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Meurtres et surprises des Jihadistes
Par Sami El Soudi © Metula News Agency
Article mis en ligne le 3 août 2005

Pendant que les préparatifs du retrait israélien dans la bande de Gaza se font de plus en plus visibles, ce qui accapare la scène palestinienne ce sont les retombées du tir de Qassam raté d’hier soir.

Le missile tiré par les terroristes du Jihad Islamique Palestinien était censé exploser parmi la foule de manifestants juifs anti-désengagement réunis dans la ville israélienne de Sdérot. Mais de fait, le Qassam est tombé à quelques centaines de mètres de sa cible, sur une maison arabe de Bet Hanoun.

Un enfant de six ans a été tué sur le coup, alors que huit Palestiniens supplémentaires, d’autres enfants en majorité, ont été blessés par la même salve. L’un d’entre eux se trouve ce matin dans un état critique.

Plusieurs éléments viennent augmenter la portée de ce meurtre et, parmi ceux-ci, le fait que la plupart des victimes appartiennent à la famille de l’ex-ministre de l’Autorité Palestinienne pour les Affaires des Prisonniers détenus en Israël, Monsieur Hisham Abdel Razek.

Dans un récent communiqué à l’Associated Press, le Jihad a fait savoir qu’il s’agissait d’un « incident malheureux » mais quelques minutes plus tard, la même organisation affirmait étrangement n’être pour rien dans le tir de cette roquette.

En tous cas, ce meurtre amène de l’eau au moulin de l’Autorité Palestinienne, qui est engagée depuis plusieurs semaines dans une large campagne médiatique pour faire cesser les tirs de Qassam et de mortiers. Des spots à la télévision démontrent, noms et chiffres à l’appui, que la majeure partie des victimes des terroristes n’est pas constituée d’Israéliens mais de civils palestiniens. Creusant dans la même veine, le ministre Mohammed Dahlan affirmait ce matin, sur tous les medias de Gaza et de Cisjordanie, que « ceux qui ont tiré ces roquettes prennent la place de l’occupant israélien et blessent des civils palestiniens ».

Les réunions d’urgence se multiplient ce matin à Gaza. Ainsi, les cadres de la sécurité de l’AP sont enfermés depuis l’aube et discutent des mesures répressives à prendre. Des ministres participent à un autre meeting, tandis qu’une rencontre « entre toutes les composantes palestiniennes », selon l’expression consacrée, se tient en parallèle.

A l’ordre du jour : l’apaisement et la discussion des mesures devant permettre que le retrait israélien se déroule dans le calme. En fond de toile, les mises en garde très précises de Shaoul Mofaz, le ministre de la défense de Jérusalem, qui a informé par toutes les voies possibles - bureaux de coordination militaires, AP et medias - que tout acte hostile de la part des organisations terroristes durant le désengagement serait réprimé par l’IDF avec une fermeté inconnue jusqu’à maintenant. En fond de toile également, les arrestations massives, elles se comptent par dizaines d’individus, de membres des réseaux terroristes du Jihad Islamique. Ces captures, effectuées chaque nuit dans les villages de Cisjordanie depuis l’assassinat collectif de Netanya, ont pratiquement décapité toutes les cellules opérationnelles de l’organisation islamiste dans la région concernée.

Ces mesures aux effets concordants ont donné lieu à une série de réactions surprenantes de la branche politique du Jihad. Tout d’abord par la voie d’un communiqué passé à l’agence de presse française, sympathisante des thèses islamistes, l’AFP, dans lequel le Jihad annonce avoir donné l’ordre de cesser de tirer sur des objectifs israéliens durant les opérations de désengagement.

Dans le même message, l’organisation islamique et islamiste tient à préciser que « sa direction a ordonné il y a trois jours à tous ses groupes de cesser de tirer des roquettes afin de préserver le projet national palestinien durant cette conjoncture critique et historique ».

Les observateurs auront remarqué que cet « ordre antidaté », avisé a posteriori, a pour mission principale de tenter de dégager la responsabilité du Jihad du meurtre d’hier soir. Dans les milieux dirigeants palestiniens c’est cependant peine perdue, tout le monde restant convaincu que le Qassam tueur est sorti des tubes de cette organisation. Dans les mêmes cercles, on n’accorde qu’une très faible fiabilité aux déclarations du Jihad, rappelant qu’il était signataire de la Hudna avec l’AP, la trêve, il y a un an, ce qui ne l’a pas empêché de commettre et de tenter de perpétrer des dizaines d’actes terroristes, dont l’assassinat-collectif-suicide de Netanya il y a un mois.

