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Les Holtzberg. Deux lumières s’éteignent à Bombay
Par Denis Elkoubi pour Guysen International News
Article mis en ligne le 1er décembre 2008

J’ai eu la chance de rencontrer le Rabbin Gabriel Holtzberg et son épouse lors d’un séjour à Bombay en 2007. Je devais me rendre à un salon professionnel à Bombay à un moment où je devais réciter le Kaddish pour mon Père. J’avais alors pris contact avec le Rabbin afin qu’il me confirme que je trouverai bien un minyan quotidien à Bombay. Il me rassura, et, sans que je le lui ai même demandé, m’invita à prendre tous mes repas au Beth Habbad.

Dès mon arrivée, je me présentais donc au Beth Habbad, pour vérifier que tout était en ordre.

Si le concierge de l’hôtel Taj, où je restais, me confirma qu’il savait où se trouvait le Beth Habbad, j’eus plus de mal avec le taxi, et pour cause, la rue qui y menait était entièrement défoncée pour des travaux de voirie, et la petite rue du Beth Habbad n’était pas accessible pour les petits taxis de Bombay.

C’est un jeune Rabbin souriant qui m’accueillit. Mais quand je me présentais en lui demandant de me confirmer que nous aurions bien un minyan quotidien, je vis à sa mine que les choses était plus compliquées que prévues. Il m’expliqua que l’arrivée de la mousson avait fait partir les touristes, et donc, que le minyan serait plus difficile à organiser. Mais, très positif, il me garantit qu’il allait se débrouiller.

Le lendemain matin, le minyan était là, le surlendemain aussi, et ainsi chaque jour.

Je réalisais bien vite les innombrables coups de téléphone qu’il avait dû donner pour arriver à trouver dix hommes dans Bombay.

Diamantaires, hommes d’affaires américains, étudiants, touristes, jeunes israéliens de retour de Goa, européens, sud américains, et juifs indiens, chacun avait répondu à l’appel du Rabbin Gabriel Holtzberg et ainsi, chaque jour le monde entier se réunissait dans la petite salle du Beth Habbad.

Après l’office on nous proposait une petit déjeuner, puis nous étions conviés à revenir pour les repas de midi et du soir.
L’atmosphère chaleureuse de ces repas offerts à quiconque entrait au Beth Habbad en faisait des moments privilégiés de grande convivialité.

C’est dans ces moments que j’ai pu comprendre comment le rabbin et sa femme étaient appréciés par leurs visiteurs. La plupart d’entre eux venaient régulièrement au Beth Habbad, soit pour y chercher du réconfort, un enseignement, de la nourriture, la possibilité de parler hébreu. Tout le monde les appelait affectueusement par leur prénom, et ils avaient une attention égale pour tous. Tous les deux rayonnaient d’une lumière incroyable. Les habitués venaient tous me voir pour me dire combien ils étaient redevables à ce jeune couple.

Bombay est une ville d’orient, avec ses odeurs, sa chaleur, sa misère. La petite rue dans laquelle était le Beth Habbad était en terre battue, à côté d’un marché dont je vous laisse imaginer l’état. Mais à peine arrivait t’on au premier étage de leur petit immeuble que l’on avait complètement oublié où l’on était, et l’on était transporté dans une maison habitée par la émouna. Pas de doute que quiconque est passé par cette maison s’y est senti immédiatement chez lui.

La émouna, la foi, avec laquelle ce jeune couple avait accepté la mission que lui avait confiée le Beth Loubavitch était extraordinaire. Pourtant découragés, paniqués même, à leur arrivée, Rivki m’avait raconté qu’ils avaient décidé que si on les avait envoyés là, c’est qu’il fallait qu’ils aillent jusqu’au bout de leur mission. Malgré de grandes épreuves personnelles, ils avaient, en deux ans, réussit à monter un petit centre communautaire, véritable havre de paix, de Thora et de Hessed.

En dehors du centre et de l’accueil des visiteurs, leurs activités étaient sans limites : Cacherout, abattage rituel, circoncision, enseignement, dernier devoir, restaurant, bar mitsvah, tout, absolument tout était de leur ressort. Par manque de minyan, la communauté vieillissante de Bombay avait même confié les offices du Shabbat au Rabbin, dans la Grande Synagogue Sassoon.

Un juif décède à New Dehli, le Rabbin prend l’avion, donne les bakchich qu’il faut et ramène le corps pour qu’il ne soit pas enterré en fosse commune. Un jeunes israélien paumé dans son périple indien, ils le prennent en charge, appellent la famille en Israël, assurent son rapatriement. L’éducation des quelques derniers jeunes qui restent à Bombay, la table ouverte, les offices, les repas chabbatiques, le jeune couple est sur tous les fronts, avec un sourire, une bonne humeur, une chaleur et une disponibilité permanente.

Chaque jour je passais de nombreuses heures avec le rabbin, son épouse et tous les visiteurs.
En une longue semaine j’ai vu passer des dizaines de personnes, de nouveaux arrivants chaque jour. Chaque visiteur était heureux d’être là. Pourtant, la salle principale, à la fois Synagogue, salle à manger et salon était des plus modestes. Mais le Rabbin et sa femme rayonnaient tellement naturellement qu’on oubliait instantanément qu’on était dans l’une des plus grande mégalopole du monde, aux 15 millions d’habitants dont la moitié vivent dans la rue.

Comme moi, chaque personne qui est passée par le Beth Habbad est redevable à Gabriel et Rivki Holtzberg d’un moment de bonheur ou de réconfort, d’aide spirituelle ou matérielle, d’une écoute attentive ou d’une leçon de vie.

Leur perte est une immense perte pour le peuple juif, ils laisseront dans la mémoire de tous ceux qui les ont approchés le souvenir de vrais Tzadikkim. Leur fin tragique, Al Kiddouch Hachem les inscrits définitivement dans l’histoire du peuple Juif comme des êtres exceptionnels.

Des milliers de personnes sont passé par le Nariman House en cinq ans, chacun en est reparti transformé. Impossible de côtoyer ces deux êtres de lumière sans devenir un peu meilleur soi-même. Gabriel et Rivki Holtzberg ont donné un peu de leur lumière à tous ceux qui les ont rencontrés. Nul doute qu’aujourd’hui ces milliers de personnes pleurent leur disparition et s’associent à la peine inconsolable de leurs familles.



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