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Un doute sur les« liaisons dangereuses » de la diplomatie Française
Article mis en ligne le 7 septembre 2004
dernière modification le 27 janvier 2005

Le soutien des autorités religieuses et communautaires musulmanes à la France pour libérer les journalistes Christian Chesnot et Georges Malbrunot, pris en otages en Irak, peut s’avérer efficace mais aussi dangereux, selon des experts

« En tournée au Proche-Orient pour sauver les otages, le ministre des Affaires étrangères Michel Barnier n’a pas hésité à s’adresser « à des acteurs non étatiques : la télévision Al-Jazira, le cheikh (islamiste d’origine égyptienne) Youssef el-Qardaoui, les hautes consciences de l’Islam, qui jusqu’à présent n’étaient considérées que secondairement fréquentables », relève Bertrand Badie, expert en relations internationales à l’Institut d’études politiques de Paris.

Les prises de position des autorités musulmanes en faveur de la France ont permis « d’espérer que de nouveaux canaux, qui étaient fermés, s’ouvrent », selon un diplomate français.

Mais, pour Bertrand Badie, il s’agit là d’« un précédent qui va peser lourd » car « il y a une modification de la technique et du style diplomatique ». « On va chercher des cautions diplomatiques chez des gens tenus autrefois à l’écart », poursuit-il. « On dit aux Etats-Unis : +Vous, vous jouez de la cannonière, nous on joue du turban+ ».
En outre, en se félicitant de la mission à Bagdad du Conseil français du culte musulman (CFCM) pour demander la libération des otages, la diplomatie a pris le risque de déléguer, selon M. Badie.

« Cette cogestion des affaires, c’est sans doute une régression du modèle jacobin et républicain », estime Bertrand Badie, pour qui cette affaire « renforce assez substantiellement la communauté musulmane en France, qui se fait un peu le substitut de la diplomatie française ».

Sans doute plus gênant, la recherche de soutiens tous azimuts dans le monde arabe a valu à la France des prises de position embarrassantes.

Le Hamas et le Jihad islamique palestiniens, des groupes terroristes pour l’Union européenne, ont appelé à la libération des Français, tout comme les Frères musulmans égyptiens ou un imam salafiste irakien, cheikh Mehdi al-Soumaydaï. Ce dernier a émis dimanche une fatwa (décret religieux) pour obtenir la libération des Français « en reconnaissance pour la position de la France en Irak ».

« Même des partis tels que le Hezbollah (le mouvement radical chiite libanais), dans les geôles duquel des Français sont morts (dans les prises d’otages des années 80 au Liban, ndlr) », ont pris partie pour la France, relève Antoine Basbous, de l’Observatoire des pays arabes.

« Il ne faudrait pas que la France apparaisse comme bénéficiant du soutien de personnes trop gênantes », relève Jean Marcou, qui dirige l’unité francophone de Sciences politiques à l’Université du Caire.

« La politique arabe de la France a joué », relève de son côté Dominique Moïsi, directeur adjoint de l’Institut français de relations internationales (IFRI), ceci alors que la France souhaitait « montrer qu’elle n’est pas engagée aux côtés des arabes radicaux ». Il souligne que sa nouvelle « diplomatie du turban » rendra cet exercice bien plus difficile.

« Si les otages sont libérés sains et saufs dans les jours qui viennent, on pourra dire que la France a bien joué ses cartes, qu’elle s’est consacrée à la libération de ses otages, contrairement à l’Italie et qu’elle a fait cela dans la douceur, contrairement à la Russie », souligne Dominique Moïsi. « Mais si la crise des otages s’éternise, le résultat pour la France sera beaucoup moins convaincant ». »



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