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Une explication… 1ère partie
Par Stéphane Juffa © Metula News Agency
Article mis en ligne le 18 août 2004

Pour beaucoup de personnes équilibrées, l’opposition politique acharnée àIsraë l et l’expression qu’elle trouve dans la plus grande partie des médias francophones n’ont qu’une seule explication : L’antisémitisme.

Lorsque l’on constate, en effet, non plus seulement les prises de positions extrêmes dans la presse française mais carrément des mises en scène préméditées d’informations erronées, dans les seuls buts de porter atteinte àl’Etat hébreu et d’alimenter la sympathie du public pour les Palestiniens, c’est un sentiment qui peut légitimement se dégager.

Comment, dans un même souffle, les gens de l’Obs, par exemple, après avoir imputé des crimes de miliciens palestiniens contre d’autres Palestiniens àl’armée israélienne, peuvent-ils encore soutenir « qu’ils expriment une critique àl’égard d’Israë l et qu’ils ne sont en aucun cas antijuifs » ? Comment se fait-il que l’on retrouve la même réaction de pucelles outragées, lorsque les fabricants de la culture anti-israélienne sont pris la main dans le même sac, que ce soit sur les chaînes télévisées, au Monde et au Diplo, bien sà»r, àLibé, dans les dépêches de l’AFP mais aussi, de façon certes moins systématique, sous la plume de certains auteurs du Figaro et même de l’Express ?

La manière paresseuse de répondre àces questions consiste àinvoquer soit un antijuivisme caractérisé de toute l’intelligentsia française - ce qui constitue une hypothèse hasardeuse, il faut bien l’avouer - soit ày voir l’existence d’un complot médiatique, dans lequel les conjurés seraient dirigés par une main organisatrice, ce qui n’est pas beaucoup plus plausible. Ca n’est pas seulement qu’il faudrait expliquer comment autant de personnes, intelligentes au demeurant (ou par hypothèse), aux sensibilités et aux intérêts différents, accepteraient de se liguer afin de coordonner la désinformation contre Israë l. C’est également que ces personnes prendraient le risque énorme d’être tôt ou tard dévoilées et qu’elles s’exposeraient ainsi àla vindicte d’autres intellectuels et àcelle de l’Histoire. Tremper dans un complot organisé contre des juifs n’est toujours pas un acte pardonnable dans la France d’aujourd’hui. Ceux que nous avons appelés les « fumiers » ou les « répètent merdes », s’ils sont disposés àinventer des complots extraordinaires du Mossad et même àaffirmer qu’il y a, dans la conduite du peuple d’Israë l, une propension àprendre du plaisir àhumilier, ne sont pas prêts àparticiper àune action coordonnée dont le but stratégique serait le dénigrement d’Israë l.

Et puis, il suffit de songer àla structure gigantesque que la coordination d’un complot de ce genre exigerait et aux risques d’indiscrétions parmi une masse aussi nombreuse de journalistes. Non, nul doute que si une conjuration de ce type existait, cela ferait longtemps que la Ména vous en aurait livré les structures ainsi que le nom des participants.

Certes, je ne prétends pas qu’il n’existe pas des aires de rencontres pour les propagandistes de l’anti-Israë l, je pense particulièrement aux signataires du manifeste, dit « pétition pour le droit de critiquer la politique du gouvernement israélien » ou àceux des premières pétitions d’Olivia Zémor, qui comptaient dans leurs rangs nombre de barons de la presse parisienne, comme Edwy Plenel et Jean Daniel. Je ne dis pas que Jacques Chirac ne donne pas le ton, la licence et le passe-droit, a priori, par communiqués des Affaires Etrangères interposés, l’AFP et les chaînes publiques de radio et de télévision de critiquer Israë l au-delàde toute mesure. Je n’affirme pas non plus que ce nouvel épisode de la peste antijuive en France ne procure pas d’érections malsaines dans les pantalons des antisémites primaires et traditionnels, qu’ils soient d’ailleurs de droite comme de gauche.

