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Une plainte audacieuse contre Israël devant les tribunaux américains
David Ruzié, professeur émérite des universités, spécialiste de droit international
Article mis en ligne le 11 décembre 2005

Le dernier Bulletin d’information de la Société américaine de droit international rend compte, brièvement, d’une action menée devant la justice américaine par un « groupe de Palestiniens anonymes » (sic) et dirigée contre l’Etat d’Israël, son gouvernement et des responsables militaires.

La Cour du district de Columbia, dans l’affaire John Doe I et al. V. State of Israel et al., a, le 10 novembre dernier, rejeté les nombreux moyens qui avaient été soulevés (www.asil.org/ilib/2005/12/ilib051201.html#j3).

Il n’est pas inintéressant d’évoquer cette affaire qui, curieusement, ne semble pas avoir été fondée sur l’avis émis par la Cour internationale de justice le 9 juillet 2004.

Rappelons que, dans cet avis, dépourvu de toute force obligatoire, les juges de La Haye avaient conclu à l’illégalité de la construction de la « barrière de sécurité ».

Ils avaient donc estimé que Israël devait démanteler l’ouvrage déjà construit et réparer tous les dommages causés par la construction du « mur » (les juges ayant repris la phraséologie de l’Assemblée générale des Nations unies) (v. notre Point de vue du 11 juillet 2004 sur www.desinfos.com).

La plainte contre l’Etat et le gouvernement israéliens a été déclarée irrecevable en raison de l’immunité de juridiction, dont bénéficie toute autorité officielle étrangère devant les tribunaux d’un pays étranger.

Vainement, les plaignants soutenaient que cette irrecevabilité ne pouvait être invoquée, au motif qu’ils invoquaient la violation d’une « norme impérative de droit international » (jus cogens).

Pour le tribunal américain la question d’une violation d’une norme impérative de droit international n’était pas « justiciable », c’est à dire qu’elle ne pouvait être soulevée devant lui.

D’ailleurs, en tout état de cause, en admettant même qu’Israël ait violé une norme de droit international, cela ne constituerait pas une exception à l’immunité de juridiction.

Vainement les plaignants firent valoir que cette immunité ne pouvait exister, alors qu’il s’agissait d’une activité de nature « commerciale ».

De fait, seuls les « actes de puissance publique », à l’exception des « actes de pure gestion » (comme des activités commerciales) sont « protégés » par l’immunité de juridiction, dont peut se prévaloir un Etat étranger devant les tribunaux d’un autre pays.

Mais, la Cour ne retint pas l’argument aux termes duquel les initiatives israéliennes en Cisjordanie (West Bank) avaient pour effet d’empêcher le « développement de la propriété privée ».

La justice américaine a, également, écarté l’exception d’ « acte délictueux » (tortious act), du fait que le tort causé n’avait pas été commis sur le sol américain.

De plus, les juges américains ont considéré qu’ils n’avaient pas compétence parce que le conflit israélo-palestinien, en cause dans cette affaire, constituerait une question politique et que selon la doctrine des questions politiques, celles-ci ne sont pas justiciables.

Rappelons que, précisément, l’erreur (pour ne pas dire la faute) commise par les juges de la Cour internationale de justice a été de se déclarer compétents, alors que la question qui leur était posée supposait réglée la question préalable - de nature politique, donc échappant à leur compétence - de l’existence ou non d’une frontière avec la Palestine.

La plainte devait également échouer sur la base de la doctrine de l’Act of State, c’est à dire de la notion d’acte d’autorité, c’est à dire de puissance publique, accompli par un Etat étranger sur son propre territoire.

Enfin, nous relèverons que les réclamants n’ont pas craint d’invoquer la législation adoptée au début des années 70, aux Etats-Unis, pour lutter contre les activités mafieuses.

La loi « RICO » (Racketeering Influenced Corrupt Organizations Act) permet, certes de lutter contre les actes d’extorsion et de corruption et avait, d’ailleurs été invoquée, il y a quelques années par l’Union européenne lorsqu’elle avait voulu poursuivre des fabricants de tabac américains accusés de contrebande en Europe.

Mais, la Cour n’a pu que constater que cette loi ne pouvait recevoir application hors du territoire américain et a estimé qu’elle « ne devait pas être transformée en une avenue visant à juger toutes les crises politiques de la planète » (traduction libre de notre part de « may not be transformed into an avenue through which to litigate political crises of the global community ».

Quelle belle leçon donnée aux juges belges qui, sur la base d’une loi dite de « compétence universelle », par la suite, modifiée, avait cru pouvoir, il y a quelques années, engager des poursuites contre le Premier ministre israélien !

(Les lecteurs non juristes voudront bien nous pardonner cette analyses quelque peu technique, qui permet, toutefois, de montrer jusqu’à quel degré de perversité certains manipulent le droit à des fins idéologiques).



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