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L’Assemblée Nationale Constituante tunisienne rejette toute forme de « normalisation » avec Israël
Hélène Keller-Lind
Article mis en ligne le 10 mai 2014
dernière modification le 11 mai 2014

Journée houleuse à l’Assemblée Nationale Constituante tunisienne en ce 9 mai 2014, jour de l’audition de deux ministres sous le coup d’une motion de censure car accusés d’avoir failli en autorisant une soixantaine d’Israéliens à entrer en Tunisie pour le pèlerinage de la Ghriba. Ils se justifiaient, l’un invoquant des considérations techniques et des us et coutumes, l’autre la nécessité absolue de sauver le tourisme. Débats houleux, insultes, Israël traîné dans la boue par la plupart, pour que, finalement, les signataires de la demande de motion de censure retirent leur signature. L’ANC conclura en rejetant toute « normalisation » avec Israël.

Un pétard mouillé ayant pourtant fait d’énormes dégâts et avec la réaffirmation de la condamnation de toute « normalisation »

Cette journée du 9 mai consacrée à l’audition devant l’Assemblée Nationale Constituante tunisienne du ministre du Tourisme, Amel Karboul, et du ministre délégué à la Sûreté, Ridha Sfar, se sera terminée en pétard mouillé avec le retrait pur et simple de leur signature par les députés ayant initié cette motion de censure. Après que les deux ministres concernés aient calmement donné leur version des faits. Autoriser des pèlerins israéliens à entrer en Tunisie pour une brève visite relevant du respect d’une procédure administrative courante préexistante, pour Ridha Sfar, nécessité absolue pour sauver la saison touristique, ce pèlerinage de La Ghriba étant une vitrine du tourisme tunisien qui fait vivre des milliers de Tunisiens, pour Amel Karboul, qui affirmait « respecter toutes les religions » mais niait énergiquement avoir accueilli une délégation israélienne au port de La Goulette comme elle en avait été accusée.

On soulignera que ’le tourisme participe à la compensation du déficit commercial en Tunisie à hauteur de 62,5%, grâce aux recettes en devises qui représentent à peu près 15% des recettes globales du pays". Cinq cent mille Tunisiens actifs, soit deux millions de familles vivant de cette industrie, mise en danger par cette affaire, rappelait la ministre. Des professionnels du tourisme manifestaient en sa faveur devant l’ANC pendant ses travaux.

Les députés de Wafa, d’Ennahdha, du CPR et de l’Alliance qui avaient lancé cette demande de comparution des ministres ont finalement retiré leur signature et il n’y a donc eu ni destitution des ministres mis en cause, ni exigence d’excuses de leur part. Mais le vote d’approbation d’une simple déclaration de l’ANC rapporté ainsi par le Huffpost Maghreb : « Sous les huées, les cris et autres applaudissements, le deuxième vice-président lit tant bien que mal le communiqué préparé durant la pause prière. « Nous condamnons toute forme de normalisation avec l’entité sioniste », a-t-il dit, dans une cacophonie généralisée.

Ensuite, Mustapha Ben Jaâfar décide de passer le communiqué au vote. 80 pour, 8 abstentions et 4 contre... « Je vous remercie", commente le président de l’Assemblée, sans plus de détails, n’indiquant pas si le communiqué en question avait recueilli le nombre suffisant de votes ».

Si la Constitution n’a pas inscrit la criminalisation de la « normalisation » avec Israël, on voit ici qu’elle existe bel et bien dans les faits...

Israël traîné dans la boue des clichés antisionistes habituels

Ce retrait s’est fait, en effet, après des débats particulièrement violents, dûment filmés, avec insultes et menaces proférées par des députés appartenant même parfois au même parti. Certains en sont presque venus aux mains...Spectacle lamentable donnant fort peu envie à quiconque de se risquer à aller en vacances de détente dans ce pays...Ce qu’une grande partie de la presse tunisienne appelait le lendemain une mascarade digne d’une république bananière aura donc fait de gros dégâts pour l’image du pays.

Toutefois, la plupart de élus présents, mais pas tous, il faut le souligner, étaient d’accord sur un point : il est hors de question de « normaliser » les relations avec « l’entité sioniste ». Un député détaillait tous les « massacres » - imaginaires- dont Israël se serait rendu coupable, un autre déclarant que la présence d’Israéliens en Tunisie « souillait les terres du pays ». Le député Iyed Dahmani lançant :
« Aujourd’hui la question est de savoir comment composer avec une entité qui pratique la discrimination raciale contre les Palestiniens » .
Bref, on a pu entendre dans cette enceinte, pourtant donnée en exemple par des responsables européens, toute la litanie de la diabolisation habituelle de l’État hébreu.

Ridha Sfar et Amel Karboul restant imperturbables mais jurant leurs grands dieux qu’ils respectaient la politique étrangère tunisienne et rejetaient donc toute « normalisation » avec Israël. « Qu’on soit clairs, la politique tunisienne soutient à 100% la cause palestinienne », a-t-elle dit. et d’ajouter « Je n’ai jamais rencontré un Tunisien qui ne soutient pas la Palestine et ne veut pas que Al Qods soit sa capitale ».

Les dessous de l’affaire : mettre à mal le gouvernement de Mehdi Jomâa

Le député Tahar Hmila soulignait qu’il n’y avait aucun fondement juridique pour cette audition des ministres, aucune loi interdisant l’entrée d’Israéliens dans le pays et que certains députés voulant donc détruite l’économie nationale pour servir les intérêts des Palestiniens » .

D’ailleurs, les députés d’Ennhada, le parti islamiste au pouvoir après la « révolution du jasmin », se sont distingués en ne prenant pas part à la foire d’empoigne généralisée. Pour Aboussaoud Hmidi, un analyste d’AfricanManager, cela ne cachait pourtant pas le fait qu’ils avaient été parmi les initiateurs de toute cette affaire dont le but était clairement de se défaire de ministres encombrants à leurs yeux. Selon lui, en effet, « les initiateurs de l’audition ont voulu adresser un message à Mahdi Jomâa qui accumule, depuis sa désignation, plusieurs succès sur les plans intérieur et international. Et à ce rythme, il pourra être sollicité pour continuer sa mission au-delà du prochain scrutin, et même pour deux mandats encore , comme l’ont annoncé plusieurs acteurs politiques. Mais le maintien de Mahdi Jomâa et de son équipe, après le prochain scrutin, risque de priver les partis gagnants, qui ont trop attendu depuis la révolution , ou qui ont été frustrés de leur victoire du 23 octobre 2011, d’être associés à la gestion du pays.

Ridha Sfar, pour sa part a la posture, aux yeux des islamistes, de quelqu’un qui va loin dans sa lutte contre l’extrémisme religieux .La stratégie du démantèlement des cellules terroristes, de la reprise des mosquée des extrémistes dissidents, de la neutralisation des réseaux d’envoi des Tunisiens en Syrie, au Nord –Mali et en Libye , des attaques contre les terroristes retranchés à Chaâmbi, commence à donner des résultats . Donc il faut l’intimider ».

Quelle aubaine aura donc été pour ces islamistes que cette entrée en Tunisie d’Israéliens révélée par « un agent de sécurité apparemment d’obédience islamiste » ayant donné « les détails de documents et de procédures administratives en rapport le dossier de l’entrée des israéliens pour le pèlerinage d’Al Ghriba ».

Une fois de plus dans le monde arabo-musulman, Israël aura joué le rôle de vilain tout désigné...



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