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Il se passe des choses
par Sami el-Soudi et Jean Tsadik © Metula News Agency
Article mis en ligne le 6 août 2004
dernière modification le 7 août 2004

Mohamed Dahlan est sorti du placard

Conclusion de trois accords

Ce vendredi, nous constatons d’importants changements dans les relations entre Israël et l’Autorité Palestinienne. Très rapidement, après les révèlations faites dans notre dernier article « Des nouvelles en rafales », rubrique « Appel à l’aide d’Arafat aux Israéliens », sur l’existence de contacts sécuritaires au plus haut niveau, ainsi que faisant suite à la confirmation de l’information par Saëb Erekat , les choses ont pris un tournant pratique. Sous l’impulsion accentuée du Premier ministre Ahmed Qoreï et en parfaite synchronisation avec ceux que nous avons pris l’habitude d’appeler les coalisés, des discussions intenses se sont déroulées et elles ont déjà abouti à trois accords en bonne et due forme.

Sdéroth-Bet Hanoun

Premièrement, l’armée israélienne s’est complètement retirée des agglomérations de Bet Hanoun et de la partie Est de Jebalyia, en échange d’un engagement Qoreï-Dahlan-Suleiman d’empêcher les tirs de roquettes sur la localité israélienne de Sdéroth. De plus, et comme nous le relations au titre des conditions israéliennes de l’évacuation de Tsahal, Qoreï et Suleiman [1] ont instruit Mohamed Dahlan de prendre le contrôle permanent des zones abandonnées par les Hébreux et d’en chasser les Brigades des martyrs d’Al-Aksa, agissant aux ordres d’Arafat, ainsi que les terroristes du Hamas, auteurs des tirs contre Sdéroth.

Dans une étrange entente, typiquement orientale, entre le Shin Bet israélien et Dahlan, il a été convenu que les lanceurs de Qassam tireraient une dernière salve en parallèle du redéploiement israélien mais que les roquettes « symboliques » tomberaient au milieu des sables du Néguev, très à l’écart des villes israéliennes. Ce qui fut réalisé, alors que huit missiles s’écrasaient dès hier dans des dunes abandonnées. L’accord prévoit en outre et à la demande de la partie palestinienne, que Tsahal ne réagirait pas en cas de tirs de provocation des partisans d’Arafat ou des intégristes islamistes. Les représentants de l’armée ont toutefois prévenu que si Dahlan se montrait incapable de respecter ses engagements ou si un tir de roquettes faisait des blessés à Sdéroth ou ailleurs, les militaires n’hésiteraient pas à réinvestir Bet Hanoun et à s’emparer de Jebalyia. Un dispositif de liaison permanent renforcé a d’ailleurs été mis en place afin « d’éviter des escalades inutiles dues à de possibles malentendus ». Les agents de la CIA en place dans la région ainsi que les émissaires du gouvernement égyptien participeront à ce dispositif le cas échéant.

Réouverture de la frontière égyptienne

Seconde mesure, la réouverture de la frontière israélo-égyptienne au point de passage de Rafah. Elle aura déjà permis, à la mi-journée, à environ 1’500 Palestiniens de la bande de Gaza de retrouver leurs foyers, après une attente pénible de trois semaines.

L’armée israélienne avait fermé le point de passage suite à des informations du renseignement militaire faisant état du creusement d’un tunnel sous le check point afin de perpétrer un assassinat collectif à l’explosif.

On s’attend ici à ce que 2’500 Palestiniens supplémentaires franchissent la frontière ces prochaines heures et jusqu’à demain soir.

Cette entente est également à mettre à l’actif d’une décision des coalisés. L’envoyé spécial de George Bush, Elliott Abrams, a joué un rôle prépondérant dans les discussions, obtenant notamment du Caire que l’armée égyptienne « accentue très sensiblement son action en vue de contrer la contrebande d’armes transitant par les tunnels de Rafah ».

Il est également prévu un rôle important dans ce dossier pour Mohamed Dahlan, sur qui les coalisés comptent pour étendre son influence dans la région limitrophe. Lorsque l’on ajoute que Yasser Arafat s’opposait résolument à la réouverture de la frontière, que les hommes de Dahlan ont pris récemment d’assaut le Q.G de Mussa Arafat à Rafah (comme par hasard), qui organisait le creusement des galeries et que l’homme fort de Gaza a fait parvenir un ultimatum au reclus de Ramallah, le menaçant ouvertement de prendre le contrôle de Gaza, on comprend aisément que rien ne pouvait faire plus plaisir à Mohamed Dahlan que le rôle que lui ont confié les coalisés.

