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La paix pas maintenant
Par Jean Tsadik © Metula News Agency
Article mis en ligne le 21 janvier 2004

Durant ces deux derniers jours, les directions politique et militaire de l’Etat d’Israël ont tenu de multiples réunions afin de définir la nature de la riposte qu’il convenait d’effectuer suite à l’agression du Hezbollah contre les servants du bulldozer de Zarit.

Finalement, Israël s’est contentée d’une réaction qualifiée, à juste titre, de « cosmétique » par le vice secrétaire de l’organisation terroriste chiite à Beyrouth. Les autres options envisagées incluaient une attaque de positions des forces d’occupation syriennes dans le pays aux cèdres ainsi qu’une action dans la profondeur du territoire syrien.

La décision de ne recourir qu’à une riposte symbolique a été prise d’un cheveu, suite à d’intenses consultations de travail entre les gouvernements américain et israélien. Le raid aérien, durant lequel trois missiles air-sol ont été tirés, est cependant assorti du plus précis message de menace jamais diligenté, par voie diplomatique, au régime alaouite. Les Etats-Unis et l’Etat hébreu ont fait ainsi savoir au Président Assad que la prochaine provocation violente de ses supplétifs au Sud Liban pourrait très mal se terminer pour lui.

Le but recherché par Jérusalem et Washington dans la modération de la riposte israélienne consiste à priver Damas de toute échappatoire de la situation hyper délicate dans laquelle elle s’est fourrée. Une attaque israélienne contre des objectifs syriens n’aurait pas seulement fait l’effet d’une réponse rugueuse aux appels de dialogue lancés par la diplomatie syrienne ; elle aurait aussi cristallisé le rôle prétendu de Béchar el-Assad, de dernier défenseur des Arabes contre l’armée israélienne. Et ce rôle aurait, d’une certaine manière, diffusé la gravité des révélations qui s’amoncellent quant aux délits perpétrés par la dictature damascène.

On pourrait également s’étonner de la tiédeur des réactions du gouvernement de Jérusalem face aux offres, de plus en plus généreuses, faites par les Syriens. Ariel Sharon et ses ministres se contentant de faire des allusions évasives et non constructives relativement à ces offres. C’est ainsi que notre Premier ministre a déclaré hier, de façon très inachevée, que ce que les Syriens rechercheraient dans d’éventuelles négociations confinerait à l’abandon du Golan par Israël. Et alors, a-t-on envie de demander ? Tous les officiers supérieurs de l’armée savent pertinemment qu’un accord de paix avec Assad embrasserait le Liban et qu’il signifierait la fin de l’état de guerre entre Israël et ses voisins arabes. Dès lors qu’un tel accord serait signé, la confrontation avec les Palestiniens deviendrait un problème résiduel, presque une simple question de maintien de l’ordre. Et ces officiers, de même que les stratèges et les experts israéliens du politico stratégique savent aussi qu’Israël ne dispose stratégiquement pas du luxe de laisser passer une bonne occasion de mettre fin à cette guerre interminable, fut-ce au prix de sacrifices territoriaux. Ils savent que notre suprématie militaire n’est guère plus qu’un moyen devant permettre d’assurer notre survivance, ce jusqu’au moment où la région pourra être pacifiée et où l’existence d’Israël aura été intégrée comme un facteur durable par nos voisins arabes.

Cette doctrine a toujours été celle des dirigeants d’Israël, qu’ils aient indistinctement appartenu au mouvementtravailliste ou au Likoud. Avec les dernières propositions syriennes énoncées à New York, mais déterminées par le ministre des Affaires Etrangère Al-Shara, abandonnant toute pré condition à la reprise des pourparlers et laissant percevoir la possibilité d’arrangements territoriaux (pour la première fois) on en viendrait presque à chatouiller le slogan qui fut cher à feu Menahem Bégin et à Bibi Netanyahu, de « la paix contre la paix ».

Dans ces conditions, pourquoi le gouvernement Sharon ne donne-t-il pas suite ?

