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Réacs de tous les pays, unissez vous !
Jacques Tarnero © Primo Europe
Article mis en ligne le 13 décembre 2005
dernière modification le 14 décembre 2005

Il n’y a pas de pire insulte politique en France. Être traité de « réac » c’est bien pire que pédophile ou bachi-bouzouk. Dans la République des lettres, le « réac » et à plus forte raison le « nouveau réac » c’est un Jean Cau relooké, un Michel Droit qui ne comprend rien à l’art moderne, une sorte de Pauwels rajeuni.

L’arbitre des élégances intellectuelles françaises, l’ordonnateur du who’s who du progressisme, le Nouvel Observateur, celui qui nous dit où est le bien et où est le mal, où est le chic et où est le ringard, fait sa couverture sur « les nouveaux réacs », avec, massivement déployé, le front bas d’Alain Finkielkraut. Honte sur lui !

Les choses se sont tellement focalisées sur l’auteur de la « défaite de la pensée » que c’est d’abord à son égard et pour exprimer notre amitié intellectuelle et politique que ce qui suit a été écrit.

De quelle vertu politique et morale ceux qui traitent Alain Finkielkraut de « réac » se prévalent ils ? D’abord une question de méthode. Fort d’une posture « progressiste » autoproclamée, ceux qui haïssent Finkielkraut ont trouvé une double occasion inespérée : démoniser leur ennemi et ainsi se refaire une vertu « progressiste » à peu de frais.

Les petits arrangements du progressisme

Depuis tant d’années que cet imprécateur insupporte à pourfendre les impostures intellectuelles, les mensonges, les illusions, à ironiser sur les modes, sur la pensée convenue, depuis qu’il s’acharne à traquer les petits arrangements du « progressisme » avec l’histoire, avec les jeux du pouvoir ou encore l’imposture « progressiste » de certains grands leaders du Tiers monde, à ouvrir les yeux de ceux qui ne voulaient pas voir qu’une haine des juifs pût être de « gauche » ou qu’elle fut produite, comme à Durban, justement au nom de l’antiracisme et des droits de l’homme ...

Depuis le temps qu’il défend le droit d’Israël à être, contre ceux qui préfèreraient sa disparition, depuis le temps qu’il défend symétriquement les droits de Palestiniens à un État, depuis le temps qu’il s’échine à réveiller la tranquillité de ceux qui font de la sociologie du chaos, l’alibi d’une non dénonciation de ses causes, oui cet homme là exaspère. Son brio intellectuel, son écriture ciselée insupportent les jaloux.

Quel crime intellectuel a-t-il récemment commis pour être traité, horreur suprême, de « raciste ». Comme l’a écrit avec une délicate prévention le journaliste de Haaretz, « ça n’est pas Le Pen qui parle mais Finkielkraut ». Aubaine inespérée pour Le Monde, le « journal de référence », qui se met dans l’abri israélien pour régler de vieux comptes. Quoi de plus détestable que de reconstruire un texte.

Pour le reste, qu’est ce qui est faux dans ce qu’il a dit ?

Où est le jugement intolérable pour des oreilles progressistes ? Les émeutes en banlieue n’auraient pas uniquement des causes sociales et la dramatique ghettoïsation des « quartiers » fait qu’une culture du ressentiment anti français est désormais le lien entre les incendiaires, où est l’erreur ?

Le fait que ce ressentiment soit massivement le fait de jeunes beurs ou de jeunes Noirs, où est l’erreur ?

Préférer le refus des divers euphémismes pour ne pas nommer ce qui est, où est le tort ?

Dire « Noir » ou « Arabe » plutôt que « jeune des banlieues », où est le crime anti républicain ?

Si l’intention universaliste se transforme en culture de l’évitement, alors c’est que quelque chose ne va pas de son côté. Préférer les ombres du réel à la réalité, pour qu’elles soient conformes aux présupposés idéologiques est une politique d’aveugle.

