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Quatre questions à Richard Prasquier, président du Keren Hayessod France et président d’honneur du CRIF.
Hélène Keller-Lind
Article mis en ligne le 9 avril 2015

Hélène Keller-Lind :

Le jugement de Dzhokhar Tsarnaev, l’un des deux terroristes islamistes qui ont tué lors du Marathon de Boston vient d’être rendu. Ce terroriste « d’origine intérieure » a été reconnu coupable. Internet a joué un rôle essentiel dans sa formation. Qu’en pensez-vous ?

Richard Prasquier :

Il a été reconnu coupable sur les trente chefs d’accusation. Le verdict sera porté ultérieurement. L’attorney général avait insisté pour que le procureur requière la peine de mort. Le laxisme n’est donc pas de mise, y compris au sein de l’administration Obama.Ce qu’il faut souligner est le parcours de ces deux frères, d’origine tchétchène, élevés en Asie centrale, recueillis avec leurs parents comme réfugiés aux États-Unis.Ce pays leur a donné toutes leurs chances. Dzhokhar a été naturalisé américain et paraissait bien intégré. Il n’y a aucune possibilité, n’en déplaise à nos sociologues Bourdieusiens et leur grille de lecture binaire oppresseurs/opprimés, de faire des Tsarnaev des victimes de la société. Ils ont fait le choix de l’Islamisme radical et des assassinats de mécréants. L’endoctrinement de Dzokhar Tsarnaev par son frère aîné, islamiste violent, tué au cours d’une chasse à l’homme, est évident, et son implication religieuse personnelle semble particulièrement superficielle. Raison de plus pour réfléchir sur les mécanismes du passage à l’acte. En ce qui concerne Internet, il semble que ce soit plutôt le frère aîné qui y a recherché des techniques terroristes particulières. En tout cas, Internet joue un rôle très important, on le sait, et de plus en plus même les Américains admettent plus qu’avant la nécessité d‘en contrôler les dérives, mais ce n’est pas un rôle unique : ni Merah, ni Nemmouche, ni les frères Kouachi ne semblent s’être radicalisés sous l’influence d’Internet.

H.K-L. :Comment lutter contre cet endoctrinement visant des jeunes gens nés et élevés en occident ? Où sont les failles ?


R.P. :

En ce qui concerne les auteurs de ces actes, le devoir de l’État est de les mettre hors d’état de nuire, ce qui signifie dans notre pays qui a aboli il y a longtemps la peine de mort, de les empêcher au cours d’une incarcération aussi longue que possible toute possibilité de « contaminer » ceux qui se trouveraient à leur contact. Il y a beaucoup à faire dans ce domaine, on dit que la prison est devenue en France l’université de la radicalisation , le lieu d’où un petit trafiquant de haschich peut ressortir djihadiste. Chacun le sait depuis des années. Le gouvernement bien qu’il ait vraiment pris la mesure du danger terroriste n’a pas jusqu’à maintenant envisagé une une complète transformation du système carcéral et de ces dérives. La crise ne favorise pas les investissements pénitentiaires...
Ce n’est pas, en général, la prison qui peut être envisagée pour tous ceux qui n’en sont qu’à un « délit d’opinion » (le suis Kouachi et pas Charlie, etc….) . Ils sont dans les écoles plus nombreux que ne veut bien admettre l’Administration : dans plusieurs centaines de classes - et notamment là où elle aurait eu le plus de sens- il n’y a pas eu de minute de silence après les attentats de janvier, soit que les élèves aient protesté, soit que plus souvent encore, les professeurs l’aient remplacée par une plus anodine causerie « pour ne pas choquer » certains . Cette auto-censure, quels qu’en soient les prétextes est l’ornière de laquelle nous devons absolument sortir, car elle est le prélude à toutes les lâchetés.
L’accent doit être mis à l’école , non pas sur d’illusoires « cours sur les religions », le prototype de l’idée qui va consommer du temps et de l’énergie pour rien, mais sur le soutien donné à ceux des professeurs qui luttent, souvent de façon isolée, pour inculquer les savoirs, les traditions républicaines et les valeurs sociétales et non tribales. L’efficacité des mécanismes d’endoctrinement, d’autant plus grande que le message est débile, le prétexte de l’humiliation mis en avant de la moindre critique, le recours continuel à la théorie du complot, la valorisation des pulsions destructrices, la fascination pour le meurtre des hérétiques comme garantie de l’au-delà, tous ces éléments qui sont en jeu aujourd’hui ne sont pas uniquement des dangers pour les Juifs. il n’est même pas besoin d’insister sur l’incroyable violence de la haine des Juifs inscrite au cœur de l’islamisme radical, une haine dépassant malheureusement le groupe de ses sectateurs. Mais ces éléments font courir le risque de bouleversements majeurs dans la société, dont la crétinisation violente risque d’être un marqueur terrible.
Ce sont toutes les voies de la psychologie sociale, comportementale qui doivent aussi être mises en route dans un cadre géographique pertinent, la commune plutôt que le pays tout entier, car les problématiques ne sont pas les mêmes. Nous n’y sommes pas. Il faut une vraie recherche sur le sujet avec les meilleurs spécialistes en utilisant les précieux avis des acteurs sur le terrain et non pas des idéologues péremptoires.

