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Réfugiés : les beaux jours du syllogisme
Pierre Lefebvre & Liliane Messika © Primo
Article mis en ligne le 12 janvier 2009
dernière modification le 11 janvier 2009

Les organisations qui manifestent ces derniers jours contre l’intervention à Gaza ont une logique surprenante. Elles nous diront qu’elles ne manifestent pas pour le Hamas mais pour les Palestiniens. Seuls les imbéciles font mine de s’y laisser prendre. Certaines, un peu plus franches du collier, admettent qu’elles manifestent contre Israël et sa “politique de répression”, traitant l’Etat d’Israël de colonialiste avec toute la sémantique verbeuse héritée des autres causes défendues avec la même verve : Staline, Mao, Fidel, Pol Pot, même combat et même vocabulaire.

Elles diront devant les micros et caméras complaisamment tendus par les chaînes du service public, qu’Israël n’a rien à faire en Palestine et qu’il doit disparaître.

Disparaître ? Celles qui savent (ou estiment utile de) prendre des précautions oratoires diront, la main sur le cœur, que l’Etat hébreu doit juste revenir à ses frontières de 1967, celles que la Résolution 242 de l’ONU se proposait de modifier afin de lui permettre, comme à tous les Etats de la région, de bénéficier du “respect et reconnaissance de la souveraineté, de l’intégrité territoriale et de l’indépendance politique de chaque Etat de la région et de leur droit de vivre en paix à l’intérieur de frontières sûres et reconnues à l’abri de menaces ou d’actes de force”.

De mauvais coucheurs en concluront que vouloir le retour d’Israël aux frontières de 1967, c’est vouloir la disparition d’Israël.

Rappelons quand même que c’est, sous réserves de modifications minimes,ce qu’avait proposé l’Etat hébreu à l’époque et qu’il s’était vu refuser par les “Trois non de Khartoum”.

Ces organisations affirmeront que les réfugiés de 1948, puis de 1967, doivent pouvoir retourner sur leurs terres. Tant pis (tant mieux ?) si pour cela, il faut en chasser l’habitant historique, à savoir le peuple juif.

D’autant, et c’est une bonne façon de juger la sincérité des revendications des uns et des autres, qu’il n’existe pas un seul autre Etat au monde dont ils exigent qu’il réintègre ceux qui militent pour sa destruction au motif qu’ils ont perdu contre lui une guerre.

C’est valable pour les 9 millions d’Hindous et de Sikhs qui ont quitté le Pakistan pour l’Inde et 6,5 millions de Musulmans ont quitté l’Inde pour le Pakistan lors de la création de ce pays sur le seul critère de la religion (Tiens, c’est drôle, c’était en 1948, cherchez l’erreur).

C’est valable pour les 1 250 000 Grecs et 500 000 Turcs qui ont été réinstallés les uns chez les autres après la seconde guerre mondiale.

C’est valable, à la même époque, pour les 13 millions d’Allemands expulsés de leur patrie, en Prusse orientale, en Silésie et dans les Sudètes, lors de l’avancée des troupes russes. Pourtant on aurait pu demander pour eux le droit au retour dans la glorieuse patrie du bonheur révolutionnaire !

C’est valable pour les 9 millions de Coréens qui ont fui le régime communiste vers la Corée du Sud et que les alter-idéologues hexagonaux préfèrent oublier car ils soutenaient Kim Il Sung, ex-dirigeant de l’armée révolutionnaire populaire coréenne et secrétaire général du Parti du travail de Corée...

C’est valable pour les 900 000 Vietnamiens qui ont pris la mer pour échapper au régime communiste : l’opinion publique mondiale –dont les organisations françaises dont il est question ici- était à l’origine de leur abandon par les méchants impérialistes américains.

Bref, parvenues à ce point de l’argumentation, les organisations humanitaires veulent imposer à Israël exactement l’inverse de leurs discours sur le territoire national français.

A propos de réfugiés

Car ce sont exactement les mêmes organisations, de gauche mais aussi de droite, syndicats, associations, ONG, qui exigent de Brice Hortefeux la régularisation sans conditions des sans-papiers et leur accès à la nationalité française.

