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Shabtaï Rosenne, un grand juriste international s’en est allé……
Par David Ruzié, professeur émérite des universités, spécialiste de droit international
Article mis en ligne le 26 septembre 2010

Alors qu’il y a quelques mois, les médias avaient relevé l’âge de Shabtaï Rosenne (93 ans) lors de sa nomination dans la Commission d’enquête israélienne sur l’affaire de la flottille dite de la paix, sa disparition, il y a quelques jours, est passée pratiquement inaperçue, si ce n’est que certains médias pro-israéliens ont relevé qu’il avait reçu le prix Israël pour ses travaux dans le domaine du droit.

Or, il nous semble que c’est la communauté scientifique internationale toute entière qui vient de perdre un grand savant.

Nous en voulons pour preuve que le professeur Shabtaï Rosenne fut, il y a quelques années (2004), le premier récipiendaire du prix de la Fondation de La Haye, créé pour récompenser, périodiquement, des personnes (physiques ou morales) qui, par leurs publications ou leurs travaux, ont apporté une contribution particulière au développement du droit international ou à l’avancement de la règle de droit dans le monde.

De façon paradoxale - et dirons-nous inexcusable - Shabtaï Rosenne restera comme le grand spécialiste de la Cour internationale de justice de La Haye (qui ne s’est pas toujours – heureusement – dévoyée par une jurisprudence politique), sans jamais en avoir été membre, en raison de sa nationalité.

Il fut en effet victime de l’ostracisme dont Israël fait l’objet, depuis 1967, de la part des Nations Unies, les juges de la Cour étant élus par le Conseil de sécurité et l’Assemblée générale de l’ONU, organes éminemment politiques.

S’il fut, cependant, élu par l’Assemblée générale des Nations Unies, en 1962, pour siéger, à titre individuel, parmi les membres de la Commission du droit international, organe subsidiaire des Nations Unies chargé d’encourager le développement progressif du droit international et sa codification », c’était avant, pratiquement, la mise au ban d’Israël des organes des Nations Unies, après 1967.

Notons, au passage, qu’au moment de quitter ladite Commission, Shabtaï Rosenne adressa, en 1971, au Président de cet organisme une lettre protestant contre la politisation de certains travaux de la Commission, faisant apparaître des rapports ou des documents biaisés en ce qui concerne Israël.

Né à Londres en 1917, il fit es études en Angleterre, puis à l’Université hébraïque de Jérusalem, après avoir servi dans la Royal Air Force durant la Seconde guerre mondiale.

Après avoir fait son alyah, il entra au service de l’Agence juive et devint le premier conseiller juridique du ministère israélien des affaires étrangère du nouvel Etat. Nommé ambassadeur en 1960, il représenta Israël dans de nombreuses conférences internationales et il fut son représentant adjoint aux Nations Unies à New York (1967-1971) et son représentant auprès des organisations internationales à Genève (1971-1974). Devenu ambassadeur extraordinaire, il prit sa retraite (administrative) en 1982.

C’est alors qu’il développa une carrière d’enseignant (il avait déjà enseigné au Collège naval royal de Greenwich, au lendemain de la guerre puis à l’Académie de droit international de La Haye, en 1954), Professeur de droit international à l’Université de Bar Ilan, plusieurs universités étrangères l’invitèrent à donner des cours (Cambridge, Utrecht, Amsterdam et plusieurs universités américaines).

Point d’orgue de ses enseignements, Shabtaï Rosenne fut appelé, en 2001, à dispenser le cours général donné chaque année à l’Académie de droit international de La Haye, un véritable must dans l’enseignement du droit international. Il traita des « Indécisions du droit international contemporain ».

Su le plan doctrinal il restera un maître incontesté dans deux domaines : celui, déjà mentionné, du droit et de la pratique de la Cour internationale de justice et, par ailleurs, du droit de la mer, sur lequel il dirigea un monumental ouvrage collectif consacré à la convention des Nations Unies de 1982 sur la question.

Désigné par Israël pour faire partie de la Cour permanente d’arbitrage, Shabtaï Rosenne fut également conseil, à plusieurs reprises, de gouvernements étrangers au cours de procès internationaux..

Ceci pour dire que Shabtaï Rosenne, connu en Israël et dans le monde juif pour ses travaux sur le droit israélien et le droit hébraïque fut également un grand juriste international, comme le reconnurent ses pairs qui l’élident au sein de l’Institut de droit international, en 1963.

Last but not least, celui qui nous a quittés brutalement, il y a quelques jours, parlait, également, plusieurs langues, dont le français, et fut actif jusqu’à la veille de sa mort, comme en témoignait sa participation à la Commission Turkel.



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