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Un « appel » peut en cacher un autre...
Albert Capino, pour PRIMO-Europe ©
Article mis en ligne le 21 juillet 2004

« L’appel » d’Ariel Sharon aura fait couler beaucoup d’encre et suscité de nombreuses réactions.
Qu’elles soient excessives ou mesurées, elles mettent en évidence deux niveaux qui ne peuvent être considérés sur un même plan : la forme et le fond.

Les propos du Premier ministre israélien ont été sortis de leur contexte : il ne s’agissait pas d’une déclaration, comme la plupart des médias semblent le laisser entendre, mais d’une réponse à des questions émanant d’une délégation juive américaine. Elles s’inscrivent dans une perspective beaucoup plus générale, sioniste, que le Premier ministre de l’Etat hébreu n’a jamais cachée : selon lui, tous les Juifs devraient faire leur Alyah [venir s’installer en Israël].

Un sentiment sans doute exacerbé par les récents actes odieux dont ont été victimes des Juifs en France et par le malencontreux lapsus révélateur de Jacques Chirac qui, au lendemain de la fausse agression du RER, déclarait : « nos compatriotes juifs, musulmans ou d’autres, même, tout simplement parfois des Français, sont l’objet d’agressions au seul motif qu’ils n’appartiennent pas ou ne sont pas originaires de telle ou telle communauté », laissant entendre qu’il y a, d’un côté, des citoyens français et de l’autre, des citoyens qui doivent être désignés en fonction de leur appartenance communautaire ou religieuse. Comme champion de la lutte contre le communautarisme, le Chef de l’Etat français se pose là…

Cela n’a pas pour autant empêché Ariel Sharon de louer les efforts du gouvernement français pour les mesures prises à l’encontre des personnes se rendant coupables d’actes antisémites.

Nonobstant, l’Elysée et le Quai d’Orsay, vexés, réclament des « explications » et considèrent que la venue du Premier ministre israélien en France n’est « pas souhaitable ». Mais l’a-t-elle jamais été à leurs yeux ?

Étonnante attitude en effet de ceux qui fustigent le discours de celui qui « bat le rappel » d’une partie de la population, mais qui ne trouvent rien à redire - cette fois-ci aux actes, bien plus graves - d’un autre, qui commandite des meurtres ?
[Plusieurs civils, citoyens Français, ont été victimes des attentats revendiqués par des branches se réclamant du Fatah de Yasser Arafat. Des actions ont été entreprises par les familles des victimes, mais l’Elysée et le Quai d’Orsay persistent à ignorer cet aspect du Chef de l’Autorité palestinienne et lui conservent leur soutien].

Il en résulte un sentiment d’amertume de part et d’autre, des réponses du berger à la bergère, d’un côté pour mettre l’accent sur la politique arabe que mène la France depuis plus de 37 ans, d’un autre côté pour tenter de la justifier.

Quant au fond, les conséquences sont - hélas - plus dommageables. La manière « éléphant dans un magasin de porcelaine » du vainqueur de la bataille de Suez en 73 ne s’applique pas avec le même succès dans le pays du fromage. D’autant que notre Président possède un sens des « odeurs » particulièrement développé (*)...

Si l’attachement des Juifs de France à Israël, leur terre ancestrale, est fort dans son ensemble, qu’il soit culturel, historique ou religieux, leur position est plus nuancée en ce qui concerne les options politiques.

La communauté juive de France reproduit à peu de chose près, toute la diversité des opinions de la communauté nationale : Juifs de gauche, de droite, Juifs de cour, agnostiques, laïcs, communistes, abstentionnistes, anti-sionistes, pro-annexionnistes, alter-mondialistes, pacifistes, anti-militaristes, palestinolâtres, riches, pauvres, généreux, égoïstes, courageux, geignards... Faut-il s’en étonner ? Après tout, pourquoi en irait-il différemment de la communauté juive ?

Toutefois, si cette dernière choisissait de « monter » en Israël, ce serait de manière librement consentie, et non parce qu’un Premier ministre israélien a des comptes à régler avec la France, par communauté juive interposée.

Tous semblent pourtant être passés à côté de l’essentiel, trop absorbés qu’ils étaient par leurs préoccupations immédiates : le défi auquel la France devra faire face pour les années à venir est moins le communautarisme en tant que tel, ou le racisme ordinaire au sens propre du terme (dénigrer une population pour son appartenance à une ethnie). Il s’agit en fait d’une conquête beaucoup plus sournoise : l’assaut des valeurs de la République en France et de la démocratie au Proche et au Moyen Orient.

