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De Théodore Herzl à Ehoud Olmert
par David Ruzié, professeur émérite des universités, spécialiste de droit international
Article mis en ligne le 14 novembre 2007

Devant la Commission des affaires étrangères et de la défense de la Knesset, le Premier ministre israélien Ehoud Olmert a, récemment, affirmé qu’il exigerait, lors des négociations avec les Palestiniens après Annapolis que tout futur Etat palestinien « reconnaisse Israël comme l’Etat des Juifs » (www.desinfos.com/article.php?id_article=8525)/ « Etat des Juifs » ou « Etat juif » ?

La presse ne semble pas faire la différence : Guysen titrait « Israël, Etat juif », cependant que, dans la suite de l’information diffusée, il était question de l’ « Etat des Juifs », comme nous l’avons relevé.

De son côté, selon Le Monde, dans son édition du 14 novembre, Ehoud Olmert aurait déclaré : « Je n’ai pas l’intention d’accepter un quelconque compromis sur l’exigence de l’Etat juif »,

Comme on le sait, c’est Théodore Herzl, père du sionisme moderne, qui le premier avait évoqué, dans son livre, paru en 1896, «  Der Judenstaat  » (l’Etat des Juifs), bien que selon le professeur israélien Claude Klein, qui publia, en 1990, une nouvelle traduction de l’ouvrage, aux Editions de La Découverte, les deux expressions sont, en allemand, équivalentes (p. 10). Mais, l’idée de Herzl était bien de promouvoir la création d’ « un Etat pour les Juifs » (p. 15), Notons, au passage, que Herzl n’avait pas, pour sa part, obligatoirement situé cet Etat dans la région où existèrent, autrefois, le Royaume d’Israël et le Royaume de Judée (une implantation en Ouganda fut même envisagée).

La nuance est, cependant, d’importance, car il nous semble que mettre l’accent sur un « Etat juif » conduit à poser comme postulat, ce qui n’a pas encore été consacré dans le système juridique israélien, ce que rappelle implicitement l’Encyclopédie Wikipedia, qu’ « Israël est un Etat fondé sur la Bible, la loi et la culture juive, promouvant le judaïsme dans l’éducation, appliquant l’observance de la cacherout et du shabbat et dont la culture serait juive ». ( fr.wikipedia.org/wiki/État_juif#.C3.89tat_juif_ou_.C3.89tat_des_Juifs.3F).

Autrement dit, à l’heure actuelle, bien que certains le regrettent, mais la question est toujours en suspens, Israël n’est pas un Etat théocratique, reposant sur la loi juive (Halakha)

Nous ne reviendrons pas sur ce que nous écrivions, il y a quelque temps, ici même, sur la notion de « peuple juif » (www.desinfos.com/impression.php?id_article=7436). Et comme l’indique le site officiel du Ministère des affaires étrangères israélien « Israël est la patrie d’une population extrêmement diversifiée du point de vue ethnique, religieux, culturel et social. Une nouvelle société aux racines anciennes est encore aujourd’hui en cours d’unification et en pleine évolution. Sur 7 millions de personnes, 76,2% sont juifs, 19,5% sont des Arabes (principalement musulmans) et le reste (4,3%) comprend des Druses, des Circassiens et d’autres non classés selon la religion. (information à jour au 1er octobre 2006, sur www.mfa.gov.il/MFAFR/Facts%20About%20Israel/SOCIETE).

De fait Israël est plutôt, pour reprendre la présentation de Wikipédia, « un Etat des Juifs, semblable aux autres Etats, strictement laïc mais, avec cette particularité qu’il garantirait un asile aux Juifs quel que soit leur degré d’observation religieuse ou d’affiliation culturelle ».

Dans ces conditions, il paraît évident que les dirigeants israéliens, quelle que soit leur appartenance politique, ne peuvent accepter un retour « physique » de tous les réfugiés palestiniens, qui le désireraient dans les limites actuelles de l’Etat d’Israël, car cela serait de nature à déstabiliser la société israélienne.

Or, c’est bien ce que veulent les dirigeants palestiniens qu’ils soient du Hamas ou du Fatah. Ainsi, le préalable posé par Ehoud Olmert a immédiatement été rejeté par Saëb Erakat, proche conseiller de Mahmoud Abbas, au motif qu’il n’y aurait pas « d’Etat dans le monde qui lie son identité nationale à une identité religieuse ».

En réalité, ce conseiller de Mahmoud Abbas feint d’ignorer qu’il y a, au moins, l’Iran qui se présente, officiellement, comme un Etat islamique et que plusieurs Etats adoptent la loi islamique (Charia).

D’ailleurs, le journal Le Monde précise, après l’évocation de la réaction de Saëb Erakat, sans indiquer s’il s’agit de ses propres termes : « de fait, cela consisterait à écarter des pourparlers un point important qui est l’épineuse question du retour des réfugiés ».

Et c’est là que réside tout le problème.

Certes, une multiplicité de préalables rendrait impossible, voire inutile, une négociation, mais il est évident qu’à tout le moins Israël ne peut accepter d’ouvrir une négociation sur le point de savoir si ce sont les réfugiés palestiniens (qui au départ, en 1948, étaient environ 500 000 et aujourd’hui plusieurs millions) qui seront libres de choisir de revenir, ou plutôt de venir là où ils vivaient (ou plutôt là où leurs parents voire leurs grands-parents vivaient).

Ce que le Premier ministre israélien voulait dire en évoquant, implicitement, la formule de Théodore Herzl, c’est que submergée par une population non juive la majorité juive actuelle de l’Etat d’Israël ne serait plus chez elle.

Malheureusement, comme le dit un vieux proverbe français du XIVème siècle, il n’est pire aveugle que celui qui ne veut pas voir ou de pire sourd que celui qui ne veut pas entendre.



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