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Comparaison n’est pas raison
par David Ruzié, professeur émérite des universités, spécialiste de droit international
Article mis en ligne le 20 février 2008

Lors du point de presse du porte-parole du Quai d’Orsay, du 20 février, un de ses interlocuteurs s’est référé à une dépêche de l’AFP, selon laquelle : ’’Un haut responsable palestinien a estimé mercredi que les Palestiniens devaient imiter le Kosovo en proclamant unilatéralement leur indépendance, faute de progrès dans les négociations avec Israël’’.

Et à la question : « Seriez-vous prêt à reconnaître un tel Etat palestinien ? », la réponse a été : « La France soutient le processus visant à l’établissement d’un Etat palestinien viable dans le cadre d’un accord négocié entre les parties, sur la base des résolutions pertinentes des Nations unies ».

Pour une fois, à la différence de certaines déclarations, faites par le ministre, lors de son dernier passage, dans les Territoires et en Israël, on n’a pas, confondu, au Quai d’Orsay « vitesse et précipitation ».

Nous irons jusqu’à préciser, pour reprendre la référence faite par certains - et il n’est pas sûr que l’idée ait seulement germée chez des Palestiniens - que la récente proclamation d’indépendance par le Parlement du Kosovo, puisse servir d’élément de comparaison.

Et cela, même si l’indépendance de cette nouvelle entité a déjà été reconnue par un certain nombre d’Etats, dont la France.

Nous avons déjà, il y a quelques mois, évoqué, ici même (www.desinfos.com/article.php?id_article=8381) la proclamation, le 15 novembre 1988, par le Conseil national de l’OLP, réuni à Alger, d’un Etat palestinien, proclamation restée sans lendemain, car cette entité était dépourvue - et est encore dépourvue - de la plupart des éléments constitutifs d’un Etat, au sens du droit international.

Certes, une résolution 43/177 du 15 décembre 1988 reconnaissait que l’Assemblée générale de l’ONU était « consciente de la proclamation de l’Etat palestinien par le Conseil national palestinien dans la ligne de la résolution 181(II) », autrement dit que cette proclamation pouvait être rattachée à la décision de partage de la Palestine.

Mais, cette résolution venait après une autre (43/176), adoptée le même jour, rappelant la nécessité d ‘ « accords garantissant la sécurité de tous les Etats de la Région, y compris ceux qui sont nommés dans la résolution 181(II) du 29 novembre 1947 », autrement dit l’ « Etat juif » et l’ « Etat arabe ».

Et c’est là une différence essentielle avec le Kosovo, qui jusqu’à l’éclatement de la Yougoslavie, et même après, constituait une province de la Serbie, autrefois, république fédérée dans l’ensemble yougoslave, devenue, par la suite un Etat indépendant.

En effet, le Kosovo disposait déjà d’une délimitation, certes administrative, donc de caractère interne, mais il est admis que des limites administratives peuvent, le cas échéant, servir de délimitation à des frontières internationales.

En effet, il s’agit là de la mise en œuvre du principe de ce que l’on appelle l’uti possidetis, dont il a été fait application dans le cadre de la décolonisation, déjà en Amérique du sud au XIXème siècle ou plus près de nous, en Afrique au siècle dernier.

Et surtout c’est sur cette base qu’a été délimité, très récemment, le territoire du Monténégro, lorsqu’à la suite d’une déclaration de son Parlement, il s’est affranchi, en juin 2006, de la souveraineté serbe ; il est vrai, sans que la Serbie ne s’y oppose, à la différence de la situation actuelle concernant le Kosovo.

Mais rien de tel concernant les Territoires qui, rappelons-le, en dépit d’une affirmation contestable de la Cour internationale de justice, dans le cadre d’un avis purement consultatif, émis en 2004, car, ils ne sont même pas délimités administrativement.

En effet, on ne soulignera jamais assez le fait que la Ligne verte n’est qu’une simple ligne de cessez-le-feu, définie dans le cadre d’un accord d’armistice, avec la Jordanie, en 1949 et que, tant dans le texte que dans la pratique ultérieure de la Jordanie, la caractère de frontière a toujours été dénié à cette délimitation de caractère purement militaire.

C’est donc à juste titre que le gouvernement israélien a décidé de mettre l’accent, en premier lieu, sur la question des frontières, dans le cadre des négociations israélo-palestiniennes, qui sont sensées avoir pris un nouvel essor, après la conférence d’Annapolis.

Sans frontières, un Etat palestinien ne peut exister.

Le second point sur lequel portent les discussions est relatif au sort des réfugiés, car il y va de l’essence même de l’Etat d’Israël, dont on ne soulignera jamais assez qu’il est un Etat juif, non pas au sens - tel est du moins notre point de vue - théologique, mais au sens où il est un Etat qui a été conçu par et pour les Juifs.

Rappelons, d’ailleurs, qu’en 1947, la société internationale de l’époque avait, parallèlement, admis la création, d’un Etat arabe supplémentaire, sur les « ruines » du territoire sous mandat de la Palestine (cette ancienne possession ottomane ayant déjà été amputée par la puissance mandataire en 1920, lorsqu’elle créa l’émirat de Transjordanie).

De telle sorte que ce soit pour des considérations de politique intérieure ou non, il est tout à fait logique que le statut de Jérusalem ait été renvoyé à plus tard dans la discussion, car s’il constitue, sans aucun doute, un sujet sensible il n’en est par pour autant essentiel s’agissant de la reconnaissance d’un Etat.

Il y a donc lieu, certes, de tenir compte d’événements historiques, même et surtout récents, mais « comparaison n’est pas raison ».



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