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Entre grotesque et odieux
par David Ruzié, Professeur émérite des universités, spécialiste de droit international
Article mis en ligne le 8 octobre 2006

Le Centre d’information des Nations Unies, toujours prompt à répercuter des prises de position anti-israéliennes d’organes plus ou moins représentatifs de l’Organisation mondiale s’est bien gardé de faire écho au scandale que constitue l’ajournement des travaux du Conseil des droits de l’homme, vendredi dernier.

C’est Yahoo Actualités France qui a diffusé, le 6 octobre, cette information que les médias français n’ont même pas jugé utile de reprendre.

Or, cet organe, dont nous avons déjà dit tout le mal qu’il fallait en penser (v. www.desinfos.com/impression.php?id_article=5140) n’avait pas hésité à se réunir en session extraordinaire d’urgence, le 5 juillet dernier, pour étudier la situation en territoire palestinien et décider de la constitution d’une commission d’enquête.

Il se réunissait, à nouveau, pour une seconde session extraordinaire, le 11 août, pour connaître, cette fois, de la situation au Liban et prendre une initiative de même nature.

Cette fois, la seconde réunion ordinaire, ouverte, le 18 septembre, vient, le 5 octobre, de juger opportun de s’ajourner jusqu’au 27 novembre....

Mais, le Conseil avait eu le temps, la veille d’entendre le rapport présenté par la commission mise en place le 11 août dernier qui, selon les habitudes détestables des organes onusiens, met en cause d’abord Israël, avant d’évoquer les pratiques condamnables du Hezbollah.

Pourtant, plusieurs des situations soulevées présentaient un caractère beaucoup plus dramatique : exactions persistantes au Soudan (au moins 200 000 morts depuis 2003), attaques contre les civils au Sri Lanka, massacres en Ouzbékistan.

Même Human Rights Watch, ONG américaine qui, à l’instar de sa rivale Amnesty International, basée, elle, en Grande-Bretagne, ne se distingue pas par son impartialité à l’égard d’Israël, a considéré que « le Conseil peine à se distinguer de son prédécesseur discrédité » (la Commission des droits de l’homme).

C’est le moins que l’on puisse dire.

Mais, au même titre que le monde arabo-musulman, généralement divisé, fait bloc contre Israël, le groupe africain (13 Etats sur les 47 membres du Conseil et qui peuvent compter sur la majeure partie des 13 Etats représentants l’Asie) s’est efforcé d’éviter toute mention du rôle de Khartoum, dans le drame du Darfour.

On a nettement l’impression que la notion de droits de l’homme n’est pas, aux yeux de certains, une valeur universelle : dès lors qu’un problème surgit au sein, soit des Etats africains, soit du monde arabo-musulman, les Etats, qui devraient se sentir concernés, ne serait-ce que par solidarité, s’efforcent de le minimiser.

Or les atteintes subies par des Africains de la part d’autres Africains sont tout aussi scandaleuses que lorsque des plaintes, plus ou moins justifiées, sont dirigées contre un Etat qui, culturellement, relève d’une autre sphère.

Cette attitude fait penser à la mansuétude dont bénéficia, en son temps, le dictateur ougandais Amin Dada, pourtant à l’origine, en 1972, de mesures d’expulsion et d’expropriation visant 70 000 citoyens d’origine asiatique, alors que la communauté internationale n’hésitait pas, à juste titre, à l’époque, de mettre en cause la politique d’apartheid, menée, dans un pays voisin, l’Afrique du sud.

Il est vrai que la logique n’est généralement pas de mise lorsqu’Israël est en cause.

Nous en voulons pour preuve sa mise en cause dans la « Tragédie annoncée » par Le Monde , dans son éditorial des 8-9 octobre 2006.

C’est bien évidemment « le comportement du gouvernement d’Ehoud Olmert, qui alimente « l’hostilité » du Hamas à l’égard de l’ « ennemi sioniste ».

Pourtant, le nouveau correspondant de ce journal guère mieux disposé à l’égard d’Israël, que ses prédécesseurs, a bien signalé que le premier ministre palestinien avait scandé à trois reprises : « Nous ne reconnaîtrons pas Israël » (l’utilisation du futur est tout à fait révélateur des objectifs du Hamas).

