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Hommage au Pape en tant qu’ami des Juifs
Rédaction du journal Haaretz, et Associated Press - Traduction française de Simon Pilczer
Article mis en ligne le 6 avril 2005

Le Pape Jean-Paul II était un « homme de paix, un ami du Peuple juif », a déclaré hier le Premier Ministre Ariel Sharon à l’ouverture de la réunion hebdomadaire du cabinet, dimanche, en présentant les condoléances du pays à la communauté chrétienne aussi bien en Israël qu’à l’étranger, lors de la mort du Pape.

Jean-Paul II « a reconnu son caractère unique [du Peuple juif] et mit ses efforts à une réconciliation historique des nations et au renouveau des liens diplomatiques entre Israël et le Vatican en 1993 » a poursuivi Sharon, qui rencontra le Pape en 1999, quand il était Ministre des Affaires Etrangères, et l’invita pour les célébrations de millénaire au nom du gouvernement. « Le monde a perdu hier l’un des plus importants dirigeants de notre temps, dont la contribution à réunir les peuples, à unir les nations, et à la compréhension et à la tolérance nous accompagneront pour de nombreuses années ».

Le Président Moshé Katsav a rendu un hommage similaire, déclarant : « Le Pape ... a mis fin courageusement à une injustice historique en rejetant officiellement des préjugés et des accusations contre les Juifs ».

Au cours de sa papauté, Jean Paul II a révolutionné la relation aussi bien avec Israël et le Peuple juif. En 1979, lors de son premier voyage dans sa Pologne natale comme chef de l’Eglise catholique, il devint le premier pape à visiter un camp de la mort, s’agenouillant en prière à Auschwitz - un lieu qu’il décrivit comme le « triomphe du mal ». En 1986 à Rome, il devint le premier Pape à pénétrer dans une synagogue ; pendant cette visite, il fit cette déclaration aujourd’hui fameuse, que les Juifs sont le « frères aînés » des Chrétiens, et il parla de la responsabilité chrétienne pour les crimes contre les Juifs.

En 1993, le Vatican reconnut finalement Israël, une étape largement considérée comme ôtant toute opposition théologique à l’existence de l’état juif. Et en 2000, Jean Paul II non seulement visita Israël, mais gagna le cœur des Israéliens en visitant des sites tels le mémorial de l’holocauste à Yad Vashem et le Mur Occidental, où il se plia à l’ancienne coutume juive de placer un mot dans les fentes entre les pierres. « Nous sommes profondément attristés par le comportement de ceux qui au cours de l’histoire ont provoqué des souffrances à vos enfants et, en demandant votre pardon, nous souhaitons nous engager dans une véritable fraternité avec le Peuple de l’Alliance » se lisait sur ce mot.

Mais alors que beaucoup d’Israéliens pleuraient la perte d’un pontife extraordinairement amical, pour certains, le chagrin était plus personnel : les survivants âgés de l’holocauste ont évoqué dimanche leurs souvenirs d’avoir grandi avec Karol Wojtyla, l’homme qui devint Jean Paul II, dans la petite ville polonaise de Wadowice, et des rencontres avec le jeune séminariste vers la fin de la seconde guerre mondiale. Ces amitiés de jeunesse sont largement considérées comme un facteur majeur de réconciliation avec le Peuple juif et l’Etat juif.

Une survivante, Idit Tzirer, a déclaré qu’elle était âgée de 13 ans et décharnée en 1945. Elle venait d’être libérée d’un camp de travail nazi et était assise au coin d’une rue dans la neige, trop faible pour marcher, quand Wojtyla s’approcha.

« Soudain, il apparut, comme un ange du paradis, alors que personne d’autre ne me prêtait attention », dit-elle sur Israël TV. « Il m’apporta une tasse de thé chaud et deux grosses tranches de pain et de fromage... Après un moment il me demanda si je voulais quitter ce lieu et je lui dis que je voulais aller à Cracovie, mais que je ne pouvais pas marcher. Alors il me hissa sur son dos, comme un sac de farine, et me porta, quatre ou cinq kilomètres ».

L’ancien grand Rabbin d’Israël Meïr Laü, également survivant de l’holocauste, rappela qu’il rencontra le Pape cinq fois. Lors d’une réunion, le Pape âgé dit à Laü qu’il se souvenait du grand-père du Rabbin allant à la synagogue chaque dimanche avec une foule d’enfants autour de lui.

« Il me demanda : ‘Combien ont survécu à l’holocauste ?’ » déclara Laü sur radio Israël. « Seulement cinq, 42 ont été tués. Puis le Pape leva les yeux au ciel et dit : ‘au cours de tous mes voyages - j’ai visité 120 pays, j’ai vu de l’antisémitisme et j’ai souligné notre obligation, l’obligation de toute l’humanité, d’assurer l’existence continue et le futur de notre frère aîné, la Nation juive’ ».

Interrogé pour savoir si le prochain Pape poursuivrait l’héritage du rapprochement avec Israël et les Juifs, le légat du Pape en Israël, Monseigneur Pietro Sambi, a déclaré sur la télévision Channel 2 qu’il était »sûr » que ce serait le cas. Il cita le concile Vatican II, qui prit fin en 1965 et « parle de l’immense héritage commun existant entre le Peuple juif et le Peuple chrétien ».

Parlant en anglais, Sambi ajouta que le Saint Siège et le Grand Rabbinat étaient « des collaborateurs inévitables pour donner à l’humanité les principes moraux pour son humanité et son bien-être ».

Un officiel du Rabbinat marqua son accord. « Dans les dix dernières années, des liens se sont réchauffés et il existe une connection serrée entre le Rabbinat d’Israël et le Vatican », dit-il. « Il fut le premier Pape à demander pardon aux juifs ».

Les relations avec le Pape n’ont pas été exemptes de frictions : il y eut des conflits, par exemple, au sujet de la canonisation d’Edith Stein, une juive convertie au christianisme qui devint nonne et mourut à Auschwitz, et au sujet de la béatification du Pape Pie XII, que beaucoup de Juifs ont accusé d’avoir été incapable de parler pendant l’holocauste.

Mais dans les circonstances, il fit un grand parcours, plus que tout autre Pape, peut-être grâce à son accointance avec les Juifs et le fait qu’il vécut à travers l’holocauste où il agit », déclara Aharon Lopez, ancien ambassadeur d’Israël au Vatican.

« De tous les Papes dans l’histoire, Jean Paul II est celui qui a le mieux compris les Juifs », ajouta Théo Klein, ancien président du CRIF, groupe représentatif juif de France.

Les Musulmans palestiniens ont aussi pleuré le Pape, mais avec plus de scepticisme. Bernard Sabella, un officiel du conseil des églises du Moyen-Orient qui rencontra le pontife plusieurs fois, déclara que Jean Paul II était préoccupé par la souffrance palestinienne, ce qui le conduisit à visiter un camp de réfugiés palestiniens près de Bethlehem pendant son voyage en 2000.

Mais le dirigeant du clergé musulman palestinien, Ikrema Sabri, a déploré que le Pape ait échoué à changer la vision négative de l’Islam par le monde occidental.



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