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L’obsession du tramway de Jérusalem
par David Ruzié, professeur émérite des universités, spécialiste de droit international
Article mis en ligne le 29 août 2007

Une fois encore, la question de la construction du tramway de Jérusalem a été évoquée, lors d’un point de presse du Quai d’Orsay (v. compte rendu du mercredi 29 août). L’interlocuteur habituel du porte-parole, toujours coriace lorsqu’il s’agit de mettre en cause Israël, a indiqué que « des appels au boycott de la société Alstom circulent au motif qu’elle effectue les travaux de construction d’un tramway dans les territoires occupés autour de Jérusalem, ce qui est contraire au droit international, et hypothèque le résultat des négociations demandées par la communauté internationale pour parvenir à la paix ».

Et à la question :. « Quelle est la position officielle française ? », la réponse a, tout d’abord, été : « Nous avons exprimé notre position à plusieurs reprises sur ce sujet. La participation française à la construction du tramway de Jérusalem est le fait d’entreprises privées et ne saurait donc être imputée à l’Etat français ».

Jusque là rien à dire.

Puis, le porte-parole a tenu à préciser que « Nous avons fait part aux dirigeants des entreprises concernées des préoccupations des autorités palestiniennes au sujet d’une partie de ce projet qui vise à la construction du tramway de Jérusalem. Nous maintenons en tout état de cause notre position de principe sur le statut final de la ville de Jérusalem qui doit être négocié entre les parties. ».

Si nous n’avons, non plus, rien à redire à l’idée que le statut final de la ville de Jérusalem soit négocié entre les parties, nous avouons ne pas comprendre la démarche « informative » auprès des entreprises concernées, à moins, qu’implicitement - et ce serait regrettable - que les autorités françaises voient un inconvénient à l’implication de sociétés françaises dans un investissement en Israël, surtout à une époque où l’on enregistre un déficit important dans la balance commerciale française.

Et le « journaliste » en question revient à nouveau à la charge, n’étant, apparemment, pas convaincu par le style diplomatique de son interlocuteur, en posant cette question « Alstom est une société de droit français dont l’Etat détient 15 %. Que dit la loi française concernant ce genre d’activité qui va à l’encontre du droit international ? Surtout que le président Sarkozy dans son discours a insisté sur la nécessité de la négociation pour aboutir à la paix dans cette région ? ».

Réponse non moins diplomatique : « Je vous renvoie à ma réponse précédente ». Réponse qui n’en était pas une sur ce point.

Nous regrettons surtout que le diplomate n’ait pas eu le courage, sinon la franchise de dire, ainsi que nous l’avons indiqué, à deux reprises ici même (v. nos points de vue des 6 novembre 2005 et 17 janvier 2007), que la construction du tramway de Jérusalem n’est en rien contraire au droit international.

Pour autant que la 4ème convention humanitaire de Genève sur le statut des populations civiles dans les territoires occupés soit concernée (ce qui est loin d’être évident, s’agissant de Jérusalem), cette entreprise ne contrevient ni à la lettre, ni à l’esprit de ce texte.

Comme nous l’avons déjà indiqué, ce tramway n’est pas de nature à permettre des transferts de population, qui effectivement sont interdits par cette convention.

Tout aussi stupide serait de soutenir que cette construction obère le statut futur de la ville.

En réalité, au même titre qu’il y a quelques mois des esprits mal intentionnés s’en étaient pris aux travaux entrepris par les autorités israéliennes pour sécuriser l’accès au Mont du Temple/Esplanade des Mosquées, de la même façon des esprits chagrins s’en prennent au projet de tramway, en tant qu’indice de la présence juive à Jérusalem.

Nous voudrions enfin rappeler que l’implication de sociétés françaises dans un projet de développement des moyens de transport à Jérusalem ne peut, en aucun cas, entraîner des poursuites devant les juridictions françaises, puisque aucune règle de droit international ne s’oppose à ce projet.

C’est, sans doute, la raison pour laquelle, le « journaliste de service » a évoqué un appel au boycott lancé contre la société Alstom.

Mais, une telle initiative tomberait, elle, sous le coup de la loi pénale, sur la base de l’article 225-2 2 du nouveau code pénal (ex- article 416-1 de l’ancien code pénal, introduit par la loi anti-boycott du 7 juin 1977), qui réprime toute entrave à « l’exercice normal d’une activité économique quelconque, sur la base d’une discrimination à raison de l’appartenance à une nation ((la nation israélienne, en l’occurrence, avec laquelle on ne devrait pas commercer).

Certes, la loi du 7 juin 1977 a prévu que le gouvernement pourrait, par voie de directive, déclarer cette disposition inapplicable dans le cadre de sa politique économique et commerciale.

Or, on voit mal le président Sarkozy, pas plus que ne l’avaient fait ses prédécesseurs Mitterrand et Chirac, cautionner, comme l’avait, pourtant, fait le président Giscard d’Estaing, une initiative du genre de celle prise par Raymond Barre, qui par voie d’avis publié au Journal Officiel, le 24 juillet avait, pratiquement, vidé de sa substance, s’agissant d’Israël, la loi anti-boycott.

On ne doit pas, en effet, oublier que l’ancien Premier ministre, récemment disparu, outre des paroles désobligeantes à l’égard des Juifs, n’a pas hésité, à un moment de sa carrière, à faire prévaloir, au détriment d’Israël, des « principes mercantiles » au détriment de la « légalité républicaine », comme devait le souligner le Conseiller d’Etat, Mme Hagelsteen, lorsque l’affaire vint devant la Haute juridiction administrative, qui annula, le 18 avril 1980, l’« avis Barre ».

Mais, Raymond Barre ne s’avoua pas vaincu et revint, immédiatement, à la charge contre la loi anti-boycott en édictant, cette fois, une « directive , le 9 mai 1980, qui se fondait sur une interprétation spécieuse de l « origine nationale ».

Heureusement que peu de temps après son arrivée à l’Elysée, le président Mitterrand fit édicter, le 17 juillet 1981, par le Premier ministre Pierre Mauroy, une circulaire, qui redonnait plein effet à la loi anti-boycott (et ce malgré la présence au sein du gouvernement comme ministre du commerce extérieur de Michel Jobert, qu’Israël ne comptait cependant pas parmi ses amis).

Il y a donc lieu de rester vigilant devant ce qui constitue une tentative de revivification du boycott d’Israël.



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