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Les questions cruciales de l’Etat palestinien indépendant éludées : où et avec qui ?
Article mis en ligne le 28 novembre 2012

Le 29 novembre 2012, le Président de l’Autorité Palestinienne Mahmoud Abbas va solliciter de l’Assemblée générale des Nations Unies qu’elle reconnaissance un statut d’Etat non membre pour la Palestine, et ce avant même que la session ne se termine en septembre 2013. Techniquement, l’adoption de cette résolution ne devrait pas poser de difficultés dans la mesure où elle suppose un vote à la majorité simple des 193 membres, pour lesquels le principe est largement acquis.

C’est du moins ce qui résulte d’une résolution sur Gaza débattue le 22 novembre 2012 à Strasbourg, à l’occasion de laquelle les euros députés se sont prononcés massivement en faveur d’une telle reconnaissance (avec 447 voix pour et 113 contre). Le 23 novembre 2012, c’est la Suisse qui a annoncé son soutien à la demande, par l’intermédiaire du Conseil fédéral qui a de la même manière, adopté une décision de principe sur la question. De même, la gauche française s’est empressée, tout au long du mois de novembre 2012, de rappeler au Président François Hollande l’engagement qu’il avait pris sur ce point en cas de victoire aux élections présidentielles. Il n’est donc plus question pour lui de s’y dérober.

La démarche du Président de l’Autorité palestinienne n’en repose pas moins sur une ambigüité qui n’a jamais été levée. Pour fonder sa demande, il recourt aux textes adoptés dans le cadre du conflit israélo arabe et les transpose subtilement, dans le cadre du conflit israélo palestinien. Les résolutions internationales invoquées par Mahmoud Abbas ne concernent en rien la Palestine, et ne sauraient justifier l’implantation de l’Etat de Palestine sur les frontières de 1967. Tout d’abord, la résolution 181 de l’Assemblée de l’Onu adoptée le 29 novembre 1947 qui a décidé du principe de la partition de la Palestine mandataire en deux Etats (ce sera son 65ème anniversaire) n’a jamais évoqué un Etat palestinien mais Etat juif, l’autre arabe. D’ailleurs, le conflit opposait en 1948 Israël aux pays arabes de la région, non aux palestiniens. De même, la résolution 242 du Conseil de sécurité des Nations Unies du 22 novembre 1967 qui a appelé au retrait par Israël, des territoires occupés lors de la guerre des 6 jours du mois de juin 1967, concernait les territoires de Jordanie et de Syrie (le Golan). C’est la partie occidentale du Royaume Hachémite de Jordanie qui a été occupée par Israël la suite de la guerre des 6 jours, non la Palestine en tant qu’Etat. Or, depuis juillet 1988, la Jordanie a renoncé à toute souveraineté sur la Cisjordanie et même a fait la paix avec Israël le 26 octobre 1994. Mahmoud Abbas ne sauraient donc exciper de textes adoptés à une époque où la notion de peuple palestinien n’existait pas pour revendiquer les terres jordaniennes en ce compris Jérusalem Est qui abrite l’esplanade des mosquées, sauf à se méprendre sur la portée des textes internationaux et s’en attribuer le bénéfice : il n’est aucune corrélation entre les textes de 1947 et de 1967, et l’assiette du futur Etat palestinien.

D’un côté, la communauté internationale, lassée par le conflit israélo palestinien (qui n’a que trop duré), se laisse entrainée par cette confusion habilement entretenue bien que la philosophie palestinienne (l’éradication d’Israël), le concept de nationalité palestinienne, de peuple palestinien, et le principe d’attachement des palestiniens à la terre de la Palestine mandataire résultent de documents qui sont nés bien après le conflit israélo arabe de 1948, en l’occurrence les Chartes, Olp de 1964 (modifiée par la quatrième session du Conseil national palestinien réuni au Caire du 1er au 17 juillet 1968) et du Hamas de 1988. La communauté internationale n’entend donc pas s’encombrer de subtilités textuelles si elle pense que le conflit au Moyen Orient est en passe d’être réglé.

