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Alain Finkielkraut reçoit l’aval d’Alain Badiou, viscéralement anti-israélien
Hélène Keller-Lind
Article mis en ligne le 8 juillet 2010

Pierre-Louis Basse a choisi pour la dernière de « Le Temps de le Dire » de rediffuser sur Europe1 un débat entre les deux philosophes Alain Finkielkraut et Alain Badiou. Débat vif portant sur les thèmes centraux de l’identité nationale et de l’immigration, avec deux visions totalement opposées. Toutefois les déclarations d’Alain Finkielkraut sur Israël emportent l’adhésion d’Alain Badiou

Civilisation française versus universalité

On n’entend plus guère parler de Jcall ces temps-ci...mais il y aura eu une exception notable le 4 juillet pour ceux qui écoutaient l’émission de Pierre Louis-Basse sur les ondes d’Europe1. Il avait choisi, en effet, de rediffuser un débat qu’il qualifiait à juste titre de « tout à fait exceptionnel » entre les philosophes et co-auteurs de «  L’Explication  », Alain Finkielkraut et Alain Badiou, reçus à l’occasion de la sortie de cet ouvrage

Civilisation française, plutôt qu’identité, un concept acceptable si on le définit, avec, par exemple, sa langue « qui subit des attaques extrêmes, » voilà ce que veut sauver Alain Finkielkraut, en les défendant, notamment, de « modes de vie incompatibles » pour qui « le principe de la mixité, du principe du féminin, » ne sont pas de mise. Principes « non négociables, » précise-t-il. Une position qui n’a rien de raciste disait-il, rappelant à titre d’exemple que Levi-Strauss entendait fuir « les cultures où le bruit est présent, » cultures contre qui il n’avait rien, mais c’était tout simplement qu’il ne supportait pas le bruit, ce qui n’est pas un rasicme.

Alain Badiou, pour qui, « à certains égards Marx est plus vrai que jamais, » car « c’est le marché mondial capitaliste qui est en train de l’emporter  » aujourd’hui voit dans ces affirmations d’Alain Finkielkraut « une divergence de type non réductible car elle est principielle » et parle de « principes disjoints. » En ce qui le concerne, en effet, Alain Finkielkraut aurait tort de dire que « le monde est fait d’une marqueterie de communautés incommunicables, » ce que, d’ailleurs, il ne dit pas. Le principe que défend Alain Badiou serait donc une universalité, résume Pierre-Louis Basse. Alain Badiou précise ainsi sa pensée : « la France doit être sauvée parce qu’elle ne peut pas se permettre.... les injustices qu’elle commet et en particulier les injustices gravissimes et systématiques qu’elle commet envers les prolétaires nouveaux venus qui maintenant viennent d’Afrique ou du Maghreb. » « L’antiracisme est un mensonge, » estime pour sa part Alain Finkielkraut

La Shoah et l’État israélien, le ralliement d’Alain Finkielkraut

A l’issue de ce débat, lisant un passage d’un texte de Yankélévitch sur la Shoah, L’imprescriptible, Pierre-Louis Basse qui dévoile ici clairement sa pensée, interroge Alain Finkielkraut : « au nom...de cet innommable, pouvons-nous dire....critiquer... pouvons-nous entrer en colère contre l’État israélien. » On aurait aimé voir le philosophe s’étonner pour le moins du parallèle qui semble ainsi dressé. Il ne le fait pas immédiatement mais le fera plus tard fustigeant le Prix Nobel de littérature Saramago qui disait justement que ce qui arrive en « Palestine » est la même chose que ce qui est arrivé à Auschwitz. A noter que la mort de l’écrivain fut pleurée par les anti-israéliens

Mais, au départ, Alain Finkielkraut se borne à répondre, à juste titre, que « on peut tout dire mais on ne devrait pas pouvoir dire absolument n’importe quoi. » Pourtant, se référant la pétition de Jcall, qu’il a signée, il ajoute que cet « appel à la raison »... « réclame d’Israël qu’il sorte de ce statut quo suicidaire » et dit que « ...l’occupation et la politique d’implantation, constituent une erreur politique et une faute morale. » Il précise ensuite qu’on « doit agir dans le sens d’une négociation, d’un compromis israélo-palestinien, sans sous-estimer que les difficultés qui restent extrêmes, en restant attentif à la campagne virulente et même délirante de délégitimation de l’État d’Israël qui sévit aujourd’hui.... » Une déclaration aussi sidérante que les termes de la pétition elle-même. On y retrouve d’ailleurs l’utilisation impropre du terme d’occupation et cette outrecuidance qui consiste à accuser soudain Israël de « faute morale » pour un état de choses installé au fil de l’histoire, qui n’a rien d’irréversible – on l’a vu avec l’évacuation de la Bande de Gaza, drôle d’exemple, d’ailleurs, -, et alors même que Benyamin Netanyahou a mis en place et respecte un gel des implantations en Judée Samarie. On s’étonne que ce philosophe si habile à dénouer les fils de la pensée ne comprenne pas qu’en portant ce type d’accusation grave il participe de cette campagne terrifiante. Quant aux moyens d’agir, il n’en dit rien, comme il ne dit rien des refus palestiniens, notamment le refus de négociations directes, que Benyamin Netanyahou va demander à nouveau lors de sa rencontre avec Barack Obama de ce début juillet.

Quant à Alain Badiou, il se réjouit bien sûr de ce « ralliement d’Alain Finkielkraut à une initiative récente...qui indique un changement dans la situation subjective générale concernant cette situation dont je me réjouis. ». Des termes alambiqués pour dire sans doute qu’il est grand temps que la critique d’Israël devienne plus « universelle » qu’elle ne l’est déjà. Et même si Alain Badiou estime que le développement d’analyses du type de celle de Saramago est « un indice de l’extraordinaire corruption mentale sur cette question, » et si Jean-Louis Basse note que le philosophe considère les groupes islamistes comme fascisants, ce dernier ajoute qu’il « est absolument essentiel que l’identité, la particularité juive telle qu’elle est en cause dans cette affaire [ NDLR on remarquera la formulation...] accepte un certain nombre de principes relevant de l’universalité et qu’elle n’y fasse pas exception... la ligne est difficile à trouver ».... « la situation et la politique de l’État israélien sont telles que nous devons porter sur elle des jugements sévères. » En clair, Israël ne respecte pas les principes universels et est donc coupable....Évoquant la Shoah et cette conduite qu’il reproche à Israël il ajoute que « entre les deux on peut trouver une voie. » Étrange formulation, là encore...Faute de temps, sans doute, l’émission touchant à sa fin, Alain Finkielkraut ne répondra rien.

Mais ces étranges formulations d’Alain Badiou ont une explication. Ainsi, Eric Marty est-il éloquent à propos de « la radicalité d’Alain Badiou sur la question juive »
Celui-ci considère, en effet, Israël comme «  un État colonial  » justement, «  par son existence même... » et génocidaire car il tue les enfants palestiniens. Sa population devant disparaître de la région, selon lui, car elle y est étrangère. D’ailleurs seuls « les Juifs non juifs » sont acceptables aux yeux du philosophe qui considère aussi qu’Israël serait « antisémite, » car contredisant l’essence même des Juifs...faisant des Palestiniens ainsi maltraités des Juifs... Bref, un personnage avec qui on s’étonne de voir qu’Alain Finkielkraut ait pu accepter de dialoguer, que ce soit dans un ouvrage ou de vive voix.



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