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La place d’Israël à l’ONU : Deux poids, deux mesures
Par David Ruzié, professeur émérite des universités, spécialiste de droit international
Article mis en ligne le 20 juin 2012

L’accession, récente d’Israël, pour la troisième fois, à une vice-présidence de l’Assemblée générale de l’ONU, annoncée, il y a quelques jours, est une occasion de faire le point sur la place d’Israël dans l’Organisation mondiale.
Certes, cette désignation et non une véritable élection, car il s’agit d’un choix du groupe des Etats d’Europe occidentale et autres (pays géographiquement situés en Europe et également les Etats-Unis, le Canada, la Turquie, l’Australie et la Nouvelle-Zélande….) - ratifiée, sans vote, par l’Assemblée générale, intervient seulement sept ans après la précédente élection de l’ambassadeur Gillmann, en 2005.

Mais, même dans ce groupe, d’autres Etats ont bénéficié de cet honneur encore plus souvent : l’Australie 8 fois, l’Islande 7 fois, sans parler de Chypre 15 fois…

Apparemment, tous les pays sont égaux et il y en a, qui sont manifestement plus égaux que d’autres.

De fait, depuis son admission à l’ONU en mai 1949 (après trois accords d’armistice signés en février et en avril 1949 et avant celui signé en juillet suivant avec la Syrie), Israël n’a manifestement pas été traité sur un pied d’égalité.

Il faut dire que, que, généralement – mis à part le cas des démocraties dites populaires à l’époque de la guerre froide,- l’admission d’un nouveau membre ne fait guère problème, il n’en a pas été de même pour Israël.

Rappelons que la résolution 181 recommandant le partage du territoire sous mandat britannique de la Palestine, en novembre 1947, n’avait recueilli que 33 voix pour, 13 contre et 10 abstentions.

Or, celle relative à son admission ne recueillit guère plus de suffrages : 37 pour, 12 contre et 9 abstentions.

Même jusqu’en 1967, Israël ne fut guère à l’honneur, dans l’organigramme de l’Organisation mondiale et cela fut pire après la Guerre de 6 jours, lorsque la cinquantaine de membres de l’Organisations de la Conférence islamique réussit, régulièrement à manœuvre la majorité de l’Assemblée générale avec l’appui des pays du Tiers-monde et, à l’époque, les démocraties dites populaires.

Sans doute, une très relative normalisation est intervenue depuis qu’en 2000 Israël a, enfin, été rattaché à un groupe d’Etats, intervenant dans la composition des organes de l’Organisation, en l’occurrence le groupe des Etats d’Europe occidentale et autres (28 Etats sur les 193 membres actuels de l’ONU).

Mais il reste encore beaucoup à faire pour assurer à Israël une place égale à celle des autres membres de l’ONU.

La place « particulière » d’Israël peut être envisagée tant au regard de sa place dans les organes principaux que dans les organes subsidiaires de l’ONU

Israël n’est pas « traité » comme n’importe quel Etat membre tant au regard de la composition des organes principaux que de celle des organes subsidiaires.

S’agissant des organes principaux, nous avons souligné dès notre introduction qu’Israël n’a guère siégé souvent parmi les 21 membres du Bureau de l’Assemblée générale, qui ouvrira, en septembre prochain sa 67ème session ordinaire. Or, depuis qu’en raison de l’accroissement du nombre des membres, dans les années 60, dans le sillage du mouvement de décolonisation, une rotation est intervenue entre les membres regroupés géographiquement (sauf le groupe de l’Europe occidentale et autres Etats), deux vice-présidences sont réservées à ce groupe, ce dont certains pays ont largement bénéficié.

Israël a été élu pour la première fois, en 1952, en la personne d’Abba Eban, à l’époque ambassadeur auprès de l’Organisation et ne l’a plus été jusqu’en….2005.

Certes, des Etats, comme l’Italie, la Norvège ou le Portugal n’ont été appelés à occuper une vice-présidence que 2 fois, mais ces pays ont eu l’insigne honneur de présider l’Assemblée générale (or avec 193 Etats, il n’y a place que pour un président, par session, et il n’y a eu que 67 sessions ordinaires, avec celle qui va s’ouvrir…..).

Et si la Finlande, la Suisse (membre relativement récent) et l’Irlande n’ont jamais été membres du Bureau de l’Assemblée générale, ces pays ont eu l’honneur de présider, une fois, l’Assemblée générale….

Déjà « brimé » pour la vice-présidence, Israël l’a été, également, pour une éventuelle présidence d’une des 6 commissions spécialisées, chargées de préparer les travaux des séances plénières de l’Assemblée générale.

A notre connaissance, aucun Israélien n’a été appelé à présider une telle commission.

