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La guerre de Six jours et le droit international
par David Ruzié, professeur émérite des universités, spécialiste de droit international
Article mis en ligne le 6 juin 2007

S’il est vrai que même du côté israélien, il existe une déception certaine au vu de la situation, quarante après ce qu’il est convenu d’appeler « la guerre de 6 jours » (et non la guerre des 6 jours), il n’en demeure pas moins que, contrairement, aux accusations lancées contre Israël, ce pays n’en est pas seul responsable.

Pour notre part, nous voudrions souligner le bien-fondé de la thèse israélienne, au regard du droit international au moment du déclenchement de cette guerre, thèse qui n’est guère répandue, dans les médias, à l’heure actuelle.

Ceci est d’autant plus regrettable que cela conforte un certain nombre des points de vue soutenus par les gouvernements israéliens jusqu’à ce jour.

A peine relèvera-t-on que dans le Courrier international - repris par Matinplus , le 31 mai - Elie Barnavi, historien et ancien ambassadeur d’Israël en France, a écrit : « Cette guerre a été une nécessité - une guerre juste, s’il en fut ».

De fait, il ne faut, effectivement, pas réécrire l’histoire : « Israël n’avait tout simplement pars le choix ».

A l’époque, l’Egypte massait des troupes dans le Sinaï, après avoir obtenu des Nations Unies le retrait des casques bleus, qui, en 1957, au lendemain de la guerre du Sinaï, avaient été disposés dans la presqu’île, en vue de garantir à Israël l’accès du détroit de Tiran.

Or, Israël avait prévenu que toute tentative de bloquer à nouveau l’accès de ce détroit, seule possibilité de desservir le port d’Eilat, alors que le canal de Suez lui était interdit - au mépris du droit international - serait considéré comme un casus belli .

Au nord d’Israël, existait la menace syrienne, caractérisée non seulement par les facilités accordées à des bandes armées pour s’infiltrer à l’intérieur d’Israël, mais, aussi, et surtout, par les bombardements incessants en territoire israélien, depuis les hauteurs du Golan - comparables aux lancements actuels de Qassam sur Sderot.

C’est, dans ces conditions, que le 5 juin au matin Israël se lança dans ce qu’il faut bien appeler une action de « légitime défense préventive », alors qu’une double menace pesait, ainsi, sur lui au sud et au nord.

Ce fut une innovation, dans le droit international, qui jusqu’alors ne connaissait que la légitime défense contre une agression déclarée.

Il n’est pas inutile de rappeler que, quelques quarante-huit heures auparavant, dans Le Monde du 3 juin 1967, René Cassin, président de l’Alliance Israélite Universelle, qui, en tant que président de la Cour européenne des droits de l’homme, devait, l’année suivante, recevoir le prix Nobel de la Paix, publiait un article où, de façon prémonitoire, à propos de « Qu’est-ce que l’agression ? », il justifiait l’initiative israélienne.

En effet, devant la presse mondiale, le président Nasser venait de déclarer que c’est « l’existence même d’Israël qui constitue une agression et ne saurait être plus longtemps supportée ».

Et se référant aux thèses soviétique et syrienne, lors des discussions aux Nations unies sur la définition de l’agression, qui évoquaient, l’une, les « mesures de pression économique portant atteinte à la souveraineté de l’Etat » et l’autre, la « tolérance à des organisations pour utiliser le territoire comme base d’opérations au point de départ en vue d’incursions », le grand juriste français écrivait : « On dirait vraiment que, dans ces divers documents, tout est prévu pour offrir d’avance à l’Etat d’Israël, la possibilité d’invoquer les actes d’agression de ses voisins ».

Et René Cassin ne savait pas encore que la Jordanie, malgré les mises en garde qu’Israël fit parvenir au roi Hussein, allait, à son tour, s’engager ouvertement dans le conflit, espérant profiter de ce qu’Israël était aux prises avec ses ennemis au nord et au sud, pour accroître sa présence sur le flanc est, et notamment à Jérusalem.

Comme l’on sait, mal lui en a pris, car la Guerre de six Jours marqua le refoulement de la Jordanie au delà du Jourdain. Et, tirant lui-même, en quelque sorte, les leçons de l’histoire, Hussein renonça en 1988 à toute prétention sur la Cisjordanie, qu’il avait, pourtant annexée (sans pour autant faire de Jérusalem-Est sa capitale).

Et si, en 1979, dans le cadre d’un traité de paix, Israël restitua à l’Egypte l’intégralité du Sinaï, en 1994, dans le cadre du traité de paix avec la Jordanie, Israël n’avait aucun territoire à restituer (notons, au passage, que pour normaliser la frontière entre les deux pays, des échanges, limités, de territoires furent décidés).

C’est ainsi que se pose, depuis, juin 1967 la question du statut juridique des « territoires disputés » au delà de la ligne de cessez-le-feu (dite Ligne verte), qui avait été adoptée, en 1949, dans le cadre de l’accord d’armistice conclu, à l’époque, par Israël, au lendemain de la guerre d’indépendance.