De l’autre, les Etats-Unis ne se sont jamais laissés piégés. Ils refusent d’entendre parler d’un mécanisme décisionnel international pour créer l’Etat palestinien : la seule voie réaliste repose sur les négociations directes avec Israël. Ils ont déjà refusé (en 2011) aux palestiniens de présenter leur demande à l’Onu au motif qu’ils ne constituent pas un Etat. Ils ont également menacé d’opposer leur véto au Conseil de sécurité en cas de demande d’adhésion à part entière d’un État de Palestine au sein de l’Onu.

En marge des questions juridiques, il faudra bien aborder les aspects pratiques de l’Etat palestinien et notamment les questions fondamentales systématiquement éludées : où et avec qui ?

Il n’existe aucune unité au sein des instances palestiniennes, voire, il existe bien deux entités palestiniennes distinctes : l’une en Cisjordanie et l’autre à Gaza. A la suite de l’intervention israélienne de novembre 2012 dans la bande côtière (pilier de défense), Mahmoud Abbas, n’a jamais été impliqué dans les négociations indirectes au Caire ayant abouti à l’accord de cessez le feu. Plus symptomatique, le chef de l’Autorité Palestinienne a même félicité Ismaïl Haniyeh, le chef du Hamas pour cette victoire tout en présentant ses condoléances aux familles des martyrs. La dualité des entités palestiniennes, politique, géographique et philosophique devra donc être prise en considération par la communauté internationale.

Sur le plan idéologique, le Hamas n’est pas prêt à abandonner partie de la Palestine historique à Israël. En célébrant « leur victoire », les palestiniens de la bande de Gaza ont annoncé par la voix de Ahmed Bahar, (haut dirigeant du Hamas) « une victoire historique de la résistance contre l’occupation » qui pose « les bases de la bataille pour libérer l’intégralité de notre territoire et de nos sites sacrés ». Un autre dirigeant du Hamas, Khalil al Hayya, a même été jusqu’à annoncé la réconciliation du Hamas et du Fatah devant des milliers de personnes rassemblées sur la principale place de la ville de Gaza : « Aujourd’hui, notre unité se matérialise, le Hamas et le Fatah ne sont qu’une seule main, un seul fusil et une seule roquette » (ce qui ne cadre pas exactement avec le discours de Mahmoud Abbas).

Il ne faut donc surtout pas se leurrer sur les perspectives de paix que feraient naître l’admission de la Palestine en tant qu’Etat non membre de l’Onu, tant que les questions fondamentales de l’emplacement géographique et du cocontractant n’auront pas été traitées. Mahmoud Abbas est dans l’impossibilité d’imposer sa vision des frontières tant à l’Etat juif (dont il ambitionne d’annexer une partie), qu’au Hamas qui ne veut pas entendre parler de paix avec l’entité sioniste.

En cas d’obstination, Mahmoud Abbas risque de se voir opposer la fin des financements américains : le Congrès américain s’est déjà refusé à toute aide directe à l’Autorité Palestinienne en 2012 (en dehors des arriérés promis au titre de l’année 2011). L’année 2013 ne devrait pas voir les fonds américains abonder les caisses palestiniennes si le Président palestinien imposait ses conceptions afférentes aux frontières, au statut de Jérusalem, aux réfugiés, aux implantations juives ou encore de la sécurité et des prisonniers.

Si donc les palestiniens demandent l’autodétermination, leur futur Etat n’aura rien à voir avec les frontières dites « de 1967 ». Un Etat palestinien sera institué sur les terres de Cisjordanie exclusivement contrôlées par les palestiniens avec Ramallah comme capitale (supposant un accord de paix signé avec Israël) et une entité palestinienne à Gaza (non étatique à défaut d’accord du Hamas). Faute d’admettre cette situation, rien ne sortira de la session parlementaire onusienne.



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