Ce qui apparaît plus anormal, c’est le fait qu’Israël n’a jamais été appelé à siéger au Conseil de sécurité, dans lequel, mis à part les trois membres permanents (Etats-Unis, France, Royaume-Uni), qui y siègent de droit et sont membres du groupe des Etats d’Europe occidentale et autres Etats, il y a quand même 2 autres sièges, qui sont réservés à ce groupe…

Sans doute, pour désigner les membres de cet organe chargé, principalement, de veiller au maintien de la paix et la sécurité internationales, les Etats membres de l’Assemblée générale, qui procèdent, par voix d’élection ((alors que le Bureau est désigné par acclamations), doivent tenir compte de leur contribution au maintien de la paix et de la sécurité internationales.

Ce qui suppose une certaine audience sur la scène internationale que n’ont pas un certain nombre des membres du groupe (Islande, Andorre, Monaco, Liechtenstein, voire le Luxembourg). Le statut de neutralité de la Suisse l’en empêche également.

Certes 75 Etats membres (soit environ 40 % de l’effectif) n’ont jamais siégé au Conseil de sécurité, mais certains exemples choisis dans d’autres groupes montrent que la contribution au maintien de la paix n’est pas évidente : l’Egypte a siégé 5 fois, la Syrie 3 fois alors que ces pays ont été impliqués dans des guerres contre Israël, qui, lui, a subi plusieurs agressions depuis sa création.

Par ailleurs, l’Algérie et le Maroc, qui ont, pourtant, été en guerre ont déjà siégé….

Même en mettant à part le cas particulier du Conseil de sécurité, on ne peut expliquer la « discrimination », dont Israël est l’objet à l’égard d’un autre organe principal : l’ECOSOC (Conseil économique et social), dans lequel le groupe des Etats d’Europe occidentale et autres pays a droit à 13 sièges sur les 54 que cet organe compte actuellement.

Israël n’y a jamais siégé, tandis que mis à part le fait que les membres permanents du Conseil de sécurité y siègent pratiquement toujours, d’autres Etats membres de ce groupe ont exercé plusieurs mandats : Italie : 11 fois, Belgique : 9 fois, Danemark 8 fois, Espagne 6 fois.

L’Islande y a siégé à 3 reprises et même Andorre a été élue en 2001……

Le fait qu’Israël a, parfois, été membre d’organes subsidiaires dépendant de l’ECOSOC (cette année Israël siège, par exemple, à la commission de la condition de la femme) n’efface pas la pénible impression d’un certain ostracisme manifesté à l’égard d’Israël.

Ostracisme, qui se retrouve également s’agissant de la composition des organes subsidiaires, en général.

Ce sont des organes, qui ne sont pas, nécessairement, secondaires, mais qu’on appelle ainsi, parce qu’ils ne sont pas prévus dans la Charte des Nations Unies et que leur création, leur composition et leur rôle dépendent de l’un ou l’autre des organes principaux (ceux figurant dans la Charte de l’Organisation).

Or, parfois il s’agit d’organismes techniques jouant un grand rôle dans tel ou tel domaine.

Ainsi, en est-il de la Commission pour le droit international, qui joue un grand rôle dans le développement du droit international public (qui régit les rapports entre Etats). Ses membres sont choisis en raison de leurs compétences personnelles et ne représentent pas leur pays. Certes, Shabtai Rosenne, un grand juriste israélien, mort il y a près de 2 ans, n’y siégea, que pour un seul mandat (entre 1962 et 1971), alors que sa compétence a été unanimement reconnue dans tous les milieux spécialisés. Et ce n’est pas un hasard s’il dénonça le parti pris anti-israélien de certains des travaux de la Commission, au moment de quitter cet organisme.

Et il a fallu attendre 2010 pour qu’Israël soit invité à envoyer un représentant siéger dans un autre organisme technique, spécialisé dans le développement du droit commercial international (la CNUDCI - Commission pour le droit commercial international – UNCITRAL)

Pendant de nombreuses années, Israël ne siégea dans aucune commission économique régionale, une place lui ayant été refusée par les Etats arabes membres de la Commission économique pour l’Asie occidentale, dont Israël aurait du normalement faire partie, du fait de sa localisation géographique.

Finalement Israël a été admis à la Commission économique pour l’Europe (notons qu’Israël a connu un phénomène analogue à l’UNESCO).

Parmi les organes que l’on peut qualifier de techniques de l’ONU on relèvera qu’un Israélien a pu accéder, en 2001, à la présidence du Tribunal administratif des Nations Unies, chargé de régler le contentieux entre l’(Organisation et ses dizaines de milliers de fonctionnaires (Meyer Gabay y siégea 10 ans…). Mais c’est bien là une exception à la situation d’Israël, « paria » au sein de l’ONU.

Bref, au même titre qu’ « une hirondelle ne fait pas le printemps », une nouvelle vice-présidence à l’Assemblée générale des Nations Unies n’est pas la preuve qu’Israël est traité comme un Etat membre à part entière.



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