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Des robots et des hommes
Par Jean Tsadik © Metula News Agency
Article mis en ligne le 24 octobre 2005

Mais 12 hommes c’est lourd, ça nécessite des armoires, des WC, des douches, une cuisine...

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Les conceptions militaires traversent de grandes mutations. D’une part elles font usage des avancées de la technologie, lorsqu’elles ne sont pas les premières à les provoquer, et de l’autre, ces conceptions tentent de s’adapter aux genres de conflits qui ravagent la planète et qui, eux aussi, subissent de profondes évolutions.

 

Les changements de concepts militaires vont de pair avec le développement de nouveaux moyens qui les supportent. A quoi servirait-il, en effet, de développer des principes de guerre mieux adaptés aux conflits si les armées étaient privées des équipements pour les appliquer ?

 

A rien ? – Pas tout à fait cependant. En tous cas pas dans les pays dits riches et avancés dotés de centres de développement d’armes nouvelles. Dans de tels cas, on assiste à un dialogue entre les stratèges militaires, les militaires et les développeurs. Les premiers font part de leurs besoins et les derniers essaient de les combler.

 

Pour Israël, ce dialogue revêt bien évidemment une importance critique et il a non seulement déjà souvent modifié la manière qu’a Israël de faire face aux dangers qui la menacent mais il contribue également à augmenter la sécurité des autres sociétés organisées face aux risques qu’elles encourent.

 

Ce n’est certes pas pour autant, lorsqu’une armée adopte de nouvelles doctrines et de nouveaux équipements, qu’elle abandonne instantanément les anciens. Les changements se font au contraire graduellement, en tenant compte des expériences de terrain, et les nouveautés supplantent les conceptions plus anciennes en prenant plus de place dans les budgets-défense et en attirant plus de personnel au sein des forces de sécurité.

 

Les choses ont toujours fonctionné ainsi et la cavalerie n’a pas été supprimée en un jour au profit des blindés. Poussant un peu plus loin cette comparaison, nous dirons que les nations qui n’ont pas su s’adapter à la supplantation des chevaux par les chars, comme la Pologne, par exemple, à la veille de la Seconde guerre mondiale, se sont retrouvées complètement démunies à l’heure de vérité.

 

Or, aujourd’hui, les experts constatent que les guerres conventionnelles se font de plus en plus rares. Le dernier combat de tanks date de l’invasion de l’Irak, alors que la dernière confrontation de chasseurs contre chasseurs, dans le ciel, remonte à une fameuse empoignade entre Israéliens et Syriens, au début des années 80, lors de laquelle les derniers cités perdirent en une seule confrontation la quasi-totalité de leur force aérienne.

 

Est-ce à dire que les nations négligent le développement des équipements conventionnels et stratégiques (nucléaires) ? Non plus. Mais ces armes-là sont de plus en plus versées dans la balance de la dissuasion et elles interviennent de moins en moins souvent dans les combats.

 

La quasi-totalité des conflits récents et en cours met aux prises des sociétés organisées, disposant de moyens classiques imposants et de personnels nombreux avec des groupes incomparablement plus petits, agissant sur les points faibles de leurs ennemis.

 

Il n’est que d’observer les carnages hebdomadaires provoqués par les miliciens-terroristes d’El-Zarkaoui en Irak, les attentats menés par le Hamas et les Martyrs d’Al-Aqusa en Israël ainsi que les autres assassinats collectifs perpétrés en Amérique, en Espagne, en Indonésie, en Grande-Bretagne, etc. pour réaliser que les armées traditionnelles et leurs moyens présentent de ces points faibles en grande quantité au regard des spécificités des conflits actuels.

 

En fait, on assiste à une course poursuite entre les doctrines dirigeant les actions des groupes de miliciens-terroristes et celles appliquées par les sociétés organisées. Et comme, pour les miliciens-terroristes, il ne s’agit jamais de tenir un front ou d’occuper une région mais d’empoisonner la vie de leurs adversaires et de frapper leur population civile, les groupes armés n’ont que faire de se mesurer en qualité d’équipement ni en nombre de soldats avec lesdits adversaires. Il suffit d’ailleurs de regarder leurs armes pour se rendre compte qu’elles sont rustiques et qu’elles ont été réformées depuis belle lurette des arsenaux de leurs opposants. Oui mais elles cumulent plusieurs mérites pour leurs utilisateurs : elles sont très répandues, donc bon marché, elles ont subi à maintes reprises l’épreuve du feu et sont donc éprouvées, et elles sont simples d’utilisation, ce qui permet de les mettre dans les mains de combattants ayant subi une formation minimale.