Tout racisme est condamnable mais il convient de faire une distinction entre ce danger, qui concerne tous les Français, et le racisme latent, qui n’a pas vraiment quitté l’esprit de ceux qui sont racistes par nature, que ce soit le vieil antisémitisme traditionnel qui perdure dans une certaine frange de toute société, ou celui dirigé contre les noirs ou encore les arabes.

Ce qui est nouveau, et plus préoccupant, est ce comportement pervers, parfois violent, de ceux qui, sous couvert de sentiments religieux, instrumentalisent nos lois pour tenter d’imposer des us et coutumes anti-républicains, anti-démocratiques, cette fois au détriment de l’ensemble des populations.

Autant la France peut demeurer une terre d’accueil pour ceux qui épousent les valeurs de la République, autant elle ne doit pas le devenir pour ceux qui voudraient en abuser. Et le soutien de régimes despotiques dans le cadre de sa politique arabe encourage ces abus.

À l’évidence, il s’agit d’un problème délicat. Au-delà des mesures à prendre, faut-il en parler ou pas ? Contourner les problèmes n’a jamais été une solution : cela leur fait prendre de l’ampleur. Par ailleurs, à trop en parler comme le font les médias, on nourrit la polémique... Quant à nos responsables, face à ce risque d’un changement profond, cette tentative de bouleversement dans l’équilibre national et l’harmonie inter-ethnique, ils ont eu au cours des années une attitude plutôt équivoque, lourde de conséquences.

De Gaulle avait initié une première vague d’immigration dans les années 60, Pompidou puis Giscard avaient instauré le « rapprochement familial » dans les années 70, puis ce fut la « génération Mitterrand » : les Rocard, les Mauroy, les Fabius, les Jospin, qui régularisèrent des dizaines de milliers d’illégaux.

Tous, autant qu’ils sont, ont soutenu et amplifié la politique arabe de la France, dont le facteur déclenchant fut sans aucun conteste l’embargo indigne instauré par de Gaulle contre Israël, après la guerre de 1967.

Et Jacques Chirac ...? À voir les accords inter-armées Franco-algériens et les facilités de visa dorénavant accordées directement sur le territoire algérien, les Français, Juifs ou pas, ont quelque souci à se faire sur les intentions du gouvernement de « maîtriser la vague de l’immigration ». Elle risque fort de se transformer en déferlante dans les années qui viennent. De plus, quand on connaît la pression islamiste en Algérie et l’ampleur de la répression contre les Amazighs (Berbères), on se demande bien ce qui motive l’entêtement de notre Président à entraîner la France dans cette voie…

Cerise sur le gâteau : recevant le Premier ministre turc Recep Tayyip Erdogan ce 20 juillet, en pleine période des vacances, le Président français a par ailleurs formulé, lui aussi, un appel : « l’intégration de la Turquie dans l’Union européenne était souhaitable dès qu’elle serait possible ». Qu’on soit d’accord ou pas sur le fond avec l’intégration de la Turquie à l’UE, il y a la forme : Dès que possible... N’est ce pas justement l’expression que l’Elysée prêtait à Ariel Sharon ?

Bien sûr, tous les Algériens ne sont pas des intégristes et les Turcs ne sont pas tous islamistes. Mais il est urgent d’attendre, sans quoi l’ironie de la situation pourrait bien mener la polémique actuelle à se présenter à l’avenir sous un autre angle : « Heu… dites, M’sieu Sharon, y’aurait encore de la place chez vous pour une gentille ’tite famille de ’Français de souche’ » ?


(*) Dans les années 90, Jacques Chirac avait parlé du « bruit et des odeurs » en se référant aux immigrés en ces termes :
« Comment vous voulez que le travailleur français qui travaille avec sa femme et qui ensemble gagnent environ 15000 francs qui voit sur le palier à côté de son HLM entassée une famille avec un père de famille, trois ou quatre épouses et une vingtaine de gosses et qui gagne 50 000 francs de prestation sociale sans naturellement travailler... Et si vous ajoutez à cela le bruit et les odeurs, hé bien le travailleur français sur le palier, il devient fou. Et ce n’est pas être raciste que de dire cela. Nous n’avons plus les moyens d’honorer le regroupement familial, il faut enfin ouvrir le grand débat qui s’impose dans notre pays qui est un vrai débat moral pour savoir s’il est naturel que les étrangers puissent bénéficier au même titre que les français d’une solidarité nationale puisqu’ils ne payent pas d’impôts". »



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