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Rencontre avec Ouzi Landau
Par Avraham Azoulay pour Guysen International News
Article mis en ligne le 4 février 2008

Né à Haïfa en 1943, membre de la Knesset depuis 1984, et pilier du Likoud, Ouzi Landau a une longue carrière politique derrière lui. Ministre de la Sécurité intérieure en 2001, puis ministre sans portefeuille en 2003, il s’oppose farouchement au plan de retrait unilatéral d’Ariel Sharon qu’il estime être un danger pour l’Etat d’Israël. Il se retrouve à la tête de 13 députés « rebelles » puis démissionne du gouvernement en 2004. Homme intègre, ses convictions l’on conduit à se retirer de la scène politique, sans qu’il renonce pour autant à oeuvrer en faveur de la société israélienne... Entretien avec un homme sincère.

Avraham Azoulay : La parashat Mishpatim traite de justice. Vous semblez être particulièrement sensible à la justice sociale et notamment au cas des expulsés du Goush Katif...

Ouzi Landau : 3 ans se sont écoulés depuis l’expulsion. Des milliers de personnes n’ont toujours pas de logement fixe, voire temporaire, ni de travail.
Certains ont perdu des affaires florissantes où ils avaient tout investi. Des familles sont détruites, les enfants ont des troubles psychologiques.
Ce n’est même plus une question de droite ou de gauche. C’est un problème humain !

Regardez l’image d’Israël dans un miroir : tout semble détruit. Le pays n’a rien fait de concret en matière de respect humain.
Ce qui se passe est une grande honte !
Où sont tous ceux qui ont encouragé le retrait, cette élite, les écrivains, les intellectuels, où sont-ils maintenant ces hommes qui déclarent être éclairés, évolués et sensibles aux Droits de l’Homme mais qui tournent le dos à cette souffrance ?

A.A : Que pensez-vous justement, de la situation à Gaza ?

O. L : Les habitants de Gaza ont élu le Hamas librement. Ce fut une grande victoire pour eux.
Depuis, les terroristes tirent à partir des cours de récréation et des maisons. Les Gazaouites applaudissent. Personne ne se plaint ou ne s’oppose aux tirs de ’Katioushot’ parmi eux. Ils ont choisi cette situation.

A.A : Mais que dites-vous des innocents parmi eux, des enfants qui souffrent de la faim et du froid, sans électricité ?

O. L. : Il y a, bien sûr, des innocents, parmi eux, mais toute la société locale soutient le Hamas. En Iran aussi les sanctions touchent des innocents et personne ne les mentionne.
En Lybie ou à Cuba également, beaucoup ont subi des années de sanctions, mais personne n’a rien dit car c’est ainsi lorsqu’on sanctionne ceux qui nuisent à la sécurité.

A.A : Pourquoi reproche-t-on alors à Israël d’agir ainsi ?

O.L. : Parce que nous manquons de détermination.
Depuis Oslo, nous faisons machine arrière à la dernière minute chaque fois que nous avons à surmonter des attaques. À l’exception de l’opération ’‘H’omat Maguen’’ Israël cède face au terrorisme depuis quinze ans.

Forts, nous ne le sommes qu’en paroles. Ces rétrocessions successives, ne sont pas que géographiques, elles sont mentales, elles sont la rétrocession des principes essentiels du Judaïsme et du Sionisme : tenir et ne pas renoncer à ce qui nous revient de droit, de tout temps.

A l’époque de Ben Gourion ou de Beguin, de telles choses n’auraient jamais été tolérées. C’est sans rapport avec une politique de droite ou de gauche.

A.A : Est-ce donc un problème de démotivation générale dans la société ?

Ouzi Landau : C’est, en effet, un problème profond. Le Judaïsme et le Sionisme ne sont plus enseignés dans les écoles.
Le dernier Ministre de l’Education permet d’étudier dans les écoles israéliennes ce que les Arabes appellent la « Nakba » c’est-à-dire la création de l’Etat en 1948 vécue comme une « catastrophe », est-ce légitime ? 50 % des soldats n’ont jamais été à Jérusalem, 80 % n’ont jamais mis les pieds au Kotel et 26 % des jeunes ne font pas le service militaire.
C’est la grande crise dont il est question : une perte d’identité qui brise la solidarité sociale et nationale.

