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Michel Aoun à Téhéran : le dernier acte d’une mort politique ?
Khaled Asmar | source « MediArabe.info »
Article mis en ligne le 17 octobre 2008

La montée et le déclin du général libanais Michel Aoun semblent se résumer en trois phases : le populisme fondé sur la lutte contre l’occupation (1989-2005), l’alliance avec l’ancien occupant et ses agents (2006-2008), et la fusion-disparition (2008-2009). En scrutant ces trois phases, des observateurs ne s’empêchent pas de dresser le parallèle entre le phénomène Aouniste au Liban et le Poujadisme en France.

Après avoir bâti sa politique autour de son combat contre l’occupation syrienne durant quinze ans, entre sa « Guerre de Libération » perdue en 1989 et son retour d’exil en 2005, le général Aoun a tenté d’exploiter les conflits et de surfer sur les contradictions régionales et internationales dont le Liban était – et est toujours – le théâtre, pour se faire élire président de la République. Fort de ses slogans d’antan et d’un discours populiste et démagogique par excellence, Aoun s’est transformé en un phénomène « Orange » – officiellement par allusion à la Révolution orange d’Ukraine, mais d’aucuns affirment que la couleur choisie est inspirée par les citrouilles d’Halloween ! Ce fut la montée fulgurante du Courant Patriotique Libre.

Mais le populisme et la démagogie ne sont pas les Grands électeurs qui choisissent le Président de la République. L’histoire et la géographie du Liban ont fait, depuis l’indépendance, que son président est toujours imposé par la puissance dominante du moment, ou par un consensus entre les puissances régionales et internationales.

L’Egypte sous Nasser, la Syrie sous Assad, la France sous De Gaulle et Israël sous Béguin et Sharon ont déjà eu leur mot à dire dans cette échéance.

Mais pour l’élection de 2007 (qui n’a eu lieu qu’en mai 2008), Aoun a misé sur un échec de la politique américaine en Irak, donc sur un retour de l’influence syrienne. A la recherche d’un sponsor, Aoun s’était alors retourné contre l’Occident qui l’avait accueilli et soutenu et s’est jeté dans les bras de la Syrie et de ses alliés au Liban à travers l’arrangement signé avec le Hezbollah en février 2006, un accord qui avait préparé le pays à la guerre de l’été 2006. Car au lieu de libaniser le Hezbollah, Aoun lui a servi de couverture politique chrétienne indispensable au parti chiite et aux alliés de la Syrie au Liban. Ils ont ainsi bloqué le pays refusant le désarmement et l’intégration dans l’Etat… Pour les spécialistes, cette période correspond au syndrome de Stockholm qui fait que la victime pactise avec son bourreau, et finit par le défendre.

Le déclin du phénomène Aoun semble approcher. Il l’a provoqué en se rendant à Téhéran, en défendant et en saluant la puissance de l’Iran. Pour ses derniers partisans, le général est passé de l’alliance à la fusion avec ses anciens bourreaux. Une fusion synonyme de disparition qui sera scellée, pense-t-on au Liban, lors des prochaines élections législatives du printemps 2009. Les options politiques du général Aoun étant indéfendables, le tacticien s’est engagé dans une fuite en avant non pas pour corriger le tir, mais pour compenser ses pertes politiques et populaires par de généreux financements iraniens. Il a minutieusement choisi la date de son voyage en Iran, le jour même de la visite officielle du Président libanais Michel Sleiman en Arabie, le 12 octobre, dans l’objectif de lui faire de l’ombre. Peine perdue. Fidèle à ses habitudes, le général et le « mauvais tacticien » fait un pari très risqué. Il serait peu probable que son électorat persiste dans l’aveuglement et se laisse séduire par l’argent des Mollahs. Dans cette hypothèse, Aoun serait sur le point de perdre son dernier combat.

Le destin du courant Aouniste au Liban ressemble à celui du Poujadisme en France. Le populisme de ce dernier avait conduit à l’élection de 52 députés lors des élections de janvier 1956, dont des bouchers, des boulangers, des libraires, des épiciers... Leur victoire, grâce à un excès de colère populaire, s’est vite dégonflée. Dans plus tard, le mouvement a disparu après avoir été laminé aux législatives de 1958 (deux députés). Une montée fulgurante, rapide et infondée ne peut durer dans le temps, et la chute est généralement douloureuse et définitive.



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