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Tous les périls, plus la trahison perverse
par Ilan Greilsammer - professeur de science politique à l’université Bar-Ilan de Tel-Aviv.
Article mis en ligne le 11 septembre 2003
dernière modification le 3 octobre 2003

De façon insidieuse et déroutante, nous assistons à un phénomène pervers à propos duquel je voudrais tirer la sonnette d’alarme.

Ce phénomène date en fait du début de la seconde Intifada, et il prend une ampleur croissante. Voici que, de plus en plus, dans divers cercles intellectuels et universitaires de gauche, surtout en France, on commence à évoquer l’idée d’« un seul Etat » à la place de deux Etats vivant côte à côte, l’un juif, l’autre palestinien.

De plus en plus, je lis sans y croire, sous la plume de personnes « sérieuses » qui soutenaient autrefois la gauche sioniste israélienne, l’idée que, finalement, après tout et tout compte fait, la création de l’Etat d’Israël en 1948 était une erreur, et qu’il faudrait en revenir aux solutions préconisées dans les années 1920 et 1930 d’un seul Etat arabe à minorité juive entre la mer et le Jourdain...

Dire que l’Etat d’Israël n’a pas de raison d’exister, que cette expérience devrait prendre fin n’est plus une parole bannie, c’est quelque chose que l’on ose dire entre personnes de bonne compagnie, comme on ose dire d’autres choses, sur les juifs en particulier.

Cette « nouvelle » attitude des milieux bien-pensants constitue le retour, par la petite porte, de l’équation tristement connue « sionisme = racisme », que l’on croyait à tort jetée dans les poubelles de l’Histoire.

Car ce n’est plus la colonisation des territoires occupés, la violence des colons, les liquidations de dirigeants palestiniens, l’attitude de Tsahal ou la politique exécrable de la droite nationaliste israélienne qui sont en cause, mais le fait même de l’existence de l’Etat juif au Proche-Orient.

D’où l’engouement - oui, c’est un engouement -, d’où la fascination de ces milieux intellectuels européens, et en particulier français, pour la gauche antisioniste israélienne, dont Michel Warchawski, ancien leader de Matzpen et dirigeant du Centre d’information alternative, est peut-être le meilleur représentant.

Il suffit désormais d’être antisioniste, a-sioniste, post-sioniste, ou nouvel historien décrivant les massacres perpétrés par les juifs durant la guerre de 1948 pour être reçu partout à bras ouverts.

Peu importe que ces antisionistes israéliens ne représentent qu’une fraction infinitésimale de la population juive israélienne (combien sont-ils au total ? trente ? soixante ? sur... cinq millions ?) ou que les solutions qu’ils préconisent renvoient aux chimères les plus délirantes, celles d’un Etat arabe palestinien qui garantirait ses droits à la minorité juive (sic), leurs paroles sont désormais bues avec avidité en dehors - et c’est ce qui est nouveau - des groupes d’extrême gauche.

Exit les Zeev Sternhell, les Eli Barnavi, les Claude Klein, les Yirmiyahou Yovel, les Amos Oz, les A.B. Yehoshoua, les David Grossmann qui représentent pourtant ce qu’il y a de meilleur et de plus intelligent dans le camp de la paix israélien.

Désormais on veut entendre les voix de la « vraie » gauche israélienne, la gauche antisioniste : oui, donnez-nous, donnez-nous des gens qui nous diront que les soldats de Tsahal se conduisent comme des nazis et que Jénine, c’est comme Oradour-sur-Glane !

Certes, les positions du Meretz et de La Paix maintenant (Chalom Ahchav) ont encore une petite audience chez les gens de bonne foi et de bonne volonté, ces voix authentiques et porteuses se font encore parfois entendre sur les campus, mais, de plus en plus, on juge la gauche sioniste trop molle, trop passive vis-à-vis de Sharon, et surtout on la trouve beaucoup trop critique envers les Palestiniens, envers Yasser Arafat, le Hamas et les attentats... Quoi, le Hamas est-il vraiment une organisation terroriste ?

Le soutien apporté par ces milieux intellectuels en France aux représentants de l’antisionisme le plus débridé n’aura strictement aucun effet sur le conflit lui-même, sur la situation sur le terrain, sur le sort des Palestiniens et les chances d’un retour au processus de paix.

Des personnalités antisionistes comme Michel Warchawski ou Ilan Pappé n’ont strictement aucune audience en Israël, même pas chez les Palestiniens, qui savent parfaitement ce qu’ils représentent dans la réalité israélienne.

Il est seulement navrant et triste que la gauche sioniste israélienne, déjà ostracisée, condamnée et isolée dans son propre pays par une droite hégémonique et agressive, se voit abandonnée dans son combat au profit de gens qui ne représentent strictement rien, mais qui viennent conforter de vieux démons.



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