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A propos d’une prochaine « initiative diplomatique » de Benyamin Netanyahou
Par David Ruzié, professeur émérite des universités, spécialiste de droit international
Article mis en ligne le 10 mars 2011

Alors que les médias sont, actuellement, principalement fixés sur le vent de fronde, qui agite plusieurs pays du Moyen-Orient, on parle peu du conflit israélo-palestinien, si ce n’est pour constater – contrairement à ce que ces mêmes médias essayaient de nous faire croire, encore, il y a peu - qu’il n’est nullement au cœur des préoccupations des populations arabes en révolte.

Et c’est le moment où le Premier ministre israélien laisse entendre, qu’à l’occasion de son prochain voyage aux Etats-Unis, en mai prochain, pour assister à l’assemblée de l’AIPAC, le puissant lobby pro-israélien, il envisage de proposer, lors d’un discours programmé devant le Congrès américain, un « accord intérimaire » aux Palestiniens,

Bien évidemment, Mahmoud Abbas a, immédiatement, rejeté l’idée d’un tel accord.

Tout en précisant que n’étant tenu ni au « diplomatiquement » ni au « politiquement correct », nous ne croyons pas à la volonté réelle de Mahmoud Abbas, auteur d’une thèse de doctorat d’histoire, négationniste sur la Shoah, soutenue, à la fin des années 70, à l’université de Moscou et qui, il y a quelques semaines, encore, faisait l’apologie du grand mufti de Jérusalem, allié actif des nazis, de faire la paix avec Israël.(v. nos réflexions, en janvier 2008, sur « Mahmoud Abbas : Janus à deux têtes »).

Mais, il n’en demeure pas moins qu’à nos yeux, le projet de Netanyahou n’a, objectivement, aucune chance d’aboutir.

Tout d’abord, cette proposition vient un peu tard.

N’oublions pas que parvenu au pouvoir en janvier 2009 ce n’est qu’à l’automne de cette même année que Benyamin Netanyahou a accepté de promouvoir un moratoire, c’est à dire, un « gel » des constructions dans les Territoires et ce pour une durée limitée à 10 mois seulement.

Et, alors que des négociations directes venaient de s’engager, après une amorce de négociations indirectes, via des émissaires américains, le Premier ministre refusa, à l’automne 2010 de prolonger ce moratoire, alors que les Palestiniens en avaient fait une condition de la poursuite de ces négociations.

Certes, on nous dira – avec sans doute quelque raison - que cette condition était un moyen commode trouvé par les Palestiniens pour torpiller la poursuite des négociations.

Mais, il n’en demeure pas moins qu’ainsi que nous nous sommes permis de le répéter, à plusieurs reprises, ici même, il n’y a aucune urgence pour poursuivre les constructions au delà de la Ligne verte de 1967.

Bien au contraire, la situation actuelle des « implantations », qui représentent déjà près du dixième de la population juive d’Israël constitue, nécessairement, un élément de la négociation et augmenter cette population ne fera qu’accroître les difficultés de mise en œuvre des frontières qui seront adoptées.

Rappelons qu’à notre connaissance les 8 000 Israéliens évacués de la Bande de Gaza il y a plus de 5 ans, ne sont pas encore tous réinstallés…..

Même si, contrairement à ce que la grande majorité des Etats soutient à tort, la Ligne Verte n’est pas une ligne frontière, mais une ligne de cessez-le-feu, elle n’en servira pas moins de base de discussion.

On ne connaît pas d’ailleurs le contenu exact de cette « initiative diplomatique », si ce n’est qu’elle prévoirait un « Etat indépendant aux frontières temporaires »….

On peut toujours imaginer des options nouvelles, mais une telle hypothèse, jamais mise en œuvre, nous paraît parfaitement irréaliste.

La situation actuelle, depuis 1994, n’est certes pas satisfaisante.

Rappelons-en les grandes lignes : il existe, en Cisjordanie, 3 zones :

⁃ Zone A , comprenant les principales villes peuplées par les Palestiniens (Jenine, Ramallah, Tulkarem, Naplouse, Bethléem,….) couvrant environ 18% du Territoire et relevant entièrement de l’Autorité palestinienne.

⁃ - Zone B : (un certain nombre de bourgades et de camps de réfugiés), couvrant 20% du Territoire et relevant de l’administration de l’Autorité palestinienne, cependant que le maintien de l’ordre associe Palestiniens et Israéliens.

⁃ Zone C : (où se trouvent les « implantations » israéliennes) couvrant 60% de la superficie de la Cisjordanie et relevant entièrement des autorités israéliennes.

C’est donc la Zone C qui devrait être logiquement « dégonflée » au profit des zones A et B.

Alors pourquoi ne pas « geler » en quelque sorte la situation actuelle pour préserver les négociations à venir ?

Il y a, par ailleurs, le problème des « avant-postes illégaux », comme les appellent les autorités israéliennes elles-mêmes.

Ces avant-postes ont pullulé depuis 1999 et si, périodiquement, on annonce leur démantèlement, celui-ci tarde à intervenir ou lorsqu’il intervient – non sans violence, comme récemment, par exemple – il n’est que temporaire…..

On apprend, par ailleurs, que Benyamin Netanyahou aurait donné des instructions au Parquet pour régulariser la situation de certains de ces « avant-postes »…..

Donc un pas en avant et un, voire deux, en arrière…..

Le Premier ministre israélien avait, d’ailleurs, reconnu l’opportunité d’un arrêt des constructions puisqu’il avait finalement subordonné la poursuite du gel de celles-ci à l’acceptation par les Palestiniens de la reconnaissance du caractère juif de l’Etat d’Israël.

Certes, Mahmoud Abbas avait refusé d’accepter cette condition, pourtant tout à fait légitime, mais le tort de Netanyahou ne portait pas sur le fond, mais sur la forme.

Il n’avait pas à subordonner la poursuite des négociations à cette reconnaissance, qui, nécessairement, faisait partie du corps même des négociations..

Autrement dit, il eut été mieux inspiré d’admettre, à l’automne dernier, le gel du statu quo et de poursuivre les négociations, qui, peut-être – mais c’eut été alors la preuve de la mauvaise volonté de l’Autorité palestinienne – auraient buté sur ce principe essentiel, à savoir la vocation d’Israël d’être l’ « Etat juif » (ou des Juifs), comme l’Etat de Palestine a vocation à être l’Etat arabe envisagé par la résolution des Nations Unies de 1947.

Sans le reconnaître, il faut bien admettre que Benyamin Netanyahou appréhende l’échéance de septembre 2011, d’où l’annonce qu’il compte faire en mai dans l’espoir de retarder cette échéance.

En août 2010, le Quartette des « médiateurs » (Etats-Unis, Russie, Union européenne et ONU) avait, en effet, fixé pour objectif la signature d’un accord israélo-palestinien aboutissant à l’établissement d’un Etat palestinien, avant septembre 2011.

Et les Palestiniens ne cachent pas, pour leur part, qu’ils comptent sur la prochaine Assemblée générale de l’ONU (qui s’ouvre traditionnellement en septembre) pour y soumettre la question d’une reconnaissance de l’Etat de Palestine, qui a, déjà fait l’objet d’un certain nombre de reconnaissances individuelles.

Le Premier ministre israélien qui n’a jamais manifesté un grand enthousiasme pour l’établissement d’un Etat palestinien, qui devrait être l’objectif à atteindre par les négociations, s’est sans doute rendu compte que le temps ne travaillait peut-être pas pour lui.

Mais, il n’est pas sûr que la meilleure façon de régler un différend consiste à faire « cavalier seul » et à présenter « son » plan comme « la » solution…..



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