Bandeau
DESINFOS.COM
Slogan du site

Depuis Septembre 2000, DESINFOS.com est libre d’accès et gratuit
pour vous donner une véritable information indépendante sur Israël

Ehoud Olmert, une tragédie politique
Par Guy Senbel pour Guysen International News
Article mis en ligne le 1er août 2008

Cette semaine, nous souhaiterions attirer l’attention de nos lecteurs sur la démission du Premier ministre israélien Ehoud Olmert, ses conséquences sur la vie politique israélienne, et son impact au Moyen Orient. L’annonce « dramatique », selon les termes employés par des membres de son cabinet quelques heures avant sa déclaration mercredi 30 juillet à 20H00, n’a pas été une grande surprise en Israël. En politique aussi, la mort annoncée relève du tragique.

Depuis Yitzhak Shamir, aucun Premier ministre israélien n’est allé au bout de son mandat. Et les plus célèbres des chefs de gouvernements israéliens, Yitzhak Rabin, assassiné, Ariel Sharon tombé dans un coma profond suite à une attaque cérébrale, avaient eu des fins effectivement « dramatiques ». Les autres avaient dû abandonner le pouvoir pour cause de majorités gouvernementales fragiles, ou impossibles.

Ehoud Olmert aura été sans doute le plus impopulaire des Premiers ministres israéliens, il l’avait d’ailleurs reconnu un soir d’hiver 2007, au cours d’une convention du Parti dont il était le leader contesté, Kadima, fondé par Ariel Sharon pour rassembler une majorité parlementaire stable et appliquer une « feuille de route » voulue par l’administration américaine, mais peu appréciée des Israéliens.

« Il est vrai que je ne suis pas populaire » avait alors déclaré Ehoud Olmert, mais « l’acharnement des médias peut nuire à mon image, pas à l’efficacité de l’action de mon gouvernement ». Sans stratégie de communication efficace, sans ligne politique claire, Ehoud Olmert était devenu pour tous un homme politique insaisissable. La gauche politique israélienne et les Palestiniens lui ont reproché d’être un homme de droite, tandis que la droite n’a cessé de le tancer, le critiquant notamment pour avoir trahi au cours de son mandat les grands principes politiques qu’incarnait Ariel Sharon.

Ehoud Olmert ne fut ni colombe, ni faucon. S’il n’est pas parvenu à être un homme de paix, il n’aura pas été non plus un homme de guerre. La deuxième guerre du Liban, déclenchée après l’enlèvement d’Ehoud Goldwasser et Eldad Reguev, son échec patent, la commission d’enquête conduite par Winograd, sont sans aucun doute les éléments fondateurs de son impopularité, et de son échec politique. L’isolement d’Israël au Moyen Orient, les menaces constantes qui l’entourent interdisent à l’Etat juif de prendre le risque de perdre un conflit, ou de ne pas gagner une bataille.

Ehoud Olmert a un handicap, celui de ne pas avoir été un héros militaire, il aura commis l’erreur de ne pas s’entourer des plus grands stratèges militaires, or en Israël, la question de la sécurité nationale est primordiale. Et les tirs de Qassams sur Sdérot et le Néguev occidental ont été ininterrompus pendant des années, les attentats n’ont pas cessé, le Hezbollah a réussi à se doter d’un arsenal militaire qui, dit-on, est bien plus inquiétant aujourd’hui qu’à l’été 2006. L’Iran reste aussi une menace.

Face à ces échecs sécuritaires toutefois, les succès diplomatiques sont nombreux, même s’il doit les partager avec le Président de l’Etat Shimon Pérès. En effet, le monde libre a compris que la nucléarisation de l’Iran n’était pas seulement dangereuse pour l’Etat juif.

L’administration Olmert a réussi à passer ce message aux démocraties occidentales et à sensibiliser l’opinion. Ahmadinejad, le président iranien, souhaite rayer Israël de la carte, le Président Sarkozy ne lui serrera pas la main. Et en pleine campagne électorale américaine, alors que la Maison Blanche ne se conquière pas sur la question de la politique étrangère américaine, les deux prétendants ont voyagé en Israël. Ils ont dit leur fermeté à l’Iran, rappelé leur soutien sans faille à Israël. Ehoud Olmert l’a rappelé au cours de sa déclaration mercredi 30 juillet, jamais les peuples américains et israéliens n’ont été aussi proches. La paix qu’il a initiée avec l’Autorité palestinienne et les pourparlers indirects entre Damas et Jérusalem risquent de coûter cher à Israël, parce que la paix est conditionnée par des « sacrifices difficiles » qui ne font pas l’unanimité chez les Israéliens. Et puis, nombre de ses initiatives diplomatiques ont été perçues comme une entreprise de diversion destinée à remettre à plus tard un retrait inéluctable de la vie politique.

Ce sont les affaires de corruption qui lui posent un problème d’avenir politique. Ehoud Olmert bat tous les records d’enquêtes et de soupçons. Rarement un homme politique aura été impliqué dans autant d’affaires de pots-de-vin. Celui qui jurait hier qu’il n’a jamais détourné une « agourot » (l’équivalent d’un cent, une fraction du Shekel, la monnaie israélienne) sera demain interrogé dans le cadre d’une mise en accusation pour corruption. Olmert sait que dans une démocratie véritable, la presse joue bien son rôle de quatrième pouvoir. Si l’acharnement médiatique n’a pas cessé, si les rumeurs relatives à sa vie privée ont été douloureuses pour un homme atteint d’un cancer qui l’a affaibli, en choisissant de se retirer, le Premier ministre israélien a fait preuve d’un courage politique et d’un respect pour la démocratie israélienne particulièrement dignes.

Malgré la démission, le jeu politique et institutionnel en Israël prolonge de quelques mois le mandat du Premier ministre. Il n’est pas interdit de penser qu’il consacrera son temps à réparer une injustice.

Ce soir, nous pensons à Guilad Shalit, retenu en otage par le Hamas depuis 768 jours. Nous pensons à ses parents, Aviva et Noam, qui depuis le jour de l’enlèvement, luttent sans relâche pour la libération de leur fils.



Haut de page
Réalisé sous SPIP
Habillage ESCAL 4.5.87
Hébergeur : OVH