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La France : la fuite en avant
par David Ruzié, professeur émérite des universités, spécialiste de droit international
Article mis en ligne le 2 août 2006

La France a fait savoir qu’elle ne participerait pas à la réunion demandée par le Secrétaire général des Nations Unies et qui, initialement programmée pour lundi dernier (v. ici même le 30 juillet), devrait se tenir jeudi 3 août.

Ce n’est pas la première fois que la France pratique ainsi la « politique de la chaise vide », lorsqu’elle veut saboter une initiative.

Ainsi, en 1965, le Général de Gaulle avait invoqué un prétexte à propos du financement de la politique agricole commune pour tenter, en réalité, de paralyser la progression de la réalisation du marché commun.

L’absence du représentant de la France au Conseil des ministres européen était restée sans effet et quelques mois plus tard, la France reprenait sa place.

Il en sera, sans doute, de même de la « réunion préliminaire - si elle est maintenue - de jeudi.

Le monde peut fonctionner - tant bien que mal - même sans la France.

En réalité, on peut se demander si ce « boycott » ne cache pas ce que le Figaro du 1er août annonçait sous le titre (p. 2) « Force internationale : la France prudente ».

Car, il s’avère que les autorités françaises, qui avaient pourtant lancé l’idée d’une telle force, même si sa mise en place ne devait intervenir qu’en troisième lieu (v. ici même le 1er août) ont réalisé, après coup, qu’ils n’avaient peut-être pas « les moyens de leur politique ».

Tablant sur une force internationale de 10 000 à 20 000 hommes, la France aurait dû en fournir environ un tiers des effectifs (soit au maximum 5 000 hommes).

Or, il y a déjà, à l’heure actuelle, 13 000 hommes déployés en opérations extérieures, et comme le soulignaient les experts militaires consultés par Le Figaro , la multiplicité des lieux d’engagement posait des problèmes au niveau des structures de commandements et des moyens de transmission.

Et, indépendamment du problème posé par la définition de la nature même de la mission impartie à cette force (établissement d’une zone tampon, contrôle des frontières, zone de non-survol, contrôle de zone terrestre...), des moyens de haute technologie s’avèreraient nécessaires, ne serait-ce que pour protéger les troupes d’engins explosifs improvisés, largement utilisés par le Hezbollah.

Aussi, est-on en droit de se demander si l’une des raisons pour lesquelles la France place l’envoi de cette force internationale en dernier lieu ne vise pas à retarder le plus possible le moment où des choix politiques (mission de la force) et techniques (moyens à mettre en place) devraient être examinés.

D’où cette insistance à demander, avant toute chose, un cessez-le-feu, qui comme nous l’avons déjà souligné - et nous ne sommes pas seul - ne résoudrait rien.

A cet égard évoquons une devinette, qui a cours en ce moment :

« Que se passerait-t-il si les Arabes déposaient les armes ? Ce serait la paix.

Que se passerait-il si les Israéliens déposaient les armes ? Ce serait la disparition d’Israël ».

La France en arrive même à se contenter d’une demi-victoire sur le tapis vert, au risque d’illustrer ce que nous appelions, hier, « Le monde à l’envers ».

En effet, lors ds la réunion à Bruxelles des 25 ministres des affaires étrangères de l’Union européenne, la France, n’ayant pas réussi, malgré son forcing, à obtenir un appel à un cessez-le-feu immédiat, a obtenu que le communiqué final mette « la charrue avant les bœufs ».

En effet, les 25 appellent à une « cessation immédiate des hostilités », suivie par un « cessez-le-feu durable ».

Or, chacun sait que dans la pratique c’est une décision de cessez-le-feu qui entraîne, pratiquement, sur le terrain un arrêt des hostilités et non l’inverse.

Il est évident qu’un cessez-le feu durable ne peut être obtenu que par un retrait du Hezbollah suivi de son désarmement, ce qui ne peut être réalisé sans intervention extérieure.

Le gouvernement libanais, même s’il en avait la volonté est, en effet, incapable de mener à bien cette tâche pour deux principales raisons.

Tout d’abord, indépendamment du fait qu’il comprend deux ministres du Hezbollah, il doit tenir compte du fait que cette faction peut se fonder sur l’appui de près de 30% de la population libanaise qui est de confession chiite.

Cette adhésion d’un pourcentage important de la population permet au Hezbollah de disposer de facilités parmi les civils d’autant plus que, un peu comme pour le Hamas, dans les Territoires, ce mouvement assure aux habitants de nombreux services sociaux et éducatifs, que les autorités officielles se révèlent incapables d’assurer.

En second lieu, et surtout, le gouvernement libanais ne peut compter sur son armée. Comme le relevait l’envoyée spéciale du Monde , dans son édition du 20 juillet, « « l’armée libanaise n’est en mesure ni d’affronter Israël, ni de désarmer les combattants chiites ».

Comprenant de 15 000 à 20 000 hommes, elle ne dispose que de « matériels vieux, voire obsolètes ».

De plus la composante religieuse de cette armée ne contribue pas en assurer sa fiabilité.

En effet, les officiers sont à parité chrétiens et musulmans (sunnites et chiites), mais la troupe est majoritairement composée de chiites.

Et la journaliste du Monde ne manquait pas de remarquer que « pendant plus de vingt ans, l’armée a été sous influence de la Syrie, qui contrôlait le recrutement, les promotions et le choix des postes pour les officiers ».

Et de conclure qu’il n’est pas exclu, d’ailleurs, que « certains éléments de l’armée seraient dès à présent impliqués dans les transferts d’armes à destination des combattants du Hezbollah ».

Dans ces conditions, un cessez-le-feu ou un arrêt des hostilités qui n’aurait pour résultat que de permettre au Hezbollah de reprendre son souffle serait la pire des solutions.

On comprend qu’Israël, le premier intéressé à un cessez-le-feu durable n’en veuille pas.

Il faut donc bien que la communauté internationale, n’en déplaise à la France, assume ses responsabilités.



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