Les progressistes préfèrent se voiler la face pour ne pas affronter le voile islamique et font de Tariq Ramadan un nouveau Che Guevara. Quelle belle lucidité politique ! Belle solidarité avec les algériens victimes de l’intégrisme des divers GIA, FIS et autres !

« Qui tue qui ? » demandaient déjà ceux qui ne voulaient pas penser les massacres en Algérie. « Qui brûle qui ? » pourrait on demander en France aujourd’hui. Qui a brûlé Sohane, il y a quelques années, qui a brûlé Shérazade hier ?

Pourquoi avoir peur de dénoncer cette bouillie mentale qui tient lieu chez certains « jeunes des banlieues » de conscience identitaire. N’importe quel enseignant vous le dira. Il y a péril au sein de l’école quand des futurs barbus brutalisent les filles au nom de ce qu’ils estiment être un code d’honneur.

Et il faudrait ne pas nommer cela au nom du respect du à une culture différente ? Faut-il s’extasier devant les beautés musicales sexistes et antisémites de certains raps ? La fascination gauchiste pour la radicalité rend le progressisme imbécile : entre Luther King et Lewis Farrakhan, qui a fait avancer l’histoire ?

Si le solde des luttes des Noirs américains se nomme « Nation of Islam », où est le progrès ?

Si le leader politique des banlieues venait à être Dieudonné, les progressistes en seront ils satisfaits ? Ce sous-Le Pen noir excite les pires démons des banlieues. Il y a deux ans, une vague de haine antijuive avait déjà servi d’annonce à ce qui vient de se produire.

Il y a du malheur dans les banlieues, il y a de la souffrance sociale. Il y a dans les Antilles une mémoire blessée, il y a un traitement de la mémoire de l’esclavage qui n’a pas encore été mené à bien.

Bien sûr, l’Europe au XIXeme siècle a fondé sa prospérité sur la colonisation menée depuis trois siècles. Bien sûr que l’idéologie des colonisateurs était simultanément raciste tout en s’affirmant civilisatrice.

La laïcité dont on célèbre le centenaire mariait dans les colonies les considérations d’un Jules Ferry sur l’infériorité raciale des Noirs et l’idéal des Lumières.

Mais on ne répare pas ces fautes historiques en trafiquant la vérité historique.

L’affaire Finkielkraut a son symétrique détestable. Un historien reconnu, Olivier Petre-Grenouillau a publié chez Gallimard une étude savante sur les « traites négrières », toutes les traites négrières, non seulement celles commises par les Européens, mais aussi celles commises par les Arabes et celles commises par les Africains eux-mêmes quand les royaumes côtiers noirs vendaient aux négriers européens d’autres Africains qu’ils avaient capturés dans des razzias à l’intérieur des terres.

La qualité de ce travail d’historien a été pleinement reconnue par ses pairs, par les plus prestigieux des historiens français. Mais voilà que Petre-Grenouillau n’est pas, pour certains, politiquement correct. Voilà que certaines associations antillaises, certains « indigènes de la République » veulent lui faire procès pour révisionnisme.

Il a osé dire ce qu’il ne fallait pas dire. Il a osé mettre en cause une responsabilité arabe. Il a osé mettre en cause une responsabilité africaine. Aucun historien sérieux ne peut contester ces faits historiques sauf certains de ceux qui aujourd’hui s’affirment être les héritiers de la mémoire de l’esclavage.

Mais la bêtise ne s’arrête pas là.

Voilà que c’est le délire qui gagne. Voilà qu’il ne faudrait pas célébrer le bicentenaire de la victoire Napoléonienne d’Austerlitz, le 2 décembre 1805, contre la coalition des monarchies conservatrices européennes, sous prétexte que Napoléon fut coupable de la réintroduction de l’esclavage, alors que la Convention l’avait abrogé.

