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La violence symbolique contre les Juifs
Shmuel Trigano
Article mis en ligne le 16 mars 2013

Le climat s’est appesanti ces derniers jours pour les Juifs de France. L’élévation de l’assassin du ministre israélien Rehavam Zeevi au titre de citoyen d’honneur par le maire de Bezons, avec force cérémonies et inauguration de plaque, est venu renforcer le malaise qu’a engendré l’inquiétant hommage national à Stéphane Hessel et à ce qu’il représente sur le plan des Juifs et d’Israël. A cela s’est ajouté le dythirambe en faveur de Chavez que le ministre Victorin Lurel s’est senti obligé de faire au nom de la République, en ignorant son antisémitisme virulent qui a chassé du Vénézuela la majeure partie de la communauté juive. Chavez, l’allié d’Ahmadinedjad, comparé à De Gaulle et à Léon Blum réunis !

 

A vrai dire, il n’y eut pas que cela. Durant le pseudo débat sur le mariage homosexuel, la ministre Taubira a pu se sentir autorisée à fustiger ce qu’elle appelle « les racines judéo-chrétiennes de notre civilisation ». « Elles sont périmées », a-t-elle dit. « Vous représentez le passé. Nous voulons balayer tout cela. Nous sommes l’avenir ». « Balayer tout cela » ?

 

Aurait-elle osé parler en ces termes de l’islam ? On sait que non car, quand elle proposa sa loi sur la mémoire de l’esclavage, on se souvient qu’elle avait programmatiquement éliminé le rappel de l’esclavage en islam qui fut meurtrier pour les Noirs africains et qui persiste toujours dans les monarchies de pétro-dollars.

 

Ces actes et déclarations sont d’une grande violence symbolique dont on peut justement mesurer l’ampleur en les comparant à l’apologie permanente de l’islam dont le dernier exemple fut donné dans le procès en sorcellerie fait à l’actrice Véronique Genest par le journaliste Aymeric Caron dans l’émission du service publique « On n’est pas couché », avec le maximum d’incompétence et d’inculture dont le journalisme dans ses pires heures peut être capable.

 

Et s’agit-il d’autre chose que d’une violence que ce discours médiatique permanent qui cultive l’obsession d’Israël, dont il mène le procès nourri de désinformation programmée  (apartheid, etc) et abreuvé au discours de guerre palestinien ?

 

Cette ambiance européenne qui témoigne d’une insensibilité totale à ce qui préoccupe les Juifs est éminemment perverse car elle s’accompagne d’un discours de compassion pour les Juifs souffrants (en rapport avec la Shoah et les agressions antisémites) ou « bien comme il faut », j’entends les Alterjuifs et les détracteurs existentiels d’Israël.

 

On ne peut s’empécher, dans cette perspective, de constater une terrible dissonnance entre la réception et la standing ovation faites à Shimon Péres par le parlement de l’Union Européenne et le boycott des produits de Judée-Samarie qu’il fourbit au même moment, comme si il n’avait pas plus de raisons de le mettre en œuvre pour de nombreux pays de la planète, à commencer par ses chers alliés arabes chez lesquels les infractions aux droits de l’homme sont massives.

 

C’est le « camp de la paix »,  l’homme des Accords d’Oslo que la parlement européen célèbre avant tout. Ce partage sélectif entre deux types de Juifs (l’Israël condamné et l’Israël exalté[1]) est le ressort le plus profond du nouvel antisémitisme européen et sa couverture rhétorique contre l’accusation d’antisémitisme. Le président de l’Etat d’Israël ne s’est pas élevé contre le boycott européen, on ne peut que le regretter[2].

 

Nous pourrions dire pour résumer ce théatre maléfique que l’Union Européenne favorise le profil d’un Etat d’Israël dont la légitimité serait de type « humanitaire » (en rapport bien sûr avec la Shoah et l’antisémitisme : toute sa mauvaise conscience) plutôt que souveraine et régalienne.

 

C’est le même dispositif qui est à l’œuvre en France. Les quelques mots de réserve de François Hollande face à la dépouille de Hessel[3] sont très importants mais ils furent prononcés si rapidement qu’ils furent inaudibles. Si l’interprétation humanitaire de l’antisémitisme en France domine, générant dans certains secteurs de l’opinon compassion pour les victimes et demande de sécurité, sa dimension politique est systématiquement méconnue, or l’antisémitisme, a fortiori aujourd’hui, est plus qu’un phénomène de racisme. C’est une question politique qui doit être reconnue et combattue comme telle.

 

Accepter de se laisser enfermer dans ce cercle vicieux de faux-semblants, c’est choisir l’échec. Il faut que la communauté juive change de stratégie. Nous sommes trop gentils, trop effacés, trop pleurnicheurs. Il faut passer à l’attaque dans l’arène de l’opinion publique. Un principe doit nous guider : il ne faut pas que devienne acceptable que l’on puisse impunément porter atteinte au prestige du peuple juif et du judaisme.

 

La violence symbolique prépare toujours une violence réelle.

 

 

* A partir d’une chronique sur Radio J, le vendredi 14 mars 2013.



[1] Les liens manifestes entre Jcall et l’Union européenne sont très parlants à ce propos tout comme le subventionnement de ONG militantes hostiles à Israël en Israël et en Judée Samarie.

[2] Faut-il s’en étonner ? Il y a quelques semaines, devant tous les ambassadeurs étrangers accrédités en Israël, il s’est livré à une attaque politicienne virulente contre le premier ministre israélien, lui reprochant, de façon ahurissante au regard de la réalité, de ne pas avoir fait la « paix » avec l’OLP. Il semble que, chez lui, l’homme de parti l’emporte sur l’homme d’Etat, à savoir que le président israélien n’a qu’une fonction symbolique représentant l’unité de la nation et pas un parti. On se souvient qu’au soir d’une élection qui ne lui était pas favorable, il eût cette parole terrible : « Les Israéliens ont perdu, les Juifs ont gagné »… L’échec faramineux de l’utopie dont il s’est fait le porte drapeau à l’époque d’Oslo, « le Nouveau Moyen Orient », devrait l’inciter à plus de réserves. Elle n’a pas échoué du fait des « Juifs » mais des Arabes.

[3] « Il pouvait aussi, porté par une cause légitime comme celle du peuple palestinien, susciter, par ses propos, l’incompréhension de ses propres amis. J’en fus. La sincérité n’est pas toujours la vérité. Il le savait. Mais nul ne pouvait lui disputer le courage. »



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