A.A : Que peut-on faire pour y remédier ?

O.L : Tout d’abord il faut changer de discours. Nous voulons voir Israël revenir à ses racines juives et sionistes, clamer sans bégayer, à l’image de Beguin et de Ben Gourion : « oui je suis sioniste et j’en suis fier ! ».

Le Sionisme est l’entreprise historique la plus importante et la plus juste du 20ème siècle. Les Arabes vivant en Israël ont tous les droits du pays, mais aucun droit sur le pays.
Il faut le dire haut et fort sans bégayer. Nous ne sommes pas des colonisateurs, nous sommes chez nous. Ce sont les Arabes venus du désert qui se sont octroyé des droits de propriétaires.

A.A : Aujourd’hui vous ne faites plus partie du gouvernement, mais êtes-vous engagé dans une action ou un projet politique ?

O.L : Je ne siège plus à la Knesset et je ne fais plus de politique, mais effectivement je suis toujours engagé au niveau sioniste, avec un nouveau projet.
Nous voulons atteindre un public non religieux qui refuse les déclarations comme : « nous sommes des colonisateurs, les Palestiniens sont nos victimes et cette terre est aussi la leur, etc. »

A.A : Pourquoi se tourner vers ce public ?

O.L : Nous avons besoin de renouveau, de montrer à la majorité la profondeur de nos racines dans ce pays...

A.A : Seriez-vous rabbin ?

O.L : Nul besoin d’être rabbin ! Jabotinski était-il rabbin ? Et Hertzel ? Et même Moïse qui a vécu 40 ans chez les Égyptiens à la cour de Pharaon ? Mais lorsqu’il a compris qu’il se passait quelque chose d’anormal avec ses frères, en tant que Juif se respectant, il a été sensible à la souffrance de son peuple, et quand il vit un Egyptien frapper un Hébreu, il n’a pas hésité à le supprimer.

Il se peut que quand on est à l’extérieur du peuple Juif, on voit les choses avec une perspective différente et on réalise que ce qui se passe est absolument anormal.
La grande catastrophe en Israël, c’est que si nous sommes sortis d’exil, l’exil n’est pas vraiment sorti de nous (NDLR : inspiré par R. Menahem Mendel de Kotzk) et cette attitude se voit tous les jours avec le gouvernement actuel.

A.A : Comment changer cela ?

O.L : Un des moyens d’action dans lequel je m’investis le plus est le projet « Eretz Nehederet ».

A.A : Drôle de nom qui rappelle celui de l’émission télévisée satirique... c’est intentionnel ?

O.L : Oui, parce que nous nous adressons à un public non religieux. Les religieux n’ont pas besoin d’être convaincus, ils savent déjà l’importance de Tsion.
Je m’adresse à des Israéliens qui recherchent des raisons de fierté, qu’ils soient de gauche ou de droite. Je veux qu’ils viennent à Jérusalem, qu’ils voient le Kotel, la ville, son histoire, et aussi le Goush Etsion.

Nous organisons des visites à Sdérot et dans le Golan, pour que le peuple rencontre les habitants de ces régions et sache qui ils sont. Qui connaissait les habitants de Goush Katif avant l’expulsion ? Il ne s’agit pas de politique mais de connaissance profonde de ce que nous défendons, savoir ce que nous risquons de perdre, ce à quoi le gouvernement est prêt à renoncer sans être vraiment certains de prendre la bonne décision.

Et si la conclusion qui s’impose c’est de renoncer à Bikat Hayarden, comme à un bras pour sauver le corps, politiquement ça se tient. Mais si on cède quelque chose qui nous appartient en propre, il ne faut pas renoncer gratuitement. Il faut tenir à sa dignité, à sa foi.

Au Moyen Orient, personne n’a pitié. On ne doit pas renoncer à ses droits et s’excuser. Les Palestiniens se comportent en maîtres comme si cela était légitime. Ils sont convaincus et confiants. Ils se battent avant tout pour la justice de leur cause.

Et nous, où en sommes-nous ? Très loin de là. C’est pourquoi nous voulons rendre à toute la population israélienne le sentiment que leur combat est juste.


Entretien réalisé par Avraham Azoulay et Itzhak Attia du ’P’tit Hebdo’ en collaboration avec Guysen International News



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