Ce roman historique emmène le lecteur depuis les montagnes des Carpates, à l’aube du XXe siècle, alors que l’empire austro-hongrois se meurt, à la frontière suisse en septembre 1944, en l’ayant fait passer par Vienne et sa Faculté de Médecine alors si renommée, Budapest et ses palais, Genève, cet havre de paix, ou encore les plaines hongroises et Paris. Alors que les pays européens se déchirent dans deux guerres meurtrières successives. Un panorama historique fouillé, un rappel de ce que furent les bases de l’Europe actuelle, rendus vivant par les personnages très divers qui le traversent. Un ouvrage passionnant.
Michèle Mazel, l’auteur de cette saga, n’en est pas à son premier ouvrage et on la connaît surtout pour ses romans policiers, qui se situent en Israël, ou un journal très riche de ce que fut son expérience égyptienne aux côtés de son époux diplomate qui a été deux fois en poste au Caire, la seconde comme Ambassadeur d’Israël. Cette fois elle nous livre un genre différent, avec une saga historique qui débute et se passe en Europe, principalement dans une Europe de l’Est qui lui est chère. Comme elle l’a toujours fait, elle apporte à ses personnages le même souci du détail qui les rend très présents. En commençant par le remarquable et très complexe personnage central Julius Matthias, né dans une famille juive modeste, avec un père très pratiquant, pourtant un peu atypique, ce qui lui fera découvrir d’autres horizons, mais habité par une volonté farouche de devenir médecin malgré tous les obstacles et acceptant, pour y parvenir, un marché qui s’avéra être un piège mais qu’homme de parole, il respecta néanmoins jusqu’au bout.
Nous sommes, en effet, à une époque de mariages arrangés, obligés parfois, de sociétés fermées, de contraintes, de manque de libertés individuelles. Et il y a ces guerres tragiques avec tant de soldats blessés, mutilés, devenus mendiants. Cet antisémitisme aussi, tantôt discret, tantôt violent, mais toujours présent, lui aussi, en toile de fond. La foi et pratiques religieuses aussi sont évoquées. Ou l’amitié, parfois fragile ou encore les rapports parents enfants et hommes femmes.
Enfin, survient la guerre en 1939, avec les hésitations, compromissions, de divers dirigeants et l’arrivée au pouvoir d’Hitler. Une Europe à nouveau déchirée avec un antisémitisme ayant désormais libre cours. On croise alors Adolf Eichmann et la terreur qu’il répandait…La famille de Matthias dispersée, Julius et son épouse se trouvèrent piégés dans leur ville natale, dans une communauté détruite. Note d’espoir parmi les larmes, pourtant dans les dernières pages car tous ne périrent pas…
Le lecteur espère une suite pour retrouver les personnages qui ont survécu au cataclysme ou savoir ce que sont devenus ceux dont le sort est resté incertain.
Le Médecin des Carpates, de Michèle MAZEL, Éditions Vérone, 348 pages, 23,00 €