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La raison du plus fou : et si l’Iran déclenchait la prochaine guerre en Orient ?
Marc Brzustowski pour lessakele et aschkel.info
Article mis en ligne le 7 mai 2010

On doit cette proposition à contre-courant à un Colonel libanais à la retraite, Charbel Barakat. Il la formule dans un article intitulé : « Qui fait rouler les tambours de guerre, à cette heure ? ». Charbel Barakat est un expert renommé du Hezbollah et du terrorisme. Il a, plusieurs fois, témoigné devant la Commission des affaires étrangères du Sénat américain. Il presse le monde libre de prendre en compte l’éventualité d’une attaque commanditée par l’Iran.

Selon lui, l’Iran exerce actuellement sa mainmise sur l’ensemble des groupes terroristes, d’al Qaeda aux Farc colombiennes : opérations, finances, plans, cadres et dirigeants, processus décisionnels. Le Hezbollah est le mieux organisé, très polyvalent dans l’usage des diverses techniques de guerre asymétrique.

Le Liban et la Syrie ne cessent de crier « au loup », dans la crise du transfert de Scuds. La victimisation permet de surchauffer les opinions publiques. L’Etat hébreu met en garde les alliés de l’Iran contre tout franchissement du « seuil critique ». Tout stock d’armes s’inscrit dans un plan, mu par une intention qui opérera en fonction des contingences. Un processus irréversible peut s’enclencher à tout moment par surinterprétation des intentions de l’autre et choix de conserver l’initiative.

La question subsiste de l’identification correcte du théâtre d’opération décisif et de l’ajustement du timing avec l’agenda nucléaire iranien.

Ce projet doit habilement se servir du bouclier des crises frontalières pour conserver la marge suffisante afin de toucher au but. A partir de quel moment devient-il négligeable, pour un gain maximal, de sacrifier une pièce-maîtresse dans l’échiquier de « l’axe » ? Combien de fois peut-on répéter le scénario en l’amplifiant ? Et avec quelles variantes supplémentaires, touchant des points vitaux de l’adversaire ?

Barakat prend à contre-pied les analyses occidentales sur le Hezbollah. Elles pensent que le mouvement cherche à asseoir sa légitimité politique en renforçant son statut « résistant » contre Israël. Il serait passé en mode « défensif » depuis 2006. Ce serait vrai, dit-il, si le Hezbollah était vraiment un parti libanais. Il est, au contraire, totalement inféodé aux Gardiens de la Révolution.

L’élimination d’Imad Mughniyeh en février 2008 a laissé un vide. Il a été comblé par une structure de commandement pasdaran, depuis l’Ambassade d’Iran à Beyrouth. Samir Geagea déclarait récemment que l’armée était sous la tutelle du Hezbollah et non l’inverse. Aucun officier libanais n’ose faire un geste sans l’approbation de Nasrallah. Lui-même en réfère aux gardiens de la Révolution. Les cercles dirigeants au Liban ne peuvent que suivre les impulsions données depuis Téhéran, après s’être prosternés à Damas.

Bachar al Assad est l’homme aux deux visages : il joue le rôle d’entremetteur logistique pour la réalisation de ce plan de rupture progressive de l’équilibre des forces. Damas sert, ensuite, de façade diplomatique pour l’Occident, en lui laissant -comble de cynisme- une « chance » de parvenir à un accord régional, de plus en plus hypothétique… Il est purement instrumental.

Le modèle auquel Barakat demande aux démocraties de réfléchir, ressemble à un mixte d’attaques préventives multi-options. Le Hezbollah aurait pour mission d’inverser et de remixer le schéma de « la guerre des six jours », au détriment de l’Etat hébreu.

L’incertitude règne sur la quantité exacte de Scuds qui a passé la frontière. La question est futile : une petite quantité en pièces détachées suffit. La masse critique peut rester cantonnée du côté syrien de la frontière nord du Liban. Franchir trop tôt le point de non-retour serait contre-productif.

Avant leur entrée en action, on aura pris soin de brouiller les pistes, par des opérations de moindre ampleur, comme des incursions commandos en Galilée, des prises d’otages, des tirs de M-600, bien plus maniables. Au point ultime, des Scuds mis en orbite sur Dimona, l’aéroport Ben Gurion ou des bases aériennes, seraient la cerise sur le gâteau. On peut aussi rebattre les cartes dans l’autre sens, en fonction des mises adverses.

La difficulté reste d’anticiper précisément le moment du passage à la réalisation des intentions initiales, de façon à les déjouer. Si Israël s’y prépare, l’incertitude demeure, quant aux dispositions des Etats-Unis. Les alliés peuvent être confrontés à un plan multi-centré, qui engagerait d’autres zones que le théâtre israélo-libanais :

Deux récents incidents militaires laissent entrebâillée cette fenêtre d’opportunité :

  • 1) La Corée du Sud a apporté les preuves que sa Corvette Cheonan avait bien été coulée, le 26 mars dernier, par un engin sous-marin nord-coréen. 46 marins sud-coréens ont péri. Aussi, la Maison Blanche s’est-elle empressée d’insuffler le doute sur ces accusations contre Pyongyang.
  • 2) Un avion espion iranien, Fokker F 27 s’est approché à 250 m de l’USS Eisenhower, clichant toutes les prises de vue qu’il voulait. La Vè Flotte américaine a reçu l’ordre de n’ouvrir le feu en aucun cas.
  • 3) Les pays du Golfe sont inquiets de la passivité de cette Armada U.S. Ils redoutent que l’Iran pousse ses tests plus loin, en coulant un navire pétrolier ou militaire dans le Détroit d’Ormuz. Les Pasdaran se servent des îles contestées du Golfe arabo-persique, dont Abu Moussa, pour préparer leur prochain coup.

    L’Iran et la Corée du Nord coordonnent leurs programmes nucléaires. Ils mettent en œuvre une stratégie subtile : elle consiste à multiplier les incidents relativement indolores pour leurs ennemis. Ils souhaitent donner le sentiment qu’ils ne sont pas intéressés à franchir le point de non-retour. L’objectif est d’émousser les capacités de réaction de l’adversaire, tout en laissant l’espoir d’un règlement diplomatique. On s’approche toujours plus près du risque d’embrasement, tout en laissant planer une menace plus vaste encore.

    Ces coups portés sans répliques servent de tests répétés pour l’Iran et ses alliés. Il s’agit juste de s’assurer qu’on pourra porter le coup suivant. Et d’évaluer à quel point la capacité d’anticipation et de réaction de l’adversaire reste aseptisée, par crainte d’une conséquence trop coûteuse :

    celle de l’ouverture d’un nouveau front rapidement incontrôlable.

    Vérifions l’équation sur le cas du transfert de Scuds : Pour Robert Gates et Ehud Barak, jamais une milice de guérilla terroriste n’avait encore mis la main sur de tels missiles. Mais leur seule réponse est de continuer à observer l’état d’avancement de cette livraison. Aucune option n’est arrêtée sur la façon de l’endiguer.

    L’exemple du conflit libanais de 2006 permet de dégager une règle générale : le dispositif des conflits de basse intensité permet de maintenir indéfiniment un état de ni guerre ni paix. C’est un schéma idéal pour atteindre d’autres fins stratégiques. Il consiste à repousser le recours, par l’adversaire, à des options décisives.

    Cette diagonale du fou se sert des missiles de Nasrallah pour provoquer un « gambit ». A termes, c’est le monde libre qui risque bien de se retrouver échec et mat face aux manoeuvres nucléaires de Téhéran, qui restent encore, à cette heure, résistibles.



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