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Israël, terre d’asile pour des Africains
Stéphane Amar | La Presse
Article mis en ligne le 29 mars 2008

« La traversée de la Méditerranée pour se rendre en Europe est devenue trop dangereuse et trop chère. Alors j’ai traversé l’Afrique à pied pour gagner Israël. Le voyage a duré plus de trois ans, car, à chaque étape, je devais travailler pour pouvoir continuer », raconte Yacouba Koné, venu de la Côte-d’Ivoire.

Comme pour beaucoup de ses compagnons d’infortune, l’étape la plus douloureuse fut la dernière : l’Égypte. Nombre de réfugiés affirment que les Noirs y sont traités comme des esclaves, puis comme du gibier lorsqu’ils tentent de traverser la frontière avec Israël. « L’armée égyptienne nous a tiré dessus, mais j’ai réussi à m’échapper. Des réfugiés qui voyageaient avec moi sont morts », regrette Yacouba Koné.

Depuis quelques mois, Israël fait face à un afflux massif de réfugiés africains. Les premiers à demander asile furent les persécutés du Darfour, puis les Érythréens, et enfin les Ivoiriens.

Alors que l’État juif avait accueilli à peine 2000 réfugiés entre 2000 et 2006, il a dû en absorber plus de 7000 pour la seule année 2007. « Les autorités israéliennes sont complètement débordées, confie Johannès Lemma, coordonnateur d’une association d’aide aux réfugiés à Tel-Aviv. Tout repose sur des initiatives privées. »

Les conditions de vie des réfugiés africains sont déplorables. Plusieurs asiles improvisés ont fleuri au cours des derniers mois dans le quartier de la gare centrale. Ainsi, dans une discothèque désaffectée s’entassent 400 personnes, hommes, femmes et enfants.

« Nous ne survivons que grâce à la générosité des gens, témoigne Djamadé Emori, un Ivoirien. On nous apporte des sacs de riz, des fruits. Jusqu’à quand pourra-t-on tenir comme cela ? »

Improvisation

Face à cette vague, Israël improvise. Des permis de travail ont été délivrés à certains réfugiés, d’autres ont été reconduits dans leur pays d’origine.

« Israël n’a encore établi aucune politique cohérente pour ces réfugiés, déplore Myriam Darmoni-Charbit, présidente du Centre d’assistance pour les étrangers en Israël. On gère au cas par cas. Un jour, le gouvernement explique qu’il est du devoir de l’État juif d’accueillir ces réfugiés, le lendemain, il parle d’un tsunami qu’il faut enrayer. Nous demandons simplement qu’ils soient traités décemment et qu’Israël fixe un quota de réfugiés comme cela se pratique ailleurs en Occident. »

Pétris de culture biblique comme les Érythréens, issus d’un pays ami de l’État juif comme les Ivoiriens ou attirés par la prospérité israélienne, les réfugiés africains considèrent Israël comme une terre promise, au sens propre du terme. Sur place, ils déchantent. « Au pays, on entend qu’Israël accueille bien les Africains. Je suis arrivé il y a deux mois et je dois aujourd’hui me rendre à l’évidence : il n’y a pas de place pour nous ici », se désole Djamadé Emori.

Jean-Michel Bolima fait figure de vétéran parmi les réfugiés africains. Ce quadragénaire arrivé en Israël en 2000, grâce à un stage d’agronomie, a fini par demander l’asile. « Nous comprenons qu’Israël ne puisse pas accueillir tous les réfugiés, dit-il. C’est un pays en guerre avec ses voisins, qui a des problèmes plus urgents. Mais c’est aussi un pays riche, et nous pensons qu’il pourrait faire davantage pour soulager la détresse de ces réfugiés. »

Bousculé par ces critiques, le gouvernement d’Ehoud Olmert ne parvient pas à trancher. En début de semaine, il a évoqué des reconduites massives à la frontière. Deux jours plus tard, il annonçait un compromis : si les réfugiés acceptent de s’établir au centre de détention de Ketziot, dans le désert Néguev, ils pourraient obtenir des permis de travail dans les exploitations agricoles du sud du pays.

Malgré la désillusion, les réfugiés estiment qu’Israël restera encore longtemps une terre d’asile pour l’Afrique.

« Nous avons des difficultés avec les autorités, mais en Israël, contrairement à ce qui se passe en Europe, nous sentons de la compassion dans le regard des gens, confie Jean-Michel Bolima. Les Juifs aussi ont été des réfugiés il n’y a pas si longtemps. Comme nous, ils ont été disséminés sur toute la planète. Ils peuvent comprendre notre détresse. »

Photo AFP



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