Port d’armes de poing autorisé pour les policiers de Cisjordanie
Passant outre la vive opposition des partisans des implantations, le ministre israélien de la défense, le général de réserve Shaoul Mofaz, a donné son accord pour que les policiers palestiniens puissent être dotés « de matraques et de pistolets » et qu’ils soient autorisés à se déplacer entre les villes palestiniennes, au travers du dispositif de l’armée israélienne.

Mofaz a lui-même annoncé que cette mesure se ferait de manière très suivie et que seuls les policiers qui seront reconnus individuellement par les renseignements de l’armée pour n’avoir jamais participé à des actes anti-israéliens, seront autorisés à porter une arme. Le ministre ajoutant : « que cette décision serait implémentée graduellement et qu’elle pourra être inversée dans un laps d’une semaine si nécessaire ».

Au fond, les coalisés sont surtout soucieux de la déterioration chaotique de la situation à Jénine et à Naplouse, villes dans lesquelles les islamistes ainsi que des bandes d’électrons libres - n’appartenant ni à la tendance Dahlan ni à celle d’Arafat - profitent de leur implantation massive sur place pour faire régneur leur loi de terreur. Dans ces deux villes et en étroite coopération avec l’armée, les policiers pourraient être autorisés à faire usage de fusils-mitrailleurs, sans que cette exception ne soit rendue publique. Le général palestinien Hadj Ismaïl, le commandant de la Cisjordanie pour l’Autorité Palestinienne, fixera les détails de l’accord, la semaine prochaine, avec son homologue le général Moshé Kaplinski.
Sur ce point du renouvellement de la collaboration sécuritaire entre l’AP et Tsahal, force est également de constater que ce fut Yasser Arafat qui y avait mis un terme, réitérant, pas plus tard que voici trois semaine, son interdiction absolue aux officiers palestiniens de s’entendre avec les Israéliens.

Pas d’extension imminente de Maalé Adoumim
Dans une démarche qui n’est pas étrangère aux trois accords suscités, le Premier ministre israélien Ariel Sharon a rassuré Elliott Abrams, lui indiquant qu’Israël ne procéderait pas dans l’immédiat - en tous cas pas avant que les Etats-Unis et Israël se soient entendus sur la définition de « la croissance naturelle des implantations existantes » - à l’agrandissement de Maalé Adoumim. Sharon a précisé à son interlocuteur que la décision de relier l’implantation à la capitale, connue sous le code E1, avait été prise par feu le Premier ministre Itzkhak Rabin il y a plus de dix ans ; il a ajouté que « la confirmation de cette décision de principe rendue par le ministère de la défense, ne constituait pas non plus un fait nouveau ».

On rappelle que la décision du ministère de la défense, rendue publique la semaine dernière, avait soulevé un tollé généralisé, aussi bien à Riad, au Caire, parmi les Palestiniens modérés, qu’à la Maison Blanche. A son arrivée en Israël, Elliott Abrams avait demandé à Sharon, relayant le ton courroucé du président américain et hors protocole : « Si vous ne respectez pas l’obligation du gel des implantations, comment voulez-vous obtenir de Qoreï qu’il mette en marche la Carte Routière ? »

Un test pour Arafat et un coup de pouce à Qoreï
Les lecteurs de la Ména auront remarqué que les trois accords passés entre Israël et l’Autorité vont à l’encontre des options bellicistes imposées jusque là par Arafat. Il s’agit grandement pour les coalisés de tester les engagements concédés par le reclus de la Moukata à laisser agir monsieur Ahmed Qoreï. Toute immixtion du raïs dans le sens tendant à faire échouer la bonne réalisation de ces ententes sera interprétée par la coalition avec la plus grande sévérité. Une ingérence du Vieux dans les nouvelles prérogatives de Qoreï conduirait vraisemblablement à la démission de ce dernier et à l’éviction énergique d’Abou Ammar. Un Abou Ammar qui constate de jour en jour que les coalisés contrôlent la situation et qui voit ses pions sur l’échiquier du Moyen-Orient se faire manger les uns après les autres.

Dans cet environnement, l’engagement d’Ariel Sharon à geler l’extension de Maalé Adoumim, de même que le crédit qu’il donne au tandem Qoreï-Dahlan en acceptant de les considérer comme des « interlocuteurs avec lesquels on peut s’entendre et auxquels on peut faire des concessions », doivent être pris pour un réajustement important de la doctrine israélienne récente. Histoire peut-être de ne pas placer Qoreï dans la situation intenable dans laquelle l’intransigeance de Jérusalem avait contribué à installer l’ex-Premier ministre, favorable à la solution des deux Etats, Mahmoud Abbas.


Notes :
[1] Le général égyptien Omar Suleiman, chef des services de renseignements du Caire



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