Par quel miracle de la pensée, par quel subterfuge intellectuel un réfugié palestinien, ses enfants, ses petits enfants devraient-ils conserver le statut de réfugié, 60 années après, alors qu’elles demandent, ici et maintenant, l’octroi de la nationalité française pour ceux qui entrent illégalement sur notre sol ?

Comment ces organisations résoudraient-elles leur contradiction si parmi ces sans-papiers il y avait des Palestiniens ? Devrait-on régulariser tous les autres mais renvoyer le Palestinien dans un camp de l’ONU afin qu’il puisse réclamer un droit au retour dans sa patrie “historique” ?

Un Palestinien serait condamné à rester réfugié à vie. Un Ghanéen, un Congolais, une Arménienne doivent pouvoir devenir français immédiatement.

Ces organisations réclament, à juste titre, que les sans-papiers qui ont eu un enfant en France, une scolarité, un emploi, qui résident sur le territoire depuis plus de 2 ans, puissent devenir français.

Elles exigent que les réfugiés politiques soient accueillis, soignés, pris en charge.

Pourquoi n’ont-elles pas les mêmes exigences d’accueil pour les pays arabes qui maintiennent depuis 60 ans des Palestiniens comme sans-papiers sur leur sol ?

Ces organisations ont raison : la France n’accueille pas assez. Elle ne fait pas assez droit à la misère humaine.

Il y aurait pourtant, à condition que les français soient un peu moins égoïstes, une formidable occasion d’enrichissement de notre pays si les cultures pouvaient se brasser un peu plus dans les entreprises, sur les territoires, dans les administrations.

Le dialogue social, qui ne devrait pas être du seul ressort de syndicats rassemblant à peine 8% des salariés, s’en trouverait embelli.

L’immigration est une chance pour la France. Elle aurait l’immense avantage de tordre le cou aux idées nauséabondes du Front National et de ses adeptes.

La politique répressive de Nicolas Sarkozy occasionne des dommages sans nom dans une partie de la population des sans-papiers qui ne demande qu’à être adoptés par la France, qui ne demande qu’à en adopter les règles et les bienfaits.

La gauche ne fera jamais de ce sujet un axe central de revendication. Ses échecs répétés en la matière la disqualifie comme experte sur ces questions.

Les différentes majorités se sont toutes copieusement plantées, confrontées qu’elles étaient et qu’elles sont encore à de douloureuses réalités, l’égoïsme et le repli sur soi, valeurs également partagées. Les réfugiés et immigrés ne sont pas payants, électoralement parlant.

Savoir regarder

Il n’est que de faire un tour dans les préfectures, au service des étrangers, de s’asseoir en ce lieu une petite heure, pour voir la misère humaine dans les yeux des demandeurs d’asile.

Il faut avoir organisé l’accueil d’un sans-papier et sa tournée de famille en famille afin de fuir la police pour comprendre, au détour d’une phrase, d’un regard, l’immense détresse de celui qui n’a plus rien.

Il faut avoir ravalé – parce qu’ils sont souvent inutiles - les mots de consolation, d’encouragement lorsque le sans-papiers est confronté à la brutalité administrative.

Il faut avoir tenté de dialoguer, avec un vocabulaire restreint, au détour d’une question que l’on n’ose pas poser, pour ne pas être indiscret, pour ne pas violer le seul petit jardin secret qui lui reste encore, pour mesurer l’abîme qui sépare le nanti de celui qui n’a plus rien.

Il faut avoir observé les éclairs de terreur dans les yeux des parents qui vont chercher leurs enfants à l’école et qui patientent 15 minutes, le temps que la voiture de police s’éloigne.

Il faut avoir partagé cela pour comprendre la douleur qu’il y a à ne plus avoir d’Histoire ni de valeurs auxquelles se rattacher.

Et puis y’a les autres

Les organisations Hamasophiles n’auront pas un mot, ne formuleront pas une seule critique vis-à-vis des pays arabes qui maintiennent les réfugiés palestiniens, avec la bénédiction de l’UNRWA, donc de l’ONU et de son Conseil aux droits de l’Homme, (lire l’article de Liliane Messika) dans un état de sous-hommes, de citoyens de seconde zone.

