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Le vrai sens des mots
par David Ruzié, professeur émérite des universités, spécialiste de droit international
Article mis en ligne le 29 juin 2008

Il est encore temps de revenir sur le procès d’intention fait au président Sarkozy, à propos de certaines formules qu’il a employées, tant durant sa campagne électorale que, plus récemment, au cours de son voyage en Israël.

En mars 2007, dans un discours prononcé à Caen, le candidat à la présidence de la République déclarait, effectivement, que « la repentance est un mode exécrable », parce qu’il n’acceptait pas que « l’on demande aux fils d’expier les fautes des pères, surtout quand ils ne les ont pas commises ».

Mais, il ajoutait, tout aussitôt, qu’il voulait que « le racisme et l’antisémitisme soient poursuivis et condamnés avec la plus grande sévérité » tout en ne voulant pas que « l’on dise que tous les Français sont racistes ou antisémites, parce que c’est faux ».

Or, à l’époque, certains n’avaient pas manqué de considérer que cette prise de position contre le « mode de la repentance » revenait à remettre en question les déclarations faites par Jacques Chirac, lors de la commémoration de la Rafle du Vel d’hiv, le 16 juillet 1995.

Mais, il n’en était rien.

Dans un admirable discours prononcé, lors de la commémoration de la Rafle du 16 juillet 1942, le Président de la République d’alors avait eu le courage, qui avait manqué à ses prédécesseurs depuis la Libération, de reconnaître la responsabilité de la France dans cette action ignoble et d’une manière plus générale dans la persécution des Juifs durant la Seconde guerre mondiale.

Tout en soulignant le fait que la France « n’est nullement un pays antisémite », Jacques Chirac reconnaissait solennellement que ce jour là la France « accomplissait l’irréparable » et avait à l’égard des 76 000 déportés juifs de France une « dette imprescriptible ».

Comme Nicolas Sarkozy l’a fait plus récemment, le Président de l’époque considérait qu’ « une certaine idée de la France, droite, généreuse, fidèle à ses tradition, à son génie » « n’a jamais été à Vichy », mais qu’elle était « dans les sables libyens et partout où se battent des Français libres....à Londres, incarnée par le Général de Gaulle ». Qu’elle était « présente.....dans le cœur de ces Français, ces Justes parmi les Nations » qui ont sauvé au péril de leur vie les trois-quarts de la communauté juive résidant en France.

Tout cela n’excusait en rien « les erreurs commises...les fautes.....une faute collective ».

Comme nous l’avons déjà évoqué, par ailleurs, au regard du droit international, la France a subsisté, du fait du principe de la continuité de l’Etat. Et, malgré une rivalité entre la France Libre et la France collaborationniste, le gouvernement de Pétain a bel et bien engagé la responsabilité de la France, car c’est lui qui a effectivement exercé le pouvoir sur le territoire national métropolitain.

Et, récemment, commémorant le 8 mai dernier, l’armistice de 1945, l’actuel Président ne s’est en rien désolidarisé de son prédécesseur, en considérant que « la vraie France, elle n’était pas dans la milice, la vraie France, elle n’était pas à Vichy, elle n’était pas dans la collaboration », mais « avait la voix du général de Gaulle » et le « visage » des résistants.

Car, Nicolas Sarkozy, comme Jacques Chirac, n’en rappelait pas moins qu’ « aucune faute, aucun crime ne doit être oublié »......

Bien que n’ayant aucune qualité pour interpréter la pensée du candidat Sarkozy, on peut penser que la « charge » qu’il a faite, pendant sa campagne électorale, était dictée par le souci d’éviter une certaine dérive. Après la reconnaissance - enfin - de la responsabilité de la France dans les persécutions antisémites, on était passé à la qualification de l’esclavage comme crime contre l’humanité et l’Algérie exigeait une repentance pour la colonisation de l’autre côté de la Méditerranée.

Ici, encore, comme en matière de génocide, on assiste à une tendance à vouloir assimiler des situations qui ne sont pas semblables.

Ainsi, nous pensons, que s’agissant de la responsabilité de la France à l’égard des persécutions antisémites - et d’une manière plus générale s’agissant de l’attitude à l’égard de la communauté juive de France - il n’y a aucune différence d’attitude entre l’actuel Président et son prédécesseur.

En revanche, comme nous l’avons souligné à plusieurs reprises, ici-même, Jacques Chirac a toujours eu une attitude partiale dans le conflit du Moyen-Orient et, à la différence de Nicolas Sarkozy, n’a jamais témoigné d’une empathie pour l’Etat d’Israël.

Ceci dit, les magnifiques paroles élogieuses prononcées, lors de son voyage en Israël, n’ont pas empêché l’actuel président de la République de faire connaître sa vision des bases des futures négociations.

Or, de façon curieuse, il lui a été moins reproché de remettre en cause la colonisation et d’évoquer le statut de Jérusalem, comme capitale, de deux Etats - ce qui correspond à l’attitude traditionnelle de la politique française - que ce qu’il a pu dire (car nous n’avons pas trouvé de trace officielle écrite) sur la question des frontières.

D’après ce que la presse en a rapporté, Nicolas Sarkozy a évoqué une « frontière négociée sur la base de la ligne de 1967 et des échanges de territoires, qui permettraient de construire deux Etats viables » (souligné par nous).

Il n’est pas question, à la différence de ce que Jacques Chirac avait affirmé, de considérer la Ligne verte comme devant définir la frontière d’Israël.

L’idée d’une négociation à partir de la prise en compte de cette Ligne (il faut bien un point de départ pour la négociation) nous paraît avoir été admise par les gouvernements israéliens successifs, de même que la possibilité de procéder à des échanges de territoires.

Certes, la poursuite de constructions à la périphérie de Jérusalem risque, effectivement, de mettre en question la viabilité du futur Etat palestinien, qui devra bien être dotée d’une capitale, ayant une certaine résonance.

Mais, ceci est une autre histoire.

Pour conclure, nous voudrions relever, à propos de la question des réfugiés palestiniens, que Nicolas Sarkozy n’a pas reconnu un droit de retour physique. Il a tenu à préciser que ce problème devait être résolu « dans le respect de l’identité d’Israël », ce qui précisément exclut un droit de retour physique. Là encore, cette façon de voir ne contredit pas les thèses israéliennes.



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