Non, Monsieur Katzav, la France n’est pas antisémite ! Et puisque, président d’Israël, vous êtes ce matin à Paris, vous devez l’entendre, l’affirmer et l’assurer fermement à vos concitoyens. Trop de petites phrases et d’incompréhensions, trop de heurts et d’exaspérations sont venus, depuis quelques années, brouiller les relations entre nos deux pays. Et, disons-le, trop de campagnes faciles lancées contre la France, portant, de façon irresponsable, et parfois non sans arrière-pensée, cette accusation d’antisémitisme. Le sujet est trop douloureux, trop grave, trop dangereux, pour le laisser aux caricatures.

La France a sur le conflit israélo-palestinien une position constante : la recherche d’une issue équilibrée respectueuse des droits et devoirs de chacun. Une issue qui puisse surtout, pour le futur, garantir la paix, par-delà les déséquilibres démographiques qui vont, c’est sans doute la donnée essentielle de l’affaire, s’accentuer. Chacun sait que cette ligne est la seule possible, que la paix exige, de part et d’autre, renoncement, effort et sincérité.

Le second axiome est que la résolution de cette guerre est la condition du développement de tout le Proche-Orient. Développement dans l’ordre démocratique avant même qu’il ne soit économique.

Mais cette paix est l’un des préalables, aussi, à la victoire contre le terrorisme. Nous savons que le conflit israélo-palestinien nourrit le terrorisme ; et que, pour certains, il le justifie. Et nous savons combien ce terrorisme, par ses intentions et ses moyens, par sa stratégie consciente de haine, vise non pas seulement Israël, mais chaque Etat du monde libre, qui n’est pas seulement le monde occidental.

La France en est d’autant plus consciente qu’elle est, au premier rang, concernée. Si les tueurs fous de Ben Laden ont frappé les tours de New York, parce que l’Amérique est le « Grand Satan », c’est l’Europe, « Petit Satan », qui, pour des raisons évidentes, est la première menacée par l’islam intégriste.

Les actes d’antisémitisme qui se sont produits en France dans les dernières années, les propos inacceptables récemment prononcés, jusque sur les pavés parisiens, insultent et menacent la France tout autant qu’Israël.

Il n’est pas besoin d’être historien pour savoir que nos destins sont liés. Ces propos, ces attitudes, cette haine, se portent tantôt sur la France, tantôt sur Israël. Ils sont, dans tous les cas, détestables.

Mais ils ne sont pas la France. Ils sont un problème français, déjà grave. Et si rien n’évolue, ils seront, demain, les ingrédients d’un drame français.

Voilà pourquoi, par-delà l’histoire, l’amitié, la proximité culturelle, par-delà les liens des Français juifs avec Israël, la France a besoin d’Israël comme elle espère qu’Israël a besoin de la France.

C’est, par-delà les drames et les haines, les incompréhensions et les provocations, le vrai message de Paris. Celui à entendre. Et à rapporter. Bienvenue, Monsieur le Président !