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LE 11 JANVIER : UN ÉVÉNEMENT INQUIÉTANT Shmuel Trigano La première remarque que l’on peut faire, c’est qu’une telle mobilisation constitue un indice de l’ampleur de la crise qui l’a rendue possible : elle n’est pas artificielle, même si le pouvoir, en la personne de Manuel Valls, avait déclaré par médias interposés, lors de son discours d’Evry, la veille, que « tous les citoyens doivent descendre dans la rue ce jour-là ». Elle nous dévoile une perspective sur l’état de la société. De ce point de vue, elle a offert au malaise ambiant un exutoire gigantesque, qui aujourd’hui se « fétichise » dans un objet symbolique : le nouvelle livraison de Charlie Hebdo, achetée par millions. Remarquons avant tout le côté désespéré et le sentiment de fin des temps : face à l’évolution des choses, il n’y a plus qu’à descendre dans la rue en silence, applaudir, chanter la Marseillaise, scander « Charlie »... Le silence de cette manifestation exprimait, à hurler, le non-dit et l’inconscient qui la portaient. Le mot d’ordre « Je suis Charlie » signifie exactement que l’on revendique la place du mort comme une dignité en vertu d’une compassion sacrificielle face aux assassins. Cette foule immense n’a pas déclaré la guerre aux islamistes, elle n’a pas identifié les terroristes pour ce qu’ils sont. On peut même avancer que l’objectif inconscient de ce rassemblement était de ne pas les identifier comme tels, du fait du coût symbolique que celà représente pour les illusions des 30 dernières années (exactement depuis la venue au pouvoir des socialistes qui voulaient « changer la vie »), mais plutôt de s’identifier aux victimes, dont on ne sait pas clairement de qui elles le sont puisque l’agresseur n’est pas clairement identifié. Ce n’est pas en effet « la liberté d’opinion » qui est en jeu (autre objet substitutif) mais l’attaque non plus mondiale, cette fois-ci, mais nationale de l’islamisme. Il ne s’agit pas de défendre la première mais d’éradiquer de façon résolue ce dernier. Et si l’on croit qu’on va l’emporter en levant un crayon en l’air ou en dessinant des carricatures, voire en communiant dans un pacifisme dégoulinant de bonnes intentions, c’est déjà la défaite qui s’annonce. Compassion-démission Quand on est attaqué, en effet, la moindre des choses pour sauvegarder sa santé mentale, c’est de nommer son ennemi et de l’identifier pour le terrasser. C’est là où est le problème et c’est ce que la France ne fait pas et ne peut pas faire depuis 15 ans . Entre le moment ou François Hollande déclare, il y a deux jours, qu’il s’agit d’un acte « antisémite » et le début des agressions, en 2000, il s’est passé 15 ans pendant lesquels les classes dirigeantes françaises ont dénié le problème, préférant caresser les mythes de « tensions inter-communautaires » et de « conflit importé » et se repaître d’explications sociologisantes . Ce discours est toujours à l’œuvre quand Laurent Fabius, sur RTL, le matin même de la manifestation, affirme que le confllit du Proche Orient - entendez : Israël - est la cause de l’antisémitisme en France. A l’encontre de ce mantra, ce que les derniers attentats ont montré, c’est que la cause de l’antisémitisme est à rechercher dans les motifs islamiques et coraniques contre les non-musulmans, clairement invoqués par les terroristes, mais aussi dans le silence des musulmans « modérés » qu’on n’a jamais entendus, clairement et en masse, sauf rares exceptions, refuser ni combattre l’antisémitisme, mais aussi l’incapacité de l’Etat d’intégrer l’islam en le réformant et de protéger les Juifs. C’est pour cacher tout celà qu’au plus fort des événements le Pouvoir pointe en filigrane (mais systématiquement dans sa politique) la responsabilité d’Israël et y voit la cause de tout ce qui se passe. « Je suis Charlie, je suis un flic, je suis juif » Le dispositif du « pas d’amalgame » Ces distinguos, en fait, devraient être l’affaire des musulmans. Le problème est que jusqu’à ce jour ils n’ont jamais fait clairement ce travail et plus spécialement en ce qui concerne leur rapport aux Juifs. Le monde arabo-musulman est dévoré actuellement par une haine des Juifs très profonde, religieuse, politique, historique. La chose n’est pas claire, même