Voilà le crime de l’Occident. Le Code civil comme fondation de Mein Kampf ! Quelle intelligence des choses ! Comme si on ne savait pas que l’histoire est contradictoire ! Comme si celle de la France n’avait pas ses zones de lumières et ses parts d’ombres !

Il y a de la folie mémorielle dans ces exigences.

Il y a de la folie dans cette « concurrence des victimes ». « Il y en aurait que pour les juifs » entend on dans certains cours d’histoire. « Et les massacres de Sétif », le 8 mai 1945, le jour même de la capitulation nazie. Était-ce un crime contre l’humanité commis par la France du général De Gaulle ? De quel ordre autre que symbolique pourrait survenir une réparation ?

C’est une évidence qu’il n’appartient pas à la loi de décider des contenus de l’Histoire.

Les consciences nationales portées par les États sont lentes à se mettre en cause car c’est l’Histoire du monde qu’il faudrait traduire devant les tribunaux. À quand la reconnaissance par l’Algérie des crimes commis contre les Harkis, des crimes commis par le FLN ?

Et comment réparer des blessures symboliques sinon par d’autres réparations symboliques, par le travail des historiens, par des créations de musées disant ce qui a été et sûrement pas par des lois qui s’y substitueraient ?

On ne règlera pas les injustices sociales en désignant à la vindicte populaire un bouc émissaire à haïr. Ces blessures ne se cicatriseront pas en préférant à l’examen critique des causes historiques d’autres plus faciles à nommer et à désigner.

Ce serait un grand malheur pour tous si, dans les banlieues de l’esprit, on faisait de la désignation du « réac » la raison de son impuissance à avoir changé le monde en un monde meilleur.

On comprend mieux le décalage qu’il y a entre la France et le reste de l’Occident.

Au fond ici, aucune leçon de l’Histoire n’a été tirée. La chute du mur de Berlin, la fin des mythes nés du communisme n’ont servi à rien car c’est le simplisme de la pensée totalitaire qui dévore toujours ceux-là mêmes qui estiment être porteurs de clairvoyance.

L’hallali sonné contre Alain Finkielkraut dit autre chose qu’une critique. C’est une vieille haine qui pointe son nez. Mettre les propos d’Alain Finkielkraut sur le même plan que ceux de Dieudonné est une indignité intellectuelle.

Christiane Taubira puis Pierre Vidal Naquet, Esther Benbassa, Michel Wieviorka et les autres signataires du texte consacré aux « démons français » publié dans le Monde du 6 décembre ne peuvent pas faire cet amalgame ou alors ces fins lecteurs ne savent plus lire ni analyser.

Écrire : « le pire des cauchemars serait celui d’un débat public où ne s’échangeraient plus que des arguments à la Dieudonné ou à la Finkielkraut, recourant aux mêmes procédés - falsifications, dénégations, occultations - et se nourrissant intellectuellement » relève de la calomnie.

Quelle leçon pouvons nous tirer de cette histoire ? Elle rappelle le sort de celui qui se fit traiter de « chien réactionnaire » par les staliniens. Arthur Koestler avait tenté de nommer avant l’heure la grande imposture du « progressisme ».

A l’évidence, Staline n’est pas mort.

Il est bien présent en France dans la tête de certains intellectuels. C’est la même mécanique qui ne voulait pas entendre ce que Kravtchenko rapportait d’Union Soviétique. Celle qui condamnait Camus pour ses propos nuancés sur la guerre d’Algérie est identique à celle qui fait de Finkielkraut, un « nouveau réactionnaire ».

Si les progressistes refusent de penser l’histoire contemporaine en termes « choc des civilisations », s’ils veulent en faire l’économie, alors ils doivent avoir le courage de penser ce qui peut y conduire.

Ce courage, Alain Finkielkraut, le « réac », le possède.

Jacques Tarnero © Primo Europe

Chronique en partie diffusée sur RCJ



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