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par David Ruzié, professeur émérite des universités, spécialiste de droit international
mardi 22 avril 2008
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On ne saura, sans doute, jamais ce qui s’est effectivement dit au cours de l’entretien que Jimmy Carter a eu avec le chef du Bureau politique du Hamas. Mais à en juger par les mises au point diffusées du côté palestinien, il semble que l’ancien président américain ait cru entendre ce qu’il voulait entendre et ait pris « ses désirs pour des réalités ».
Il n’est, certes, pas étonnant, que selon Le Monde , daté du 23 avril, « Jimmy Carter dresse un bilan positif de son dialogue avec le Hamas ». Car, on n’est jamais mieux servi que par soi-même.
De leur côté les journalistes y vont de leur propre compte rendu de propos qu’ils n’ont, bien évidemment, pas entendus, directement.
Du moins y a t il une nouvelle « bonne idée » qui se fait jour.
Le correspondant du Monde à Jérusalem cite Khaled Mechaal qui aurait déclaré : « Nous acceptons un Etat palestinien dans les frontières du 4 juin 1967 avec Jérusalem pour capitale. Un Etat souverain sans les colonies avec le droit de retour des réfugiés palestiniens mais sans la reconnaissance d’Israël ».
Comme le constate Michel Bôle-Richard, « cette position n’est pas tout à fait nouvelle », car il « reste toutefois à savoir quelles concessions sur les frontières, sur Jérusalem et sur le droit de retour des réfugiés, les islamistes seraient prêts », sans parler d’un élément nouveau auquel fait allusion le journaliste français, à propos du référendum évoqué par Khaled Mechaal, à savoir « si les Palestiniens de Gaza et de Cisjordanie seraient ou non les seuls concernés par un tel référendum ».
Or, comme on le sait , la « diaspora » palestinienne compte actuellement plus de huit millions de personnes. En effet, il n’y a pas seulement 4,4 millions de « réfugiés » qui relèvent de l’Office de secours et de travaux des Nations unies pour les réfugiés de Palestine dans le Proche-Orient (UNRWA). Or, pour cet organisme, la notion de « réfugié » couvre non seulement toutes les personnes, dont le lieu de résidence habituelle était la Palestine entre juin 1946 et mai 1948 et qui ont perdu, à la fois leur domicile et leurs moyens de subsistance en raison du conflit israélo-arabe de 1948, mais également leurs descendants......
Et à cette première catégorie, qui continue à augmenter du fait de l’accroissement naturel de la population, s’ajoutent près de 4 autres millions de personnes, qui, de près ou de loin (ou plutôt de loin), ont des liens avec le territoire, autrefois placé sous mandat britannique. Ces « Palestiniens d’origine » sont disséminés dans le monde entier : pas seulement dans les pays voisins (Liban, Syrie, Jordanie, Egypte), mais également dans les pays du Golfe, en Amérique du nord et en Amérique du sud.
Mais, à la limite, la question du « collège électoral » est secondaire par rapport au texte d’accord qui lui serait soumis.
Et pour en revenir à la question essentielle du contenu de cet accord, il s’avère que le Hamas n’a jamais laissé entendre qu’il était prêt à faire des concessions - mis à part si on peut appeler cela une concession - l’idée d’une trêve (« houdna ») de 10 ans, c’est à dire un sursis à la destruction de l’Etat d’Israël.
Pas plus que l’idée autrefois avancée, dans les milieux palestiniens, et qui refait parfois surface, d’un « Etat bi-national », cette coexistence provisoire n’est à envisager sérieusement.
De fait, chez bon nombre d’arabes (et nous utilisons à dessein cette appellation) on ne se résoudrait à admettre cette coexistence provisoire que comme un pis-aller, que comme une première étape vers la « libération de la Palestine » toute entière.
C’était d’ailleurs l’une des facettes du double langage que Yasser Arafat tenait, même au lendemain des accords d’Oslo.
Et, à cet égard, nous voudrions citer l’opinion émise par une intellectuelle algérienne, dans une récente interview au journal suisse La Tribune de Genève et que nous a aimablement transmise un de nos correspondants : « Personne dans le monde arabe ne veut de l’Etat d’Israël. Ceux qui disent le contraire, c’est par déception ou par pragmatisme. Mon avis, c’est qu’il faut laisser faire l’histoire. Accepter maintenant la solution politique de deux Etats côte à côte, pour soulager la souffrance du peuple palestinien. Mais à terme, les juifs doivent partir. Tout comme les Français ont fini par quitter l’Algérie ».
Comparer la présence française en Algérie (depuis 1830) à la présence juive permanente au cours des siècles, sur un territoire, qui connut un Etat juif avant même toute implantation de l’Islam, en dit long sur la culture - ou plutôt l’inculture - de ceux que l’on présente comme des gens éclairés, voire modérés.
Pour Michel Bôle-Richard, Jimmy Carter aurait eu le courage de dire que « la stratégie actuelle visant à exclure le Hamas et la Syrie....contribue à exacerber le cycle de violence ». Or, affirmer une absurdité - car on ne peut exiger que l’on doive discuter avec des gens qui vous refusent le droit à l’existence - ne suffit pas à constituer un acte de courage, mais ce serait, plutôt, faire preuve de naïveté, voire d’irréalisme.
Et le correspondant du Monde d’évoquer, bien évidemment, en conclusion, « l’artisan des accords de paix entre l’Egypte et Israël ».
Or, on ne peut comparer la stature d’homme d’Etat de l’égyptien Anouar el Sadate avec la pâle figure de Mahmoud Abbas, qui nous l’avons déjà relevé, apparaît souvent comme un « Janus à deux têtes ».
En revanche, curieusement du côté israélien, la situation n’est pas différente qu’à l’époque de Camp David. Les « antécédents » de Menahem Begin ne le prédisposait pas à faire des concessions, ce qu’il fit cependant et il en est de même, actuellement, d’Ehoud Olmert qui, a connu un parcours politique comparable à celui de Begin et qui a, déjà , fait savoir qu’il était prêt à des concessions.
Pour faire la paix, non seulement il faut deux partenaires également déterminés et, surtout, la paix implique qu’on « enterre la hache de guerre », mais pas, en annonçant, déjà , qu’en tout état de cause, on a décidé de la déterrer dans dix ans.
Sans compter qu’il ne faut pas confondre « paix » et « capitulation » : or, pour l’instant, sur les trois points évoqués, au début de cet article, il n’est pas question de concessions, mais de conditions......