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La France elle-même ne sera plus la France
Par Guy Millière © Metula News Agency
Article mis en ligne le 22 mai 2004

Une manifestation contre l’antisémitisme a eu lieu à Paris, le 16 mai dernier. S’y sont retrouvées moins de cent mille personnes (dix mille ? Ndlr.). Lorsqu’un combat est important en France, le chiffre des manifestants se monte à des centaines de milliers de personnes, quelquefois à un million ou davantage. La lutte contre l’antisémitisme n’est pas un combat important aux yeux des français, c’est évident.

Quand un cimetière juif est profané et couvert de croix gammées en Alsace, on s’indigne. Un jour ou deux. Puis on oublie. Quand quelques jours plus tard, c’est un monument en l’honneur des juifs combattants morts pour la France qui se trouve profané à son tour, on s’indigne un tout petit peu plus. Puis on oublie à nouveau. Le maire du petit village où le monument se dresse, pas très loin de Verdun, souligne pourquoi on doit s’indigner davantage que pour le cimetière en Alsace : « même Hitler n’y avait pas touché ». Hitler deviendrait-il en France une référence en matière de respect ? Je m’interroge encore ?

Quand on appelle, un peu plus tard, à manifester, certains s’inquiètent vite, à haute et intelligible voix : ces juifs, est-ce qu’ils n’en font pas un peu trop ? Après tout, ils n’ont pas le monopole de la souffrance. Et puis, cela fait soixante ans qu’ils nous parlent de la Shoah, c’est trop ! Manifester, oui, disent les porteurs de ce discours, mais contre tous les racismes, et, en France, le racisme anti-arabe est bien plus développé que l’antisémitisme, ne nous égarons pas. N’allons surtout pas jusqu’à dire que l’antisémitisme en France, aujourd’hui, est de racine musulmane, surtout si c’est le cas…

Le cinéaste Elie Chouraqui l’a dit récemment, lui, dans un reportage très nuancé et teinté d’appels à l’humanisme diffusé à la télévision. Dès le lendemain, ce fut le scandale : enseignants, hommes politiques, responsables associatifs se sont empressés de nier l’évidence. Les enseignants, en leur immense majorité, savent de quels côtés peuvent venir les ennuis pour eux et comprennent qu’il vaut mieux jouer celui qui n’a rien vu et rien entendu, et puis, ils ne sont pas antisémites, mais, malgré tout, si les juifs cachaient qu’ils sont juifs, tout ne serait-il pas plus simple ? Les politiques, à droite et à gauche, savent quel est le poids électoral des musulmans, tandis que les juifs…, et puis qui voudrait compromettre la politique arabe de la France ? Les responsables associatifs, eux, sont de gauche ou d’extrême gauche, donc du côté de l’opprimé : or celui-ci, c’est bien connu, c’est le travailleur immigré maghrébin ou le jeune beur de banlieue, pas le juif voyons. Si vous ajoutez à cela les exactions odieuses de l’armée israélienne…

Quiconque n’est pas juif et veut garder les idées claires face au conflit israélo-arabe doit faire l’effort, jour après jour en France, de résister à un véritable tir de barrage médiatique. Tous s’y mêlent : radio, télévision, presse écrite. Le mot terrorisme a totalement disparu du vocabulaire lorsqu’il s’agit des « Palestiniens » : le mot « activiste » suffit amplement. Un « activiste » n’assassine pas : il « milite ». Un soldat israélien « tue », lui, toujours, de préférence des enfants, rarement des « activistes ». Les dirigeants des « activistes » sont des « chefs spirituels », bien sûr. L’armée israélienne détruit des maisons de « Palestiniens » pour le pur plaisir de détruire, et si un activiste dit que c’est une opération d’ « extermination », tous les journalistes reprendront goulûment ses paroles. Ils n’attisent pas la haine, bien sûr, ils font juste leur métier, et ils s’étonnent, disent-ils, que leurs reportages soient reçus comme biaisés, eux, si honnêtes, si scrupuleux qu’on pourrait les engager chez Al Djezeera sans qu’ils aient à changer une virgule à aucun de leurs commentaires.