chez ceux qui s’opposent aux djihadistes. On a pu ressentir ce trouble aux paroles de Dounia Bouzar, grande combattante contre « l’amalgame », interlocutrice universelle de tous les médias français, qui, dans l’émission « Mots croisés » du 12 janvier, évoqua la présence de Natanyahou dans la manifestation pour expliquer pourquoi des musulmans n’y ont pas participé... Or, l’antisémitisme avance aujourd’hui sous couvert d’antisionisme, dans la dénonciation légitimante de pseudo crimes commis par Israël, invention de la propagande palestinienne pour justifer le terrorisme palestinien. C’est en hurlant pour Gaza, en juillet dernier, qu’on a attaqué la synagogue de la Roquette. En quoi est-ce différent du discours de Merah sur les Juifs ? Le discours du « pas d’amalgame » comporte ainsi, de façon dialectique, un amalgame collatéral, inavoué bien évidemment : celui qui consiste à attribuer la cause de la violence antisémite et djihadiste à Israël, en l’occurence « Natanyahou ». Les journalistes ont rivalisé d’excès pour définir la délégation ministérielle israélienne : extrême droite, ultra-nationaliste, etc, là où les Palestiens sont bien sûr des anges innocents. C’est justement là un trait spécifique du nouvel antisémitisme : le discours médiatique français y joue un rôle gravissime dont les preuves ont été amplement fournies. L’accusation d’Israël et du sionisme dans le nouvel antisémitisme fut, dès le départ, en 2001, clairement énoncée par Hubert Védrines, alors ministre des Affaires étrangères, quand il déclara qu’ils « comprenait » les violences antijuives des banlieues à la lumière de « ce que faisait Israël aux Palestiniens ». Il l’a réïtérée le 11 janvier sur BFM. C’est en fait le discours classique du Quai d’Orsay, réïtéré aussi le même jour par Laurent Fabius, comme on l’a signalé. La « politique arabe » de la France a un impact direct et structurel sur l’antisémitisme en France . Le rôle d’Israël Or la question d’Israël et du sionisme est un problème cardinal quand on sait que l’antisémitisme - et pas seulement musulman - se cache aujourd’hui derrière le paravent d’un antisionisme réputé légitime pour frapper les Juifs dans le monde entier. Rendre Israel coupable de la situation comme le fait presqu’ouvertement le gouvernement français (avec la résolution de reconnaissance de l’Etat palestinien rédigée par la France et présentée au Conseil de Sécurité), c’est justement jeter de l’huile sur le feu comme l’ont fait pendant 15 ans les médias français. Sortir le Hamas de la liste des organisations terroristes comme l’a fait l’UE, et donc la France, c’est mettre en danger directement les Juifs français. Et la France comme on a fini par le voir. C’est tout celà que couvre le « pas d’amalgame » L’accusation des Juifs au cœur de la compassion victimaire Suivre les reportages sur la manifestation devant l’Hypercacher sur BFM et I-Télé était très instructif. L’accusation des Juifs (de partir) était le leitmotiv, ponctuée par l’affirmation lancinante des journalistes que les Juifs sont bien français, chantent la Marseillaise, font corps avec les non Juifs, etc. I:Tele a trouvé le moyen de détourner le recueillement de Vincennes en orchestrant une critique de Natanyahou et du sionisme qui détourneraient les Juifs de la France. Tout le reportage sur place n’a eu de cesse de mettre les Juifs en porte à faux entre Israël et la France, « la République », et de répéter sans fin que des musulmans étaient présents, tous français, tous unis dans la même compassion, la même union nationale. Sur BFM, le studio coupa abruptement une voix juive qui détonnait dans ce concert compassionnel en affirmant que les Juifs finiraient par partir, ce que contestait un Africain qui était là et qui jugeait que partir pour Israël c’était de la lâcheté... Les journalistes d’origine juive de ces chaines, Ruth Elkrieff et Mickaël Darmon ont été aussi sollicités pour mouiller leur chemise et dire combien les Juifs étaient français. Et donc fustiger implicitement ces Juifs qui veulent devenir des Israéliens. Il est probable que les journalistes de ces chaînes ont eu des consignes de la rédaction pour rendre compte de cet événement. Il faut réécouter les commentaires lancinants des reporters répétant les mêmes idées pour