Mais, ce qui est le plus choquant, c’est de voir un journaliste français reprendre à son compte l’incongruité qui consiste à considérer « qu’en réalité, le mouvement intégriste en acceptant de créer un Etat palestinien dans les frontières de 1967 reconnaît de facto Israël ».

Certes, on ne peut reprocher à un journaliste d’être ignorant en droit international, qui ne connaît pas la reconnaissance de facto d’un Etat.

Un Etat ne peut exister que de jure, c’est à dire qu’il doit pour exister (l’existence d’un Etat est indépendante de toute reconnaissance : un Etat existe ou n’existe pas) en présenter les trois éléments constitutifs (un territoire, une population, des pouvoirs publics) et répondre au critère juridique de l’indépendance (c’est à dire disposer de la plénitude, de l’autonomie et de l’exclusivité des compétences).

La reconnaissance n’a qu’une incidence psychologique et traduit l’intention de celui de qui émane la reconnaissance de faire bénéficier l’entité reconnue de tous les droits qui s’attachent à la qualité d’Etat (ex : établissement de relations diplomatiques, conclusion d’accords internationaux), bénéfice des immunités étatiques).

La reconnaissance d’un Etat implique, automatiquement, la reconnaissance de son gouvernement.

En revanche, la question de la reconnaissance d’un gouvernement peut se poser, indépendamment de toute reconnaissance - déjà acquise - d’un Etat, cela à la suite d’un « coup d’Etat », par exemple.

Dans ce cas, la reconnaissance d’un gouvernement peut se faire de facto (de fait), avant de l’être, ultérieurement, de jure (de droit), à la suite d’élections régulières ou d’une nouvelle constitution par exemple..

Une reconnaissance de gouvernement de facto peut donc être assortie de conditions (régularisation par des élections, par ex.) et être provisoire. Elle se fonde, seulement, sur une situation de fait, d’où l’expression de facto.

En réalité, le « pauvre journaliste » du Monde a, également, confondu reconnaissance expresse ou explicite et reconnaissance implicite, ces deux modalités pouvant s’appliquer aussi bien à la reconnaissance d’Etat qu’à la reconnaissance de gouvernement.

Une reconnaissance implicite résulte de certains actes (ex : échange de relations diplomatiques, voire conclusion d’un accord, à moins que l’autre Etat précise que cette conclusion n’équivaut pas à une reconnaissance - telle est l’attitude des Etats-Unis à l’égard de certaines entités, telle la Corée du nord ou Cuba).

Une reconnaissance explicite résultera, elle, d’un acte ayant précisément cette finalité : déclaration de reconnaissance en bonne et due forme.

De nos jours, les reconnaissances se font généralement implicitement, telle est, en tout cas, la pratique française.

Pour en revenir à l’attitude du Hamas à l’égard d’Israël, c’est moins l’absence de reconnaissance (qu’elle soit expresse ou implicite) d’Israël qui pose problème que les déclarations répétées des dirigeants du Hamas, à l’heure actuelle à la tête du gouvernement palestinien, de refuser, expressément, une telle reconnaissance.

Ce refus est renforcé par l’objectif à terme de la destruction d’Israël, puisque les dirigeants du gouvernement palestinien n’envisagent qu’une « trêve de longue durée », situation tout à fait insolite en droit international.

D’ailleurs, très logiquement le refus de reconnaître Israël est assorti du refus de renoncer à la violence, alors que le droit international consacre l’interdiction du recours à la force, sauf cas de légitime défense.

Israël est donc parfaitement fondé à refuser toute négociation avec un gouvernement qui, au mieux, n’envisage que de lui laisser un « répit », indépendamment du fait que le Hamas refuse, également, de prendre en compte les accords antérieurs conclus par l’OLP, auquel a, pourtant, succédé l’Autorité palestinienne, représentée par son gouvernement.

Les internautes voudront bien nous pardonner cette « leçon de droit international », dont ne profitera, malheureusement, pas le journaliste du Monde.



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