 

De tous temps, les armées régulières ont eu d’énormes problèmes pour se mesurer avec des forces irrégulières et on compte très peu d’armées ayant réussi à annihiler ce genre d’adversaires. Certains experts allant jusqu’à prétendre que de telles victoires ne se sont jamais produites.

 

Sans participer à cette dispute d’historiens, nous remarquons un paramètre du nouveau champ de bataille, qui est autrement plus important en considération de la sécurité de nos populations civiles. Ce paramètre est bien évidemment celui introduit (ou réintroduit, si l’on tient compte des Kamikazes) par les organisations islamistes dans la guerre qu’elles mènent à l’Occident : l’engagement de personnels prêts à sacrifier leur existence afin de servir les objectifs de ceux qui les commandent.

 

Inutile de dire que l’introduction de cette nouvelle donne a violemment bouleversé les doctrines de bases des responsables de la sécurité dans les sociétés organisées. Jusqu’aux assassinats-collectifs-suicides, toute la conception sécuritaire était articulée sur la crainte de l’autre de mourir, mais depuis que la mort de ses soldats fait partie du concept opérationnel de l’ennemi, celui-ci n’est évidemment plus sensible à la menace de se faire tuer, qui représentait, il n’y a pas si longtemps, le fondement de tous les concepts de défense.

 

Désormais, il n’est plus que rarement question de combattre en infligeant le plus grand nombre de victimes à une autre force armée. Aujourd’hui, lorsque des miliciens-terroristes parvenant à traverser votre système de sécurité s’approchent de leur objectif, il ne reste plus aux sociétés organisées qu’à relever leurs victimes, en espérant qu’elles soient le moins nombreuses possible.

 

Le nouveau concept de défense consiste ainsi à empêcher les exécutants-suicidaires de s’approcher de leur objectif. Les mots-clés de ce nouveau vocabulaire sont : renseignement, contrôle, prévention, surveillance et absence de contact physique direct avec les éléments suicidaires en opération.

 

Pour Israël, en confrontation directe avec ce type de conflit, le développement de doctrines-équipements dans ces domaines procède d’une importance vitale. L’un des domaines les plus explorés par l’Organe de Développement de Moyens de Combats, Raphaël, mais aussi par des dizaines de firmes privées comme Elbit Systems ou l’IAI, l’Industrie Aéronautique d’Israël, est celui des véhicules sans présence humaine.

 

Déjà considéré comme un précurseur dans le cadre des avions sans pilote, fort de résultats probants, l’Etat hébreu s’est maintenant lancé dans la mise au point de vedettes sans équipage et de véhicules terrestres sans servants.

 

Au début de cette révolution conceptuelle et opérationnelle, il ne s’agissait avec les premiers Maslatim (petits avions sans pilotes) que de rôles d’observation. Ces appareils ressemblaient à de gros modèles réduits, munis d’une caméra, qui survolaient des zones frontalières sensibles ou les territoires palestiniens, à la recherche de miliciens-terroristes en route pour un mauvais coup. Puis cette activité s’est affinée, au point de donner naissance à de multiples industries annexes, qui vont de l’amélioration de senseurs d’identification de tous types, du contrôle radar, de la guerre électronique à la production d’armement sophistiqué, en passant par la multiplication des types de missions et jusqu’à l’introduction de l’intelligence électronique.

 

Les Malatim (avions sans pilotes) peuvent désormais opérer très loin de leurs frontières, avec guidage et communications par l’intermédiaire d’un satellite et remplir des fonctions offensives complexes qu’il n’est pas nécessaire de détailler dans ces pages. Il peut suffire de mentionner qu’en Afghanistan, les Américains ont donné la chasse à des talibans au moyen d’un avion sans pilote, doté de missiles à guidage laser Hellfire (Feu de l’enfer). Aussi, personne n’a été surpris outre mesure, lorsqu’au dernier salon du Bourget, la France a présenté un Malat de son cru, équipé de missiles antitanks produits par Raphaël.

 

De l’avis des experts, dans un délai de dix à quinze ans, la moitié des appareils d’une armée de l’air à jour seront des robots volants. En attendant, ils servent à la régulation de la circulation au-dessus des routes suisses, et dans notre région, ils ont sauvé la vie de centaines de civils, en identifiant et en participant à la neutralisation des robots humains partis se faire exploser au milieu d’eux.