De temps à autres, un dirigeant français dira, dans un effort surhumain, qu’il ne faut « pas importer en France un conflit qui se déroule à plusieurs milliers de kilomètres de Paris » et feindra de ne pas s’apercevoir, que le fait que ce conflit soit dépeint de manière si biaisée et si spécieuse en France, ressemble comme deux gouttes d’eau souillée à une incitation très concrète à la haine anti-juive en France.

D’après un sondage récent, 86% des Israéliens considèrent la France comme un pays antisémite. Quand ce chiffre est donné à la télévision, les commentateurs prennent un air effaré et disent, désolés, que les israéliens ne comprennent rien à rien. Je dis, moi, que les Israéliens ont raison, et je le dis avec tristesse : l’antisémitisme est tellement répandu et tellement banal en France, qu’il fait désormais partie du décor.

Un juif est agressé ? Ce n’était qu’un juif, voyons… Et puis, Israël se conduit tellement mal que c’est logique, non ? Un « Palestinien » vient d’être tué ? On vous l’avait dit que c’était la faute d’Israël. Un attentat a lieu en Israël : c’est le cycle de la violence, bien sûr. Si Israël n’avait pas conduit ces gens au désespoir, il n’y aurait pas d’attentats.

Ma voisine, septuagénaire, me disait voici peu qu’en France, sous Pétain, on vivait finalement très bien. Les juifs ? Oh, c’était leur problème.

On associait autrefois l’antisémitisme en France à l’extrême droite pronazie. Cet antisémitisme là existe encore et reste aussi répugnant que jamais : il est incarné par un ramassis de vieux crétins, aigris, qui ne se sont guère reproduits. Un antisémitisme musulman est venu se greffer sur lui et rajouter une nouvelle composante, qui elle aussi lit Mein Kampf : certains vieux crétins aigris s’en trouvent ragaillardis, mais ce sera passager. Des vieux crétins aigris ne peuvent constituer des alliés durables de qui que ce soit. Un antisémitisme d’extrême gauche s’est greffé sur les deux précédents et fait d’Israël le sale Etat juif capitaliste parmi les Etats de la terre. Les adeptes de l’antisémitisme d’extrême gauche détestent les vieux crétins aigris, sans accepter de discerner qu’ils sont aussi crétins et aigris que leurs ancêtres d’extrême droite et qu’ils représentent juste la relève relookée de la même horreur. Eux ne lisent pas Mein Kampf, mais aiment d’un amour simple, passionnel et, bien sûr, très « prolétaire » les antisémites musulmans.

Un quatrième antisémitisme est présent dans l’atmosphère, celui de l’indifférence, de la lâcheté, du conformisme, de l’avachissement. Un antisémitisme de gens qui se disent que tout cela c’est des histoires de juifs et d’arabes, et qu’avec tous ces arabes en France, les juifs pourraient au moins se taire, raser les murs et laisser les braves gens innocents, parce que non juifs, boire leur camomille devant la télévision en toute tranquillité.

L’antisémitisme n’est pas un combat important aux yeux des français, non.

L’antisémitisme fait partie intégrante de l’air que les Français respirent quotidiennement sous diverses formes et selon divers modes. Il est tellement présent que les Français ne le perçoivent plus ou ne le voient plus.

J’ai bien peur que d’ici quelques années ce soit pire. La jeune chanteuse Shirel, être de lumière et de bonté, à qui j’en parlais récemment me disait : tout cela, ce n’est pas grave, nous allons rentrer chez nous. Les juifs français devront sans doute rejoindre Israël pour vivre libres. Certains rejoindront les Etats-Unis. Ceux qui vivront encore en France devront se cacher, nier leur judéité, devenir marranes ou dhimmis. Ce jour là, la France elle-même ne sera plus la France, les derniers Français non juifs et épris de décence et de dignité, qui n’ont pas encore déserté le navire moisissant, l’auront déserté alors. Il restera quelques vieux crétins devenus très très vieux, de nombreux gauchistes, vivant dans les ruines et les décombres et de nombreux musulmans antisémites. Ce ne sera pas très grave. L’avenir du monde se dessinera ailleurs, comme il commence déjà à s’y dessiner.

L’antisémitisme n’est pas un combat pour les Français aujourd’hui parce que rien n’est plus vraiment un combat pour les Français aujourd’hui. Ils ont déjà renoncé à être depuis si longtemps…



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