H.K-L. : Le Plan d’action contre le terrorisme élaboré en France vous paraît-il adéquat ?

R.P. :

Nous en connaissons probablement les grandes lignes. Nous pensions que ce plan serait dévoilé dès la fin mars. Les responsables savent les enjeux ; ceux-ci sont majeurs pour la société et pas uniquement pour l’avenir des Juifs en France. Espérons…Le diagnostic est simple (encore faut-il vouloir le faire), mais pour le traitement, qui connaît la panacée ?…...

H.K-L. : En matière de politique étrangère, que pensez-vous du pré-accord signé par les 5 +1 avec la République Islamique d’Iran ?

R.P. :

En fait on ne sait pas du tout ce qui a été signé et ce qui ne l’a pas été. C’est en juin que pourrait être signé un vrai document. Chaque journée nous apporte de nouveaux témoignages des interprétations manifestement très différentes par les négociateurs iraniens et les « négociateurs » américains. Pour ces derniers, je mets le mot avec des guillemets car on se demande ce que les Américains ont effectivement négocié. Cela ajoute à l’angoisse.
Toutes les avancées prétendues reposent sur la bonne volonté des Iraniens.
Il ne devrait y avoir personne pour envisager une seconde que les Iraniens vont respecter des promesses qu’ils disent eux-mêmes d’emblée ne pas avoir faites. Personne pour penser une seconde que l’AIEA aurait tous les moyens pour évaluer tous les sites et détecter à temps toute anomalie. Personne pour considérer une seconde que cet accord marque la victoire des « modérés » (Rouhani) contre les « durs », alors que le Guide Khamenei a été continuellement en contrôle et que les dirigeants militaires ne se sont pas fait prier pour déclarer que la destruction d’Israël était un but « non-négociable », sans que cela ne soulève d’émotion particulière...
Certains espèrent que le retour de l’Iran dans le giron commercial international donnera un levier à ceux qui veulent transformer le régime. Mais Khamenei et les gardes révolutionnaires connaissent ce risque ; ils ont analysé les erreurs de Gorbatchev et ils seront encore plus forts maintenant pour étouffer toute tentative interne de révolte contre leur domination.
Ils ont également écouté les déclarations de Bill Clinton en 1994, se félicitant que les négociations avec la Corée du Nord avaient abouti à un magnifique succès et que celle-ci renonçait à son arsenal atomique…
On a vu ce qu’il en a été. Le passé donne des leçons claires : elles nous interdisent la sérénité…….



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