le constater : compassion, fraternité, solidarité, vive la République, nous sommes tous français, les musulmans sont dans la rue, ils sont de bons français, l’islam est pacifique, les terroristes ne sont pas des musulmans, les Juifs ne doivent pas partir pour Israël, ils sont de bons français, la France unie, dressée contre la barbarie,etc. Cette manipulation du langage et de la terminologie, rappelle les « éléments de langage » que l’AFP donne à ses reporters pour habiller idéologiquement les événements du Moyen Orient et donc les détourner en faveur des Palestiniens dans un langage qui ne peut qu’inciter à l’inimitié envers les Juifs mais qui, parce qu’il émane de la puissance publique, la légitime. Il ne faut pas oublier en effet qu’aux yeux de l’opinion musulmane, les « Israéliens » sont des « Juifs », c’est ainsi d’ailleurs qu’ils sont nommés couramment. Pas de distinguo, ici, mais un amalgame total. Cet état de choses illustre bien ce que j’écrivais en 1982 dans mon livre La République et les Juifs après Copernic dans un chapître intitulé « Les derniers Français de France » (les Juifs bien entendu) : on demande aux Juifs de témoigner de façon victimaire et martyrologique d’une France qui n’existe plus depuis belle lurette. On a beaucoup entendu parler de la République ces jours ci mais qui se rend compte qu’elle n’existe plus dans les faits, les comportements, l’éducation, la politique du gouvernement et déjà tout simplement parce que l’adhésion de la France à l’Union Européenne a mis fin à la souveraineté nationale, un trait indissociable de la « République ». Celà n’empêche pas de chanter la Marseillaise. Appelés à remplir ce rôle de grands prêtres de la République, les Juifs doivent rester des victimes consentantes et silencieuses devant lesquelles on dépose des gerbes mais ils ne doivent pas devenir des Israéliens, c’est à dire, dans l’imaginaire, des « soldats », mais, dans le vrai, des sujets souverains, semblables à tous les autres. Le sens global de la manifestation En d’autres termes : est-ce que la majorité plus ou moins proche du FN était là ou plutôt les supporters du multiculturalisme ? La première aurait profité de l’occasion pour se lever en toute légitimité contre les musulmans, en s’engouffrant dans la faille sécuritaire et politique pour manifester, par les pieds - et pas la bouche -, un patriotisme opposé au pouvoir, accusé de faiblesse. Les actes terroristes rendaient possible en effet de désigner l’islam sans se voir accuser d’islamophobie. Si c’est la France du « Vivre ensemble » qui arpentait les rues, elle aurait manifesté là un ultime sursaut face à l’abîme qui la guette, afin de suturer cette faille et sauver son rêve multiculturaliste et une stratégie de démission face à l’islamisme. Dans ce cas-là, la manifestation aurait été un effort désespéré pour maintenir un narratif de 20 ans d’erreurs qui a obscurci les enjeux et empéché de faire face aux vrais problèmes. Cette dernière explication a beaucoup de crédibilité tellement l’évocation des « musulmans de France » a été centrale, absolument majeure dans tous les discours accompagnant l’événement, célébrant la fraternité, la fraternisation des « communautés », la francité des musulmans... La présence des dirigeants européens dans la manifestation conforte aussi cette idée car la politique des 30 dernières années fut celle de l’UE et de ses commissions, qui ébranla les Etats-nations et les identités nationales, en aggravant cette évolution avec une politique immigrationniste. La manifestation du 11 janvier est à inscrire cependant dans une perspective plus longue pour être comprise. Je pense à une série étonnante de manifestations de masse en France : Copernic en 1980 , Carpentras en 1990. Toutes ces manifestations ont eu à voir avec les Juifs et l’antisémitisme, toutes ont rassemblé la société française tous partis réunis (on ne peut dire confondus, ce qui ne fut pas le cas avec Copernic ni avec Carpentras, à l’exception du 11 janvier). J’ajouterais : toutes ont à voir avec le PS. Or ces démonstrations considérables, tenues pour positives sur le moment, n’ont rien changé pour la condition juive. Au contaire, elles ont installé la situation que nous connaissons depuis 15 ans et n’ont fait que scander