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Un écrivain poursuivi pour « laïcité » obtient gain de cause
MEMRI
Article mis en ligne le 18 janvier 2004

Un procès sans précédent a été intenté en août 2003, en Arabie Saoudite, par l’écrivain Ibrahim Shahbi, contre un homme l’ayant accusé de « laïcité et de dévier du [droit] chemin [de l’islam]. » En décembre 2003, un juge saoudien a condamné l’accusateur à soixante coups de fouet, mais M. Shahbi a pardonné à son détracteur, précisant que l’essentiel était d’avoir « fait passer le message » (1) Voici les réactions des réformateurs saoudiens à l’incident.

Les accusations d’hérésie représentent un problème pour la plupart des écrivains musulmans.

Le procès a attiré l’attention des intellectuels saoudiens. Hiyam Al-Muflih, écrivain et journaliste saoudien, écrit dans le quotidien saoudien Al-Riyad que le procès « mérite le soutien de tous les intellectuels (…) parce qu’il s’agit d’un problème qui touche la plupart des écrivains. Nous vivons à une époque où les écrivains, après avoir publié, sont surpris par un déluge d’accusations d’hérésie les traitant de tous les noms (…) Les diffamations ne se font plus que par Internet, sous le camouflage de pseudonymes : les accusations sont aujourd’hui dirigées directement contre des écrivains dans des forums, ou prononcées depuis les chaires des mosquées (…) L’absence générale de réaction de la part des penseurs, des écrivains et des auteurs pris pour cibles par ces individus insolents et ignorants (…) autorise n’importe qui à lancer des attaques verbales (…) Certains [pourfendeurs] ne s’y connaissent pas en jurisprudence et ne détiennent aucune preuve à l’appui de leurs arguments. [Dans le cas de Shahbi, l’accusateur] est un homme âgé de cinquante ans qui s’est arrêté d’étudier après l’école primaire. Qui lui a donné le droit de porter atteinte à l’honneur et à la foi d’autrui ? » (2)


Le système éducatif saoudien encourage la haine

L’écrivain saoudien Abdallah Thabit a émis, à l’occasion de cet incident, une critique particulièrement vive du système éducatif saoudien. Dans un article intitulé « Le bouc émissaire a quelque chose à dire et deux questions à poser », (3) Thabit emprunte l’identité du détracteur expliquant à l’accusé ce qui le motive :

" Ne savez-vous pas que, comme des millions d’autres, j’ai appris depuis que je suis enfant que quiconque n’est pas avec moi est l’ennemi d’Allah et de son Messager (…) ? Après tout, vous êtes aussi le produit du [système éducatif] qui enseigne que tous ceux qui se rasent la barbe, changent de style d’habillement ou s’affinent la moustache sont des laïcs qui veulent nous contrôler, moi, ma famille, la société et le pays où je vis, avec leurs idées occidentales. Et quiconque n’est pas d’accord avec nos prédécesseurs est un moderniste qui attaque la foi [musulmane] et complote jour et nuit pour la détruire.

On m’a appris à haïr tous les non-musulmans, et même tous les non-sunnites. En outre, on m’a appris à haïr tous ceux qui ne pensent pas comme moi, à les considérer comme des pécheurs dévoyés (…) Savez-vous combien de fois nous avons entendu [dans les sermons] du vendredi, dans des conférences, à l’école et à l’université, des supplications (…) pour que meure autrui et que soient exécutés des innocents, ainsi que [des appels] à aimer les criminels qui répandent le sang innocent et autorisent à abattre quiconque ne dit pas « Il n’y a d’autre Dieu qu’Allah » [en référence aux non-musulmans], ainsi que les musulmans modernes laïques ? Après tout, l’hérésie, selon eux, concerne aussi bien [les non-musulmans que les musulmans laïcs]. En outre (…), j’ai appris que les [musulmans laïcs] sont plus dangereux parce qu’ils récitent [la shahada] comme couverture leur permettant d’attaquer la religion d’Allah.

