Bandeau
DESINFOS.COM
Slogan du site

Depuis Septembre 2000, DESINFOS.com est libre d’accès et gratuit
pour vous donner une véritable information indépendante sur Israël

Quand la Royale va faire des ronds dans l’eau
Par David Ruzié, professeur émérite des universités, spécialiste de droit international.
Article mis en ligne le 28 janvier 2009

Au cours de son point de presse du 27 janvier, le porte parole du Quai d’Orsay a été interrogé sur l’envoi d’une frégate de la marine nationale au large de Gaza. Le diplomate a répondu à son interlocuteur qu’effectivement, ainsi que cela avait été annoncé en fin de semaine dernière, la France a déployé une frégate porte-hélicoptères qui sera engagée, au large de Gaza, dans les eaux internationales (souligné par nous).

Or, en droit, effectivement, les eaux internationales – encore appelée la haute mer - sont ouvertes à la libre navigation de tous les Etats, à la différence des eaux territoriales – qui s’étendent, généralement, jusqu’à 12 milles nautiques (c’est le cas tant de l’Egypte que d’Israël - 1 mille nautique = 1 852 mètres) de la côte et sur lesquelles l’Etat riverain exerce sa souveraineté tout en étant tenu d’admettre le « libre passage inoffensif », ce qui exclut, bien évidemment, la contrebande d’armes.

Ce serait « le signe que la France s’engage concrètement en vue de la consolidation du cessez-le-feu qui passe par l’action humanitaire, par l’arrêt des trafics d’armes vers Gaza, par la réouverture des points de passage de manière durable, par la reconstruction et par la réconciliation inter-palestinienne. Ces paramètres figurent d’ailleurs dans la résolution 1860 du Conseil de sécurité ».

Certes, mais quel rapport avec l’envoi de la frégate Germinal ?

Le porte-parole a tenu à préciser qu’ « envoyant ce bâtiment de la marine nationale, il ne s’agit pas de participer en aucune manière à un blocus de Gaza mais d’améliorer les capacités de surveillance contre les trafics d’armes illicites. Cette action va de pair avec la réouverture durable, permanente, des points de passage vers Gaza qui est également notre demande ».

Seulement voilà…..

La Newsletter du CRIF du mercredi 28 croit pouvoir s’appuyer sur une information que Le Figaro de ce jour aurait publiée (mais qui ne figure pas dans la version entre nos mains…..) et d’après laquelle « l’Egypte a mis mardi 27 janvier en garde les pays européens contre l’envoi de navires dans les eaux territoriales de la bande de Gaza pour lutter contre la contrebande d’armes ».

« Nous n’envisageons pas que les pays européens puissent envoyer des navires dans les eaux territoriales palestiniennes pour mener une tâche qui est de la responsabilité d'Israël  » a déclaré le chef de la diplomatie égyptienne, Ahmed Aboul Gheit (souligné par nous).

Et le ministre égyptien d’ajouter qu’il avait pressé les pays européens de réfléchir aux conséquences d’un tel déploiement, estimant qu’il pourrait affecter « les relations entre (les pays européens) et les Palestiniens, les Arabes et les musulmans à l’avenir ».

Oui, vous avez bien lu c’est à Israël qu’il incombe de veiller à ce que les eaux territoriales de la Bande de Gaza ne soient pas utilisées à des fins de contrebande (c’est à dire de commerce illégal) militaire.

De fait, l’Allemagne, la France et le Royaume-Uni s’étaient déclarés disposés à contribuer à la lutte contre la contrebande d’armes vers la bande de Gaza, en particulier avec des moyens maritimes.

Le chef du gouvernement du mouvement islamiste Hamas, Ismaïl Haniyeh, n’a pas manqué de critiquer l’envoi de cette frégate, estimant qu’elle contribuait à « renforcer le blocus » de l’enclave palestinienne.

Il n’est pas inutile de rappeler deux incidents, qui illustrent parfaitement la situation et confirment la position égyptienne.

Le 14 janvier dernier, la marine israélienne avait, elle, empêché un navire iranien de s’approcher des côtes de Gaza, l’armée israélienne n’étant pas convaincue que le navire ne transportait que des aides humanitaires.

Et ce matin, Guysen.Israel.News a rapporté que l’armée américaine a été contrainte de laisser naviguer le navire iranien battant pavillon chypriote à bord duquel se trouve une cargaison d’armement à destination de la Bande de Gaza ».

Car, effectivement, le chef d’état-major interarmées, l’amiral Mike Mullen, a dû expliquer « qu’aucune règle de droit ne permettait à l’armée américaine de retenir le navire et de confisquer les armes ».

Car, Israël, lui, est en guerre contre le Hamas, ce qui n’est pas le cas des Etats-Unis.

Et le porte-parole du Quai d’Orsay a tort de se fonder sur la résolution du Conseil de sécurité 1860, car à la différence d’autres situations, dans lesquelles, le Conseil a, sur la base du Chapitre VII de la Charte, qui l’autorise à prendre des décisions, ayant un caractère obligatoire, la résolution 1860 n’a que la valeur d’une simple recommandation, prise sur la base du Chapitre VI de la Charte, qui prive de toute force contraignante les résolutions que se fondent sur ces dispositions.

Car la résolution du 9 janvier 2009 «  appelle les États Membres à redoubler d’efforts pour fournir des arrangements et garanties à Gaza afin de maintenir un cessez-le-feu et un calme durables, et notamment de prévenir le trafic d’armes  ».

Qu’en termes diplomatiques ces choses là sont dites…..

Certes, comme l’a dit le porte-parole du Quai d’Orsay, « il ne s’agit pas de participer en aucune manière à un blocus de Gaza » mais on ne voit même pas l’utilité « d’améliorer les capacités de surveillance contre les trafics d’armes illicites ».

Cela fait, en effet, penser à la présence inutile de la FINUL au Sud-Liban qui se borne à constater le réarmement du Hezbollah, n’ayant pas reçu l’ordre de s’y opposer….

De sorte que la frégate Germinal, échelon avancé de « la Royale » ne pourra que faire des ronds dans l’eau au large de Gaza ((comme le rappelle Wikipedia, la marine nationale française est appelée familièrement « La Royale », peut-être parce qu’avant d’être nationale elle a été royale et qu’on lui prête un attachement nostalgique à la monarchie — plus probablement parce que l’état-major de la marine est installé au 2, rue Royale à Paris).

Bref, contre vents et marées et malgré toutes les critiques systématiques dont il est l’objet, Israël est obligé de prendre des mesures, parfois au risque de provoquer des dégâts collatéraux (n’oublions pas que, souvent, à dessein, des tunnels sont creusés sous des maisons d’habitation), pour éviter que par voie maritime et/ou terrestre une contrebande d’armes se développe



Haut de page
Réalisé sous SPIP
Habillage ESCAL 4.5.87
Hébergeur : OVH