la marche à l’abîme du judaïsme français. Pronostic exploratoire Dans les deux cas, les Juifs n’auront pas la part belle. D’un côté, ils seront accusés de double allégeance, comme il y a un siècle, de l’autre (à gauche), de mettre en danger, du fait de leur « communautarisme », l’unité indivisible de la République, sur l’autel de laquelle ils sont appellés à se sacrificier, en exemple pour les musulmans, et, entre les deux, face aux multiculturalistes, ils seront tenus pour démontrer par leurs pieds et leur lien avec l’Etat d’« apartheid », le côté fallacieux du roman du « vivre ensemble », qui est une dérision de l’être ensemble propre à la démocratie. ANNEXE Ce concept est problématique. Il met en œuvre une confusion qui identifie l’islam, une religion, une pensée, à une caractéristique ethnico-raciale. Il y a effectivement, sur le plan des normes, une distinction à faire entre le racisme anti-arabe/musulman, une haine de type ethnique qui s’applique aux personnes individuelles et à la masse, avec la critique ou la haine de l’islam comme idéologie, philosophie ou religion. Il peut exister une haine idéologique du christianisme ou du judaïsme, de l’athéïsme ou du laïcisme, comme du socialisme ou du communisme, mais tant que cette haine, ce mépris ou cette critique n’aboutissent pas à une atteinte aux personnes s’en recommandant, on n’est pas face à un cas de racisme mais à une animosité idéologique et intellectuelle. Il est vrai que cette animosité peut conduire à des actes agressifs. Il faut à ce propos distinguer entre « discrimination » et « racisme », ce dernier ne faisant référence qu’à une race, un caractère supposé relatif à des caractéristiques physiques apparentes, une catégoriie elle même idéologique. Le racisme anti-arabe/musulman ne doit donc pas être confondu avec quelque perspective que ce soit concernant l’islam comme doctrine. Le terme de « phobie » est ici trompeur et pour cause, c’est pour celà qu’il a été forgé. Il référe la haine à une défaillance psychique (donc irresponsable) et, surtout, il a une portée invasive qui ferait de toute opinion sur l’islam un racisme, ce qui reviendrait par exemple à faire du blasphème un acte raciste (ce qui est un but avéré de l’Organisation de la Coopération Islamique). Or, bien que le blasphème soit une provocation gratuite et inutile (on peut être athée sans jeter nécessairement le discrédit sur une croyance), ce n’est pas un acte « raciste » ou, plutôt, « discriminatoire ». L’accusation d’islamophobie, de cette sorte, parce qu’elle s’étend aux valeurs et aux croyances de l’islam, parce que l’étendue du champ de la phobie n’a aucune limite, risque donc de se confondre avec un interdit de nature religieuse, intellectuelle, culturelle et idéologique, visant en l’occurence, à protéger, défendre et illustrer l’islam. Il fait de lui, une religion (un facteur culturel), un marqueur ethnique (un facteur réputé biologique), de sorte que le critiquer, ce serait porter atteinte à une ethnie. Je serais aussi perplexe pour la notion de « judéophobie ». L’antisémitisme est une forme de discrimination qui s’attaque aux Juifs parce qu’ils sont juifs, dans le sens où ils appartiennent à un « peuple » qui serait caché dans les citoyens (le complot juif mondial). Cacher cette vindicte dans l’antisionisme (autre forme de la condition de peuple des Juifs) ou le mensonge sur les pseudo crimes d’Israël est le propre du nouvel antisémitisme. La preuve est que cette idéologie s’attaque aux Juifs en France, à l’instar de Merah voulant « venger les enfants de Gaza ». À Toulouse. La vérité est que tous ces distinguos juridiques sont fragiles. Dans la réalité sociologique, la réalité vécue, si les musulmans reconnaissent dans leur religion un drapeau de leur appartenance collective (c’est en fait ce que nous dit l’analyse sociologique durkheimienne du phénomène religieux), critiquer l’islam, c’est s’attaquer à eux en personne, à leur dignité... L’homme moyen n’est pas un philosophe ni un juge. C’est le fait que cette confusion devienne invasive et agressive pour les autres qui est inacceptable. Or c’est bien le cas avec le djihad mondial. Retourner à l'article LE 11 JANVIER : UN ÉVÉNEMENT INQUIÉTANT |
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