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De qui se moque-t-on ?
Par David Ruzié, professeur émérite des universités, spécialiste de droit international
Article mis en ligne le 17 octobre 2010

On peut toujours se demander si le moment était bien choisi pour relancer les constructions dans les Territoires, voire pour proposer un « échange » avec les Palestiniens entre une prolongation du moratoire de ces constructions contre la reconnaissance du caractère juif de l’Etat d’Israël.

Sur le second point, c’était donner l’occasion aux Palestiniens de reprocher aux Israéliens de poser, comme condition préalable à la poursuite des négociations, un élément de celles-ci, puisqu’à travers cette reconnaissance du caractère juif d’Israël se trouve posée la question du sort des Palestiniens, qui revendiquent un soi-disant « droit de retour » (ou plutôt le droit de s’installer de plain droit dans un pays où ils n’ont jamais vécu ni eux-mêmes, ni même, le plus souvent, leurs parents).

Mais, Mahmoud Abbas, auquel, il n’y a pas longtemps, on trouvait, dans certains milieux tellement de qualités, nous paraît faire preuve d’une parfaite mauvaise foi lorsqu’il prétend que la question posée par Benyamin Netanyahou n’a pas lieu d’être, puisque depuis les « accords » de 1993, l’OLP a reconnu l’Etat d’Israël, qui, notons-le, de son côté a reconnu la représentativité de l’OLP.

En effet, dans sa lettre de reconnaissance, Arafat a seulement admis que « l’OLP reconnaît le droit de l’Etat d’Israël à vivre en paix et dans la sécurité », encore que cela ne l’a pas empêché de tolérer, voire, soutenir, par la suite, des actions terroristes dirigées contre Israël.

Surtout il ne s’agissait que de reconnaître la légitimité du droit à l’existence d’Israël mais non de reconnaître qu’Israël correspond à l’Etat juif, visé par la résolution des Nations Unies de 1947, relative au partage du territoire sous mandat britannique, autrement dit, à l’époque, la question des soi-disant réfugiés palestiniens n’avait pas été formellement abordé.

Et il est totalement faux de soutenir que la reconnaissance d’Israël comme « l’État-nation du peuple juif » « n’a pas de rapport avec le processus de paix ».

Bien au contraire, car derrière cette question se pose précisément le droit d’Israël à s’opposer à sa délégitimation, qui découlerait d’une arrivée (puisqu’on ne peut, en effet, pas parler de « retour »)de millions d’Arabes, qui auraient, pourtant, par ailleurs, très légitimement, leur propre Etat, déjà prévu en 1947, mais rejeté par eux.

Vainement ferait-on valoir que cette reconnaissance n’a jamais été exigée lors de l’établissement de relations diplomatiques avec d’autres pays, y compris avec les États arabes signataires d’un traité de paix avec Israël (Egypte et Jordanie).

Car la situation des « représentants » du futur Etat palestinien est sans commune mesure avec celle de ces Etats, y compris s’il s’agit d’Etats arabes, car ceux-ci ne revendiquent pas le droit pour leurs citoyens de venir s’établir en Israël.

Tout aussi incongrue apparaît la contre-proposition faite par Mahmoud Abbas à l’invitation faite par le gouvernement américain de présenter la propre condition des Palestiniens, qui les a conduit à demander aux Israéliens d’indiquer quelles sont les frontières qu’ils revendiquent.

A notre connaissance, même Benyamin Netanyahou n’a jamais revendiqué le droit pour les Israéliens de fixer unilatéralement les frontières de leur Etat.

Il est évident que c’est l’un des trois problèmes essentiels, qui doivent faire l’objet de la négociation avec les Palestiniens, à côté du sort de Jérusalem et du devenir des Palestiniens, qui vivent, actuellement, dans les Territoires et surtout dans divers pays.

Pas plus qu’Israël ne pourrait imposer son propre point de vue, on ne peut lui imposer des frontières et c’est là qu’apparaît le caractère totalement irréaliste l’idée de voir les Nations Unies reconnaître un Etat palestinien, comme le bruit court que la Ligue arabe le lui demanderait dans un proche avenir.

M. Kouchner a, certes, affirmé dans une récente interview au quotidien palestinien al-Ayyam que Paris n’excluait pas un examen par le Conseil de sécurité de l’ONU de la création d’un État palestinien, en cas « d’impasse prolongée ».

Car, ainsi que nous l’avons déjà relevé, ici même, à différentes reprises, la création d’un Etat palestinien suppose la délimitation de ses frontières.

Israël a au moins des frontières fixées d’un commun accord avec l’Egypte et la Jordanie et la mer Méditerranée constitue, à l’ouest, une frontière naturelle.

Avec le Liban et la Syrie n’existe qu’une ligne de cessez-le-feu (la « Ligne verte »), la même qui prévaut actuellement avec les Palestiniens, qui succèdent, en quelque sorte aux « usurpateurs » jordaniens.

Mais cela ne signifie pas pour autant que les Nations Unies auraient le droit, en l’absence d’accord entre les Parties, de fixer les frontières respectives des deux Etats.

Vainement invoquerait-on le précédent de la résolution 181 de novembre 1947 préconisant le partage de la Palestine.

En effet, à l’époque, la puissance mandataire, la Grande-Bretagne, avait confié le soin de décider du sort du territoire, jusqu’alors possession ottomane, que lui avait confié la Société des Nations, après la première guerre mondiale.

Du fait de la disparition de la Société des Nations, l’Organisation des Nations Unies, qui, s’agissant des territoires non autonomes avait la même vocation que sa devancière, était tout naturellement désignée pour ce faire.

Et elle pouvait, à condition de respecter le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes (ce qu’elle ne fit, pourtant pas, en décidant de faire de Jérusalem une entité séparée) délimiter les frontières des deux Etats à créer.

L’organisation mondiale n’avait pas, comme c’est le cas, à l’heure actuelle à prendre en considération le point de vue d’au moins un Etat souverain, directement concerné, Israël.

Aucune souveraineté étatique n’existait, alors, pour s’opposer à l’ONU.

Il n’en est pas de même aujourd’hui et l’ONU ne pourrait pas l’ignorer.

Certes l’Assemblée générale pourrait facilement être manipulée par les Etats arabes (comme ceux-ci l’ont fait, récemment, pour écarter le Canada, jugé trop favorable à Israël, lors de l’élection au Conseil de sécurité).

Mais comme le laisser entendre le ministre français des Affaires étrangères, la question relève plutôt du Conseil de sécurité, s’agissant d’une question touchant directement la paix et la sécurité internationales.

E là pourrait jouer le veto des Etats-Unis (car il ne faut guère compter sur un autre soutien aussi affirmé de la part des quatre autres membres permanents (Grande-Bretagne – qui, notons le au passage, a, récemment, déclaré n’avoir pas de diplomates disponibles pour participer à une conférence de l’OCDE à Jérusalem – Chine, Russie et France).

Encore faudrait-il que le gouvernement israélien n’indispose pas le président Obama par des initiatives inopportunes.



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