgré tout, ceux qui ont maintenu leurs concerts ont été reçus avec un enthousiasme décuplé. C’est le cas de la bande de Ziggy Marley, le fils de Bob Marley : son concert, qui devait avoir lieu début août à Achziv, au nord, a simplement été déplacé à la ville de Raanana, plus au sud, où Ziggy Marley a pu se produire dans l’amphithéâtre du parc municipal.

Certains artistes ont fait plus que maintenir leurs concerts : le célèbre chanteur israélien David Broza, accompagné de la chanteuse franco-israélienne Karen Ann, s’est produit dans des dizaines d’abris au nord du pays : à Touval, Gilon et Tsourit, ils ont interprété les chansons de David Broza, mais aussi celles de Karen Ann, moins connue. Cette initiative, très généreuse pour la population enfermée dans les abris, a aussi permis à Karen Ann de mieux se faire connaître du public israélien.

A l’inverse, les artistes israéliens qui se sont désolidarisés d’Israël ont vu leur cote chuter instantanément. Le cas le plus marquant restera celui de la nouvelle étoile Jacko Eisenberg : ce jeune homme de Netanya a remporté la finale de l’émission Kochav Nolad (une étoile est née) le 7 septembre 2006, à peine un mois après la fin officielle de la guerre. Cette émission israélienne met en compétition de jeunes chanteurs amateurs en procédant par élimination, grâce au vote des téléspectateurs. Suite à sa victoire, Jacko a eu le malheur de critiquer durement l’armée et l’Etat d’Israël, se vantant d’avoir échappé au service militaire. Ses déclarations ont provoqué la colère générale et des menaces de boycott. Jacko a été contraint de présenter des excuses.

Scission entre le Nord et le Sud d’Israël

La guerre a provoqué une véritable scission entre les villes du Nord et le reste du pays, qui vivaient deux réalités diamétralement opposées. Des centaines de Katiouchas tombaient sur les villes du nord pendant que les festivals et les concerts voyaient leur fréquentation multipliée dans le centre.

La mairie de Tel-Aviv confirme qu’aucune activité, festival, concert ou autre n’a été annulé pendant cette période, hormis les concerts de stars étrangères. Bien au contraire : une grande partie de la population du Nord s’est enfuie vers le centre du pays, où elle a pu bénéficier de l’entrée gratuite aux manifestations artistiques. A Jérusalem par exemple, le Yérid de Houstot Hayotser où chaque été, des artistes du monde entier sont invités à ouvrir des stands et à exposer leurs œuvres en plein air, dans l’amphithéâtre de la piscine du Sultan, a offert l’entrée gratuite à la population du nord.

On avait donc une situation où pendant que les soldats se battaient au nord, la population civile prenait du bon temps à Tel-Aviv et Jérusalem. Certains se sont d’ailleurs interrogés sur la moralité d’une telle situation.



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