 

Le dernier né des véhicules inoccupés israéliens est spectaculaire. C’est une vedette rapide (70km/h) sans équipage qui se trouve au stade des essais avancés : le Protector. Un exemplaire a déjà été vendu à Singapore avant même sa mise en opération et l’intérêt que ce bateau suscite en Europe et aux USA est extrêmement pointu.

 

Le Protector était conçu à la base pour emporter 12 combattants complètement équipés. Sa mission de base, la surveillance d’une zone maritime, des eaux territoriales et les opérations commando. Mais 12 hommes c’est lourd, ça nécessite des armoires, des WC, des douches, une cuisine. Les hommes, surtout dans une mer agitée, ont tendance à fatiguer et, naturellement, au bout de quelques heures, leur attention se relâche.

 





Le Protector part en mission

 

Sur une vedette sans équipage, ces impondérables n’existent pas. Toute la charge utile est employée au succès de la mission, l’autonomie a pu être augmentée et, surtout, le risque encouru par les marins est nul. Dans la marine bleu blanc, on a encore fortement gravé dans la mémoire l’incident lors duquel un bateau de pèche palestinien, abordé pour un contrôle, avait explosé sur l’impulsion de son équipage-suicide.

 

C’est pour cela qu’on compte sur le Protector ; déjà, une petite merveille technologique. Capable de contrôler un navire suspect, grâce à ses caméras, ses senseurs ultrasophistiqués, ses écouteurs et ses haut-parleurs très puissants. Lors des essais, le capitaine d’un navire recevant l’ordre de stopper ses machines est fort surpris de ne distinguer personne sur le pont de la vedette ; uniquement des dizaines de gadgets électroniques qui mettent à nu son chargement. Il faut dire que la mitrailleuse de 7.62 qui équipe le prototype a de quoi faire comprendre à l’équipage contrôlé qu’il ne s’agit pas d’une caméra cachée. Loin de là, à terre, dans des conditions optimum, sur ses écrans de contrôle, le commandant à distance de la vedette épie le personnel du paquebot dans ses moindres faits et gestes, disposant de toutes les informations nécessaires pour prendre toutes les décisions que la situation impose.

 

Prochainement, Protector sera doté d’autres types d’armement. On lui prépare une intelligence artificielle qui pourra lui faire effectuer des missions, soumis aux conditions de diverses variantes, ne nécessitant plus du tout d’intervention humaine.

 

Tout comme les véhicules autonomes sur roues concurrents de Elbit et de l’IAI. Les premiers l’ont appelé Avangarde et les seconds, Gardium. Les deux monstres se ressemblent, étant tous deux développés sur la base de la plateforme produite par une autre société israélienne : Tomcar.

 





Le Guardium parti sans attendre son chauffeur…

 

Les deux véhicules sont munis d’un blindage léger, les deux en sont également au stade des essais avancés. Ils sont capables de franchir des obstacles, décidant seuls du meilleur itinéraire à suivre. Leur but commercial commun est contenu dans un cahier des charges de Tsahal : le véhicule autonome doit être capable de patrouiller sans intervention humaine le long de la nouvelle frontière avec Gaza ou le long du mur de sécurité.

 

Le cahier des charges impose encore que le véhicule sans conducteur, sans équipage et sans pilote à distance puisse repérer les intrusions, identifier les intrus avec une grande précision et les neutraliser.

 

Ce n’est plus de la science-fiction, dans quelques mois, ces armes du nouveau champ de bataille seront opérationnelles. Dans quelques années, en Israël du moins, 20 à 30% des véhicules terrestres devraient être inhabités et de plus en plus autonomes. On fait la même estimation pour Protector et ses cadets dans la marine.

 

Les assassins-suicidaires désirent se tuer en emportant dans l’au-delà le plus possible d’êtres humains appartenant au peuple d’en face. L’introduction des robots vise à ce qu’ils se fassent sauter pour tordre des tôles ; ce, bien entendu, à moins que les tôles en question ne viennent à bout des terroristes en moins de temps qu’ils ne mettent à s’envoyer en l’air. Avec des senseurs capables de détecter un mouvement humain à 200 mètres en terrain accidenté, d’envoyer son image précise, sa description, son poids, sa taille, de jour comme de nuit, et de vérifier automatiquement, dans la banque de données des terroristes recherchés, si ces coordonnées correspondent à quelqu’un de connu, les ennemis de l’humanité n’auront certes pas la tâche facile…

 

Les robots pour protéger la société humaine, il me semble avoir déjà vu cela quelque part. Et même assez souvent.



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