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Des gesticulations sans grande portée pratique
Par David Ruzié, professeur émérite des universités, spécialiste de droit international
Article mis en ligne le 6 décembre 2010
dernière modification le 7 décembre 2010

Après le Brésil, vendredi dernier, c’est au tour de l’Argentine, lundi, d’avoir décidé de reconnaître « la Palestine comme un Etat libre et indépendant à l’intérieur des frontières de 1967 ». Tant que la méthode Coué n’aura pas été reconnue comme l’une des sources du droit international, ce ne sont pas ces déclarations intempestives, même si elles risquent de se multiplier (on parle déjà de la prochaine reconnaissance par l’Uruguay), qui sont de nature à produire un quelconque effet juridique.

Certes, en février dernier, Bernard Kouchner, alors ministre des affaires étrangères, avait envisagé « la proclamation rapide d’un Etat palestinien et sa reconnaissance immédiate par la communauté internationale, avant même la négociation sur les frontières » (http://www.lejdd.fr/International/A...).

Mais, ce n’était pas la première fois que l’ancien « french doctor », tentait de se faire remarquer pour prouver son existence.

Toutefois, était-il lucide, en son for intérieur, car après avoir dit « Je serais tenté par cela », il ajoutait : « Je ne suis pas sûr d’être suivi, ni même d’avoir raison ».

Effectivement, il avait tort.

Car, pas plus une déclaration unilatérale d’indépendance ne peut créer un Etat, pas plus des reconnaissances intempestives peuvent aboutir à ce résultat.

S’agissant des déclarations unilatérales d’indépendance, la preuve en est que la proclamation de l’établissement de l’Etat de Palestine, par le Conseil national de l’OLP, en 1988, n’avait eu aucune portée pratique, malgré une reconnaissance par près d’une centaine de pays .

Vainement invoquera-t-on le précédent récent du Kosovo, dont la Cour internationale de justice (CIJ) vient, d’ailleurs, d’admettre que la déclaration d’indépendance ne violait pas le droit international (avis consultatif du 22 juillet 2010).

En effet, le Kosovo, précédemment « province socialiste autonome » à l’époque de la République fédérative de Yougoslavie, puis province de la République de Serbie-et-Monténégro » faisait l’objet d’une délimitation administrative au sein des entités étatiques, dont ce territoire faisait partie.

Or, il est parfaitement admis que des limites administratives préexistantes peuvent, le moment venu, devenir des frontières.

Tel a été le mécanisme utilisé dans le cadre de la décolonisation, tant en Amérique centrale et du sud au XIXème siècle qu’en Afrique au XXème siècle.

Mais, tel n’est pas le cas de la « Palestine ».

On ne se lassera jamais de rappeler que les fameuses (ou plutôt fumeuses) frontières de 1967 n’existent pas à moins de nier la réalité des textes et de l’esprit dans lequel ils ont été rédigés.

Non seulement, en 1949, dans l’accord d’armistice avec la Jordanie, alors présente en Cisjordanie, il était précisé que ce que l’on devait appeler, par la suite, la « Ligne verte », n’était qu’une ligne de cessez-le-feu servant de délimitation entre les forces combattantes, mais, de plus, par la suite, les représentants jordaniens à l’ONU ont répété, à plusieurs reprises, qu’il n’y avait pas de « frontières » .

On ne peut pas être « plus royaliste que le roi ».

Ce n’est pas parce que les juges de la CIJ, ont, dans leur avis consultatif, rendu en 2004 à propos du mur/barrière de sécurité, considéré que cette construction était illégale parce qu’établie au delà des frontières de la Palestine, prenant, ainsi, la « Ligne verte » pour frontière, que cela reflète la réalité du droit international.

Jusqu’à preuve du contraire, même et surtout dans le cadre de sa compétence consultative, la CIJ ne peut aller à l’encontre de la lettre et de l’esprit des instruments diplomatiques (en l’espèce l’accord d’armistice avec la Jordanie).

Ainsi, même si l’initiative prise par le président brésilien, en fin de mandat, Lula, faisait tâche d’huile, cela n’aurait pas plus d’effet juridique que la reconnaissance de la Déclaration unilatérale d’indépendance proclamée par l’OLP en 1988.

« Cette décision regrettable ne contribuera en rien à changer la situation entre Israël et les Palestiniens », a affirmé, à juste titre, de notre point de vue, le porte-parole du ministère israélien des affaires étrangères, Yigal Palmor.

En revanche, nous nous permettons de considérer comme bien timide la qualification, par ailleurs, par Ygal Palmor de « regrettable » et « décevante » la décision de l’Argentine.

Rappelons que dans les années 50, la République fédérale d’Allemagne avait décidé de rompre les relations diplomatiques avec les pays, qui reconnaissaient la nouvelle République démocratique allemande. (doctrine Hallstein).

Incontestablement, la décision prise, d’ores et déjà, par le Brésil et l’Argentine constitue un acte inamical.

Israël ne peut se voir imposer des frontières de façon unilatérale que ce soit par les Palestiniens ou par un ou plusieurs Etats.

Mais, il faut également signaler, comme nous ne manquons jamais de le faire, quand l’occasion se présente, qu’Israël ne peut pas, davantage, fixer unilatéralement ses frontières avec le futur Etat palestinien.

Celles-ci ne peuvent découler que d’un accord avec la partie palestinienne.

Certes, les « implantations » ne préjugent, par elles-mêmes, en rien du tracé des futures frontières, mais nous pensons que leur extension (par la poursuite des constructions) ne peut que rendre plus difficile la réalisation d’un accord sur ce point.

Il est toujours très difficile de remettre en question l’état des lieux.

Nous estimons que les Palestiniens, de leur côté, rendent plus difficile la marche vers un accord de paix en s’obstinant à refuser d’admettre, comme l’avait admis l’ONU, en 1947, qu’Israël, en tant qu’ « Etat juif » à côté d’un « Etat arabe », a vocation à être l’Etat des Juifs.

De leur côté, les autorités israéliennes, en poursuivant les constructions en Cisjordanie, rendront plus difficile le rapatriement d’un certain nombre des 300 000 israéliens, actuellement, installés dans les Territoires.

De même, la poursuite des constructions à Jérusalem contribue à une extension continue de la superficie de la Ville, au détriment du futur Etat palestinien.

Inutile de rendre plus difficiles les négociations et la mise en œuvre de leur résultat, mais ce n’est pas non plus une raison pour l’autre partie de poser des conditions pour leur ouverture.

L’essentiel c’est de se parler et pas seulement dans le cadre d’un combat, en commun, contre le feu……



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