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Le temps de l’antision-émitisme
Par Meïr Waintrater - Extrait de L’Arche n°612 (mai 2009).
Article mis en ligne le 14 mai 2009
dernière modification le 15 mai 2009

L’actualité récente nous a offert un intéressant sujet de débat. Faut-il
interdire les listes «antisionistes» que Dieudonné et ses amis veulent
présenter aux élections européennes ? Faut-il les placer sous un strict
contrôle afin d’empêcher tout dérapage ?

Certains ont protesté contre de telles suggestions, au nom de la liberté de
parole. Certains ont regretté que l’on ait offert une publicité gratuite aux
« antisionistes ». Et certains craignent qu’une initiative intempestive ne se
retourne contre ses auteurs, car une relaxe judiciaire des « antisionistes »
passerait pour une validation de leurs propos.

Ce dernier point mérite qu’on s’y arrête.

Prenons un juge au tribunal administratif, chargé de se prononcer sur la
légalité des discours « antisionistes » de Dieudonné et de ses amis. On
imagine leurs arguments : « Antisémite, moi ? Vous n’y pensez pas. Je suis
contre les sionistes, pas contre les Juifs. D’ailleurs, j’ai des amis
juifs. »

Pour statuer sur la nature réelle des propos incriminés, le juge doit, selon
l’expression consacrée, « lever le voile », c’est-à-dire expliciter un contenu
qui a fait l’objet d’un « codage ». Ici entre en jeu la conviction intime du
magistrat, et aussi l’esprit du temps.

Quand Jean-Marie Le Pen désignait à la vindicte de ses auditeurs des
personnages qui avaient en commun d’être d’origine juive, les tribunaux ont
jugé que, bien que le mot « juif » n’ait pas été prononcé, l’intention
antisémite était évidente. Mais il s’agissait de Le Pen, dont la réputation
n’était pas à faire et qui prenait un malin plaisir à provoquer les gens.

Les « antisionistes » d’aujourd’hui sont plus cauteleux. Ils savent aussi
surfer sur une idéologie malsaine qui, dans une frange non négligeable de la
société française, associe la haine d’Israël et le fantasme d’un complot
international dont on ne dit pas le nom. Entre « Juif » et « sioniste », toutes
les acrobaties verbales sont possibles.

Ce qui doit nous inquiéter ici n’est pas l’existence d’un petit groupe de
psychopathes qui se trouvent ainsi promus à la dignité d’acteurs de la vie
nationale. Ce qui doit nous inquiéter est le discours sous-jacent dont ils
se nourrissent.

Codage cynique chez les uns, ignorance chez les autres ; et, chez d’autres
encore, un état de confusion où le désarroi politique fait revenir des
fantasmes archaïques. Voici le temps de l’« antisionémitisme ». 

Dans son livre « L’Aveu », Artur London, ancien militant puis dirigeant du
parti communiste tchécoslovaque, racontait comment il fut pris dans la vague
d’épuration qui conduisit aux « procès de Prague » de 1952.

Les tortionnaires d’Artur London – des flics tchèques cornaqués par des
Russes du KGB – l’interrogeaient sur les communistes qui étaient avec lui
dans les Brigades internationales, en Espagne. Chaque fois que London
donnait le nom d’un Juif, et cela arrivait souvent, les interrogateurs
notaient dans leur rapport : « sioniste ».

London leur disait : « Non, Untel n’est pas sioniste, c’est un vieux militant
communiste ». Et on lui répondait : « Nous sommes dans un pays socialiste,
l’antisémitisme est illégal et il est interdit d’utiliser le mot “Juif”.
C’est pourquoi nous écrivons “sioniste” ».

Les « sionistes », déjà, étaient cause de tous les maux. C’est ce
qu’expliquaient les autorités communistes en Europe de l’Est, et leur
discours était repris en chœur par les communistes français – avec, en
première ligne, des communistes juifs.

Près de soixante ans ont passé. L’antisionémitisme nouveau est arrivé.


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