Désormais, craignant une réaction musclée des forces de sécurité officielles, le Jihad fait acte d’allégeance à Mahmoud Abbas au pas cadencé, déclarant notamment au bureau de l’AFP de Marius Schattner que l’organisation « désirait que le désengagement se déroule de façon pacifique ».

Plus surprenante encore est l’interview concédée par l’un des chefs de la branche politique du Jihad Islamique, Abdel Khalim Izzedine, surnommé Abou Qassam, à un journaliste du quotidien israélien Haaretz. Lors de cet entretien, cet individu, dont le pseudonyme signifie littéralement « le père des Qassam », affirme que son organisation « pourrait reconnaître Israël ».

Encore faudrait-il, selon Izzedine, qu’Israël cesse ses « assassinats ciblés » (terme utilisé par les officiels palestiniens, l’AFP et la quasi globalité des medias français afin de désigner les éliminations chirurgicales de terroristes avérés. Ndlr.) et les arrestations de ses membres.

Mais à ces conditions, si le Jihad participait à l’AP et que l’AP concluait un accord avec Israël, alors le Jihad pourrait reconnaître l’Etat d’Israël. Il ne s’agirait certes pas d’une reconnaissance officielle mais d’une reconnaissance de facto.

Se lançant dans une digression théorique non dénuée d’intérêt, Abou Qassam déclare que si les idéologies sioniste et celle du Jihad sont assurément inconciliables, lorsqu’Israël commence à se séparer de secteurs des territoires, le Jihad pourrait abandonner sa revendication fondamentale consistant en l’établissement d’un Etat islamique« de la rivière à la mer ».

« Chacun conservera son idéologie dans son cœur » philosophe l’islamiste, tout en n’excluant ni des contacts directs avec les Israéliens ni la menace de continuer à user de l’arme terroriste. Izzedine, qui a passé 12 ans, pour activités terroristes justement, dans les prisons israéliennes, exprime maintenant le désir « de découvrir leur côté humain... », arguant, avec un sens subit des réalités, que « chaque camp voit uniquement ce qui est négatif chez l’autre ».

Tant nos représentants officiels que les Israéliens auraient tort de négliger l’ouverture constituée par les propos du chef jihadiste. Ils interviennent certes à un moment délicat pour l’organisation islamiste, alors qu’elle risque autant les foudres de nos services de sécurité que ceux de l’armée israélienne et qu’elle craint pour sa survie. D’autre part, Izzedine exprime l’une des voix existant dans le Jihad politique de Gaza et de Cisjordanie, avec laquelle la direction en exil à Damas s’oppose totalement sur l’hypothèse d’une coexistence avec l’entité des Hébreux.

Et puis, notre problème n’est pas celui des différends intellectuels exprimés par les représentants de ces mouvements mais celui de l’exercice quotidien des attaques armées contre les civils et du refus de cette organisation d’accepter l’autorité du pouvoir sorti des urnes palestiniennes. Et encore, des islamistes « modérés » tels Abdel Khalim Izzedine ont été abondamment courtisés par des envoyés plus ou moins secrets des gouvernements français et espagnols, précisément pour qu’ils délivrent ce genre de commentaire.

Mais après avoir replacé ces déclarations dans leur contexte limitatif, il reste à constater que LE grand problème, tant de l’AP que des Israéliens, consiste à concevoir un type de coexistence non violente et durable avec les islamistes. Que l’un d’entre eux, qui n’est pas le premier venu et qui n’exprimait pas son point de vue individuel, entrevoie un schéma logique de coexistence paisible, devrait retenir notre attention !

Et peut-être faudrait-il amorcer un dialogue avec ces courants : mon ami Mahmoud Abbas n’est pas l’ennemi de la préservation d’Israël, tout le monde l’a remarqué ; et la paix se fait avec ses ennemis, pas avec ceux qui sont déjà des partenaires. Pour nous, le dialogue avec ces gens est une condition de l’accomplissement du projet national palestinien. Abbas l’a compris, qui parlemente avec eux malgré ses réticences naturelles.

Pour Sharon, ce pourrait être la condition de la sécurité de son pays à terme, vu que les islamistes au Moyen-Orient sont légions et qu’ils ne sont pas près de s’évaporer dans les nimbes, là où disparaissent les cauchemars éphémères.



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