La loyauté à la religion de l’islam et le reniement des non-musulmans [Al-Walaa Wa Al-Baraa est l’une des bases de la foi islamique, qui dicte au croyant d’aimer Allah, le Prophète et les autres croyants, et de haïr ceux qui sont en désaccord avec eux] (…) justifient même de haïr sa propre famille. Ne nous ont-ils pas expliqué que le verset ’Ô hérétiques, je n’adore pas ce que vous adorez’ [le Coran 109 : 1-2] exhorte au reniement des pécheurs et invite à les maltraiter ? [Ne nous enseignent-ils pas] que ceux dont nous devons nous méfier en premier lieu (…) sont nos plus proches parents (…) parce qu’ils ont commis un grand nombre de péchés graves en écoutant de la musique, en regardant des séries télévisées, en omettant de réciter les prières et de se voiler le visage ? (…) [Ne nous ont-ils pas appris qu’]un fumeur, quelqu’un qui renonce à certains de ses habits, quelqu’un qui omet de prier, un voleur ou un meurtrier, [sont tous considérés] comme empruntant le même sentier ? (…)

Certains nous ont aussi enseigné que nous pouvons nous marier à des Juives et des chrétiennes, car elles appartiennent au ’peuple du Livre’, tout en les haïssant. Elle est ma femme afin de satisfaire mes besoins, mais elle est une hérétique qui provoque Allah, Son Prophète et Ses fidèles, bien qu’elle soit la mère de mes enfants (…) Ne savez-vous pas comme les propagateurs de la foi islamique diffament les non-musulmans et les musulmans qui n’approuvent pas leur doctrine religieuse ? Ne répètent-ils pas de leurs chaires, le vendredi comme les autres jours, qu’Allah transformera leurs femmes en veuves, anéantira leur puissance, paralysera leurs extrémités et gèlera le sang dans leurs veines ? Ne clament-ils pas ces malédictions et ces diffamations (…) même pendant les moments forts de haute spiritualité, le vendredi, pendant les festivités et les soirs de Ramadan ? « 

C’est la culture saoudienne qui est en tort - non un individu donné

 » Je suis atteint par cette culture, (…) alors pourquoi me le reprocher (…) ? Vous êtes incapables de poursuivre en justice ceux qui en sont à l’origine (…) ; vous accusez les auteurs d’ouvrages et de sermons qui formulent des accusations d’hérésie discriminatoires [à l’encontre des musulmans] (…) Pourquoi voulez-vous que je diffère de mon environnement (…) ? Et comment ne pas vous accuser de laïcité, vous qui regardez des chaînes satellite et écoutez de la musique (…) ? Comment ne pas vous accuser quand vous comptez enseigner l’anglais et apprendre aux femmes à conduire (…), et quand vous soutenez que le visage et les mains des femmes [ne devraient pas être recouverts] d’un voile, qu’il est permis de prendre des photos et que le fait de se faire pousser la barbe est simplement une coutume recommandée [et non une obligation religieuse] (…) ? Comment ne pas vous accuser quand vous ignorez ces [valeurs] fondamentales sur lesquelles se base la pratique religieuse (…) ? Et pourquoi ne poursuivrait-on pas tous ceux qui nous ont isolés du monde en nous assurant que ce dernier est dirigé par des païens et que nous seuls serons sauvés [au Jour du Jugement] (…) ? " (4)


(1) Arab News (Arabie Saoudite), le 24 décembre 2003

(2) Al-Riyad (Arabie Saoudite), le 22 août 2003

(3) Al-Watan (Arabie Saoudite), le 1er septembre 2003

(4) L’auteur fait allusion à la tradition selon laquelle le Prophète aurait annoncé qu’après sa mort, sa nation serait divisée en 73 groupes, et que seul l’un de ces groupes serait sauvé.

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