Ce que j’affirme, cependant, c’est que ces manifestations sont en fait des sous-ensembles d’une théorie directive extérieure, qui ne vient ni de la maison Chirac ni du Monde mais qui crée un lien solide entre eux. Il s’agit de fait d’une théorie politique profonde et puissante, au point de me persuader qu’elle éblouit la majorité des désinformateurs anti-israéliens, jusqu’àles convaincre honnêtement que ce sont eux qui suivent les chenaux du bien et de la conscience. Au point, aussi, (c’est ainsi que cela fonctionne psychologiquement) que cette certitude politique « d’agir pour le bien des hommes et dans le sens de l’Histoire », les fait subordonner ce qu’ils considèrent toujours être des erreurs techniques, faites de bonne foi, àl’accompagnement de l’essentiel, dont ils se considèrent les dépositaires intellectuels et moraux.

Le syndrome des guillemets de Jean Daniel est tout àfait symptomatique àcet égard : Bravant le danger qu’il y a àproposer une explication incroyable au brà»lot de haine concocté par sa fille àpropos des « meurtres sexuels » organisés par Tsahal, le patron de l’Obs a préféré se perdre corps et biens dans une explication technique sans issue, que d’envisager qu’il existât chez lui une erreur d’approche fondamentale.

Pour rejoindre ce club des metteurs en scène de la vérité sur Israë l, il existe deux conditions d’entrée. Une fois ces formalités intellectuelles remplies, la simple adhésion àcette théorie politique vous rend ignifuge, en principe et pour autant que cette théorie soit correcte et concordante avec les termes du conflit israélo-palestinien, contre toute accusation d’antisémitisme et vous met hors de portée des critiques de la raison pure.

Pour se draper de cette invisibilité qui rend insaisissable et obligatoirement juste, il suffit d’adhérer aux thèses des existentialistes sur la décolonisation et d’accepter de se persuader qu’Israë l est une colonie. Vous allez d’ailleurs rapidement comprendre l’importance de la conservation, àtous prix, de la sémantique insidieuse de l’AFP pour relater notre guerre. L’enjeu est colossal, comme il n’y paraît pas ; il s’agit de maintenir la dialectique du conflit israélo-palestinien dans le strict cadre d’une rébellion contre la colonisation. Si les colonies devenaient des implantations, les activistes et les militants, des criminels de guerre, les mouvements radicaux, des organisations terroristes, l’AFP sortirait de la dialectique anti-colonialiste et, dans sont giron, les légions de répètent-merdes, qui répandent ensuite la « juste parole » aux quatre coins de l’Hexagone et même un peu au-delà.

Avant de se poser, ànouveau, la question de savoir si Israë l est une colonie et donc, s’il s’agit effectivement d’un conflit colonial, je propose de laisser cette interrogation de côté, pour comprendre librement les hypothèses posées par les théoriciens de la décolonisation et pour saisir complètement l’étendue, la force et la perduration de leurs postulats. Dans le vaste choix de ces théoriciens, j’ai choisi Frantz Fanon. J’ai fait ce choix pour l’authenticité du personnage, pour son intelligence indiscutable, pour l’inspiration qu’il a éveillée chez de grands philosophes, chez Sartre surtout, et qui a fini par transformer les thèses de ce psychiatre martiniquais en paroles d’évangiles. J’ai aussi choisi Fanon pour la non compromission de son discours, qui le rend clair et analysable ainsi que, parce qu’il devint l’une des figures de proue de la lutte pour la libération nationale algérienne. Parce que je suis persuadé que la plupart des intellectuels français considèrent le conflit israélo-palestinien comme la suite de leur guerre d’Algérie et qu’ils se montrent, pour le moment, incapables de discerner les divergences cruciales existant entre les deux conflits, autant qu’ils sont incapables d’imaginer que les Israéliens puissent s’occuper des Arabes d’une manière différente de la leur.

A suivre…