Ces organisations ne manifesteront jamais dans la rue, ne donneront aucune consigne de mobilisation pour dénoncer le sort réservé aux réfugiés palestiniens dans les pays arabes.

Elles ne dénonceront pas le massacre des Palestiniens en Syrie, en Jordanie (Septembre noir) et au Liban. La vérité oblige aussi à dire que les Palestiniens eux-mêmes ont souvent fait preuve de cruauté et de suffisance vis à vis des populations locales.

Elles organiseront à grands cris des manifestations contre la politique du gouvernement français alors qu’elles se taisent depuis tant d’années sur le sort des réfugiés palestiniens.

A l’évidence, pour ces associations, ces réseaux « solidaires », ce qui est valable pour la France ne l’est pas pour les pays arabes.

L’exemple qu’il faut ternir

Au mépris de la vérité, elles nieront à Israël le statut de pays le plus accueillant au monde. Les Falachas, les Juifs russes, français, argentins, espagnols, anglais, à la peau noire, blanche, bronzée, se retrouvent, avec il est vrai un bonheur inégal, citoyens d’un même pays. (lire Israël, démocratie perfectible, par Claude Klein)

Les Arabes israéliens ont une totale liberté d’expression, bien plus que dans les pays environnants. Les femmes ont le droit de vote, elles ne sont plus soumises qu’aux règles de l’Etat hébreu où les citoyens sont égaux, même les Arabes, mêmes les citoyennes, même les citoyennes arabes.

Si cette égalité est à parfaire, elle est néanmoins bien supérieure à ce que propose la République française, et a fortiori, à ce que proposent les pays arabes à leurs populations immigrées et aux réfugiés palestiniens.

Ne parlons pas de l’esclavage moderne au Liban, en Syrie en Arabie Saoudite où des femmes philippines, indonésiennes, thaïlandaises sont rouées de coup, exploitées, privées de liberté et de passeport, voire assassinées par de riches familles qui se morfondront en gémissements par habitude et par haine des Juifs, sur le sort des Palestiniens.

Mais pas question pour ces familles d’accorder à ces mêmes Palestiniens les avantages dont elles bénéficient.

Là réside le véritable racisme, celui qui maintient dans la précarité des centaines de milliers de familles. Dominique Vidal et Alain Gresh, qui n’ont de cesse de dénoncer le racisme de Primo dans les colonnes du Monde Diplomatique, n’ont pas la faculté de réfléchir sans à-prioris à tout cela.

Bien évidemment, le tableau n’est pas rose.

Les autorités libanaises, par exemple, diront que ce sont les Palestiniens qui refusent d’être agrégés à la communauté nationale.

Elles ont raison, mais on ne peut pas dire qu’elles aient accompli des efforts surhumains pour les accueillir ailleurs que dans des camps, qu’elles peuvent bombarder le cas échéant, (Narh el Bared en 2008) sans émouvoir la communauté internationale, sans provoquer des défilés aux cris de « Allah ou Akbar » entre République et Nation.

Bien entendu, on sait peu que les adolescents palestiniens qui désirent s’intégrer dans les pays arabes sont à la fois rejetés par les puissantes organisations de « libération », par leurs familles et par le pays « d’accueil » lui-même.

La tentation est grande alors de rejeter la faute sur, à leurs yeux, le coupable idéal, fantasmé, responsable de tous les maux.

Lorsque ces associations, idéologiquement unies par la seule détestation d’Israël, voudront bien renoncer à leur syllogisme, la paix sociale aura peut-être une chance de s’installer en France.

Les agressions racistes et antisémites trouveront alors un peu moins de justification.

Malheureusement, au vu de la malhonnêteté intellectuelle qui sévit ces derniers jours, il n’est pas raisonnable de mettre trop d’espoir dans cette éventualité.

Alors donc, que tout le monde manifeste, mais en criant un peu moins fort. La décence et l’honnêteté intellectuelle l’exigent.



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