Surtout que les encouragements et les assurances quant à l’authenticité de la nouvelle souplesse syrienne affluent à Jérusalem. D’Ankara, par exemple mais surtout de la part du Président Moubarak, qui déploie une énergie extraordinaire afin de persuader Ariel Sharon de parler à Assad ; au point de lui promettre la rencontre en tête-à-tête que le raïs lui a toujours refusé. Au point de donner à Israël des garanties tangibles, quant à l’arrêt par le Caire de la fourniture des armes de l’Intifada à Yasser Arafat, par les tunnels de Rafah.

En fait, l’excitation de Moubarak n’est pas naïve, elle a pour but de sauver la tête du fils de Hafez el-Assad, dont les cheveux sont déjà pris dans l’engrenage d’une machine à broyer. Et la seule façon de sauver Béchar et son régime consiste à transformer la Syrie, à la vitesse du Concorde, d’un jalon monstrueux de l’Axe du mal en partenaire appréciable des USA, remplissant pour son compte des fonctions importantes. En d’autres termes, pour sauver el-Assad, il faudra que les Américains aient plus de raisons pragmatiques de le garder que de l’éliminer. Dans ces conditions, si Damas pouvait conclure un traité de paix avec Jérusalem, presque à n’importe quel prix, et s’en porter garant contre les courants islamiques qui effrayent toujours autant Washington, ces fonctions supplanteraient en importance les excellentes raisons, qu’au Capitole, on a de se débarrasser de l’Opticien et de sa clique et que l’opinion publique ne connaît que très partiellement.

Dans cette conjoncture, la Maison Blanche a adressé une demande à monsieur Sharon, le priant instamment d’abandonner temporairement le dogme sécuritaire d’Israël et « de ne pas sauter sur les propositions de El-Assad ». « Et si d’aventure le Syrien entendait forcer son destin et accepter l’invitation du Président Katzav à se rendre en Israël », demanda-t-on du côté de chez Swann ? - Recevez-le sans empressement, avec correction, mais surtout laissez-le repartir les mains vides. Qu’il ait fait le voyage de Jérusalem pour rien, fit l’écho de l’autre côté de l’Océan.

Pourquoi cette volonté américaine de compléter l’isolation du régime syrien, alors même qu’il donne des signes d’assagissement, demanderont les lecteurs de la Ména ? Bien parce que cela fait maintenant neuf mois que les cellules spéciales de juges d’instruction, recrutées parmi les meilleurs éléments du FBI, de la CIA et de l’armée US, interrogent sans relâche et dans le plus grand secret les centaines de cadres de l’ex-gouvernement de Saddam Hussein et que les fruits de leur cueillette sont confondants au-delà de toute prédiction. Le point culminant de cette énorme enquête sera le procès de l’ancien dictateur mais George Bush est bien décidé à ne pas circonscrire le jugement à la stricte personne de Saddam Hussein. Ce procès sera celui de l’Axe du mal. Outre les ramifications de l’ancien Irak avec les autres Etats terroristes, les Yankees sont fermement décidés à dévoiler (une partie du moins) des relations très exceptionnelles qui liaient l’entourage du tyran avec certains régimes occidentaux. Or dans le compte, au chapitre des alliances stratégiques ET tactiques dont jouissait le Barbe bleue bagdadi, la casserole des El-Assad est archi-pleine. Pleine, au point que le pouvoir politique campé sur les rives du Potomac considère que ce régime est irrécupérable et qu’il doit être remplacé.

La Ména n’est pas dans le secret de l’instruction du procès mais les indiscrétions très contrôlées que les Américains ont laissé perler semblent accablantes pour l’oligarchie alaouite. Non contents d’avoir enfreint toutes les règles de l’embargo qui devait asphyxier Saddam, la Syrie lui aura servi de base arrière militaire. Ainsi, c’est le général syrien Al-Shaleesh qui a enfoui les restes d’armes de destruction massive de l’ancien régime iraquien dans des caches en Syrie. C’est le même général, ainsi que le général Abou Saloua, qui ont organisé pour Saddam les opérations de guérilla-terrorisme dirigées contre les soldats US autant que contre la population babylonienne. Nombre de ces insurgés on été formés et armés par Damas.

Ce qui n’a pas empêché l’apprenti dictateur de Damas de développer son propre programme d’armes de destruction massive, notamment en testant leurs effets sur des détenus de droit commun et sur des prisonniers politiques emprisonnés à la centrale de Khan Abou-Chamat à Damas, non loin de l’emplacement de l’institut IFEAD du Quai d’