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Parlons avec le Hamas
Albert Capino
Article mis en ligne le 10 décembre 2008

Yves Aubin de la Messuzière n’en est pas à sa première tentative. Après un entretien accordé à Georges Malbrunot dans le Figaro le 19 mai dernier, le voici qui récidive dans les colonnes du Monde daté d’aujourd’hui Cet ancien directeur Afrique du Nord-Moyen Orient au Quai d’Orsay tente de nous y expliquer « pourquoi l’Europe doit parler au Hamas ».

Pourquoi en effet ?

Le mouvement islamiste aurait-il décidé d’adhérer aux trois principes exigés par l’Europe pour entamer un dialogue, à savoir : renoncement à la violence, respect des accords passés entre Israël et l’OLP, reconnaissance de l’Etat d’Israël ?

Non. Et selon M. de la Messuzière, insister sur ces conditions serait un « dogme qui ferme toute perspective ».

Plus loin, l’auteur admet lui-même que la charte du Hamas « contient des références antisémites sur le thème de la conspiration globale qui aurait permis la création de l’Etat hébreu ».

À partir de ce moment, comment peut-il encore envisager un dialogue entre une organisation et un Etat dont elle nie les fondements ?

Je ne dois pas porter la même marque de lunettes que M. de la Messuzière, car je ne parviens pas à distinguer les « évolutions significatives du Hamas sur le plan idéologique ».

Peut-être est-ce par ce qu’elles ont lieu « en interne », pour « ménager les radicaux dont l’influence grandit »… Lesquels ? Ceux qui tirent quotidiennement des roquettes et obus de mortier sur les populations civiles de Sdérot, du Néguev, d’Ashdod et qui menacent maintenant la ville d’Ashkelon ?

« Une rupture de la trêve serait dramatique » : doit on lire par là « une riposte de l’Etat d’Israël », dont les populations civiles sont sous le feu depuis tant d’années ?

C’est vraisemblablement une interprétation partagée par des proches collaborateurs d’Obama comme Brzezinski et Scowcroft. Ils veulent faire un forcing visant à obtenir des concessions de la part d’Israël, avant que les élections de février prochain ne viennent « compliquer la situation » (entendez sans Olmert).
Selon eux, les Israéliens ont là « une occasion à saisir ». Après, il serait trop tard… Pour empêcher Israël de mener une action contre l’Iran des Mollahs (qui doivent une bonne partie de leur pouvoir à l’influence de M. Brzezinski sous la présidence Carter) ? Pour démilitariser le Hezbollah ? Pour briser l’axe Téhéran-Beyrouth-Damas-Gaza ?

« Le mouvement islamiste, durablement présent, politiquement et socialement dans les territoires, sera partenaire du processus de paix. » : j’y oppose un démenti catégorique. La Mafia est durablement présente en Italie, économiquement, politiquement et socialement parlant. Elle représente un chiffre d’affaires de 150 milliards d’Euros par an. Elle donne du travail à une bonne partie du Sud de l’Italie et sa présence dans des affaires légales lui donne un levier sur la politique du pays. Est-ce pour autant qu’il faille envisager de la considérer comme un interlocuteur acceptable ?

A l’intérieur des territoires qu’il contrôle, le Hamas a des pratiques mafieuses, sexistes, confiscatoires, et réserve les biens et les services destinés à tous à la seule disposition de ses membres, en dehors d’une part symbolique pour lui servir de « vitrine sociale ». Les Palestiniens de Gaza qui ne font pas partie du Hamas n’ont pas été autorisés à effectuer le pèlerinage à la Mecque. Voilà pour la gouvernance d’un « parti élu démocratiquement ».

Par ailleurs, accepter de dialoguer avec le Hamas donnerait non seulement une prime à la terreur, mais fragiliserait encore plus l’autorité d’un Mahmoud Abbas ayant peine à s’imposer. À l’inverse de M. de la Messuzière, je suis de l’opinion que cela conforterait l’émergence de deux entités palestiniennes, ce que veut justement éviter le processus de paix.

Au moment où l’Europe envisage « une ouverture envers les talibans afghans » ce serait une erreur d’exclure un mouvement [le Hamas] en « totale opposition avec Al-Qaïda » ajoute M. de la Messuzière.

Eh bien non. L’Europe ne doit pas établir une échelle de l’horreur et entamer un dialogue avec les plus présentables. On ne négocie pas avec la terreur, on ne tergiverse pas avec les libertés. Des régimes qui piétinent toutes les valeurs qui constituent notre civilisation doivent être ostracisés.

Malgré tout ce qu’il subit de la part des mouvements radicaux qui souhaitent sa destruction, malgré l’opprobre internationale, les condamnations de l’ONU : Israël est le seul pays au monde qui continue à laisser passer des fonds (100 millions de Shekels aujourd’hui), des convois alimentaires, de médicaments et de fournitures énergétiques vers un voisin qui bombarde ses civils et ses installations électriques.

Il persiste en outre à maintenir un contact par la médiation de l’Egypte, en vue de la libération de Guilad Shalit, enlevé et maintenu en détention au mépris de toutes les conventions internationales.

Alors de grâce, M. de la Messuzière, allez dialoguer avec les talibans si ça vous chante, accumulez des miles dans vos navettes entre Damas, Beyrouth et Gaza, mais laissez aux intéressés le soin de contenir les dégâts d’une propagande néfaste et décider de leur sort. Être persuadé qu’on peut amadouer des fauves par le dialogue n’a jamais constitué une preuve d’intelligence.



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