Il ne faut, en effet, pas perdre de vue qu’en 2007, la situation au Moyen Orient est encore tributaire des séquelles de la Première guerre mondiale et plus précisément de l’absence de solution complète et définitive appliquée, dans cette région, aux possessions de l’Empire ottoman, puissance vaincue.

Les différents sandjaks et willayets ottomans furent, au début des années 20, regroupés sous l’appellation de Syrie, Liban et Palestine et placés sous mandat de la Société des Nations.

Seules la Syrie et le Liban accédèrent, par la suite, à l’indépendance (encore que, pour ce dernier pays, on peut, légitimement s’interroger sur la signification de ce mot eu égard aux pressions syriennes qu’il continue de subir).

Reste le sort de la « Palestine » (résurgence de l’appellation romaine, alors que ce territoire ne constituait pas une entité juridique homogène, à l’époque ottomane).

Or, comme l’on sait, le plan de partage, dont 2007 marquera, en novembre prochain, le soixantième anniversaire ne fut pas accepté par le monde arabe, alors que ce plan, prenant en compte le fait que ce territoire n’avait jamais constitué, depuis la chute du Royaume de Juda, une entité indépendante, si l’on met à part l’épisode, sans aucune base légitime, du Royaume franc de Jérusalem, au XIème siècle, faisait place, en quelque sorte, au droit des peuples à disposer d’eux mêmes.

Ce plan permettait, à la fois, de donner à la population arabe locale, dont une partie venait, cependant, des territoires voisins de se constituer en une entité indépendante, et de consacrer l’existence d’un Foyer national juif, promis par le plan Balfour, en 19I7.

Certes, s’agissant de Jérusalem, l’Assemblée générale des Nations Unies prenait quelque liberté avec ce droit à l’émancipation nationale proclamé par la Charte de 1945, puisqu’elle en faisait, à l’époque, un corpus separatum , sans tenir compte de l’existence d’une majorité juive, qui n’aurait pas manqué de se prononcer pour le rattachement à l’Etat juif.

C’est d’ailleurs l’occasion de rappeler que jamais cette ville n’avait été, toujours en omettant la supercherie de Godefroy de Bouillon, la capitale d’un Etat autre que d’un Etat juif.

Nous ne répéterons jamais assez que ce n’est pas l’affirmation, non étayée - voire, au contraire, contredite par le texte de l’armistice de 1949 - des juges de la Cour internationale de La Haye, en 2004, qui ont considéré que la Ligne verte constituait une frontière et que de ce fait Israël occupait une partie de la Palestine, qui permet, à elle seule, de considérer que cette entité existe, d’ores et déjà, au regard du droit international.

Pour qu’il y ait un Etat, au regard du droit international, il faut une population, des pouvoirs publics (en l’occurrence, l’Autorité-sic palestinienne) et surtout un territoire délimité par des frontières.

Or, on admettra d’autant plus difficilement de suivre les juges de La Haye qui ont estimé que cette frontière existait, par référence à la ligne d’armistice de 1949 que les Israéliens ont effectivement franchie, en juin 1967, qu’indépendamment du texte de 1949 les représentants jordaniens ont réaffirmé, à plusieurs reprises, par la suite, que cette ligne de cessez-le-feu ne constituait pas une frontière.

De plus, on ne comprendrait pas pourquoi la résolution 242 du Conseil de sécurité de novembre1967 se serait référée à des frontières « sûres et reconnues », si celles-ci existaient déjà.

Pour terminer, il faut également rappeler à l’heure où Israël est, à longueur de colonnes de journaux, accusé, à nouveau, de tous les maux, liés à son « occupation de la Palestine » (sans que d’ailleurs, parfois, on prenne soin de préciser que l’on ne vise pas ce faisant toute l’étendue entre la Méditerranée et le Jourdain et que l’on admet l’idée qu’Israël ne soit pas une « parenthèse de l’histoire »), que dès les lendemains de la Guerre de Six jours, le gouvernement israélien proposa de se retirer de tous les territoires, en échange de la paix.

La réponse arabe fut le triple non du Sommet de Khartoum en septembre 1967 : non à la reconnaissance, non à la négociation et non à la paix.....

De cela, il n’y a guère que le Hamas qui s’en souvienne et qui persévère dans son refus de toute paix : au mieux il accepterait une trêve de « longue durée » (10 ans....).

Nous ne considérons pas - mais ce n’est qu’un avis personnel - qu’Israël est en « droit » de « conserver » tous les territoires placés sous son autorité depuis la Guerre de Six jours. Mais nous estimons qu’on ne peut lui imposer, unilatéralement, de se retirer de tous les territoires (d’autant plus que la version anglaise - faisant foi - de la résolution 242 précitée évoque le retrait « de » territoires), sans aucune garantie quant à des « frontières sûres et reconnues ».

Bref, on en est, effectivement, 40 ans après, encore au stade où Israël, au regard du droit international, est fondé à n’accepter de négocier qu’avec ceux qui renoncent à la violence à son égard et qui reconnaissent son droit à l’existence.



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