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Chronique d’une guerre annoncée
Par Élie FAYAD | L’Orient-Le Jour
Article mis en ligne le 15 octobre 2009

La pièce qui n’en finit pas de se jouer au Liban-Sud n’a rien du drame shakespearien. Elle tient d’un genre qui s’apparenterait plutôt à la farce tragico-bouffonne. Et dans cette farce, le rôle de l’idiot du village est tenu toujours par le même figurant : l’État libanais.

Une explosion se produit quelque part dans la zone placée en théorie sous le contrôle exclusif de l’armée libanaise et de la Finul. Le Hezbollah, maître réel des lieux, accourt pour minimiser l’ampleur de l’incident. À l’en croire, l’affaire se réduirait quasiment à une malheureuse manipulation d’une décoration de Noël.

Un député du parti se permet, à la télévision, de s’énerver contre les médias qui, selon lui, gonflent les informations en évoquant la possibilité qu’il y ait eu de nombreuses victimes et que le site de l’explosion soit un dépôt d’armes.

Et pour couper court à toute réplique, ce député ne trouve d’autre argument que de modifier unilatéralement la géographie. Voilà que, pour les besoins de la « raison d’État » du Hezbollah, Tayr Filsay, le village où l’explosion s’est produite, est subitement transporté d’une rive à l’autre du Litani, c’est-à-dire vers la zone où, semble dire ce député, le stockage d’armes par le parti de Dieu est « permis ».

Dans un pays où le verbe est roi, où la moindre bagatelle déclenche d’infinies logorrhées, l’armée libanaise consacre à l’incident un communiqué de moins de dix mots. On y reprend la tonalité timide du Hezbollah, mais avec tout de même une énorme différence : l’explosion, affirme l’armée, serait due à la manipulation d’un « obus ».

Quant à la Finul, qui participe ces jours-ci à la cueillette des olives au Liban-Sud, elle n’a rien vu et affirme compter sur les informations que lui fournit l’armée. Il est vrai qu’après la bastonnade subie en juillet par des Casques bleus, qui menaient une enquête jugée un peu trop rapprochée sur une explosion similaire survenue dans le village de Kherbet Selm, la prudence s’imposait.

Donc, l’armée et la Finul mènent l’enquête... Et, pendant ce temps, de l’autre côté de la frontière, on se hâte de développer le film pris par un drone qui se trouvait là au moment du drame et dont la présence, jugée elle aussi « permise » par ses propriétaires, n’avait rien à voir avec la cueillette des olives.

Informé de ce film qui, selon ses auteurs, montre des hommes du Hezbollah se hâtant de charger sur des camions des roquettes évacuées du site de l’explosion, le président israélien, celui-là même qui, depuis un demi-siècle, participe d’une façon ou d’une autre au façonnage de la politique de l’État hébreu - pour ne pas parler de son rôle dans le façonnage de l’arme nucléaire israélienne -, prend son ton le plus paternaliste pour gronder le Liban et lui reprocher de ne pas être « la Suisse du Moyen-Orient ».

Comme s’il n’y était pour rien, lui, si le Liban n’a pas réussi à devenir la Suisse du Moyen-Orient.

Bref, l’armée et la Finul enquêtent...

Cependant, à quelques dizaines de kilomètres plus au nord, les milieux politiques libanais n’ont cure de ces vétilles. Le sort de Gebran Bassil et de ses « droits » autoproclamés sur le ministère des Télécoms y sont apparemment jugés plus urgents pour la pérennité de la République libanaise.

Il est vrai que le scénario au Liban-Sud est tellement pareil à lui-même depuis des décennies que cela en devient lassant. Et puisqu’on vous dit que l’armée et la Finul mènent l’enquête...

C’est bien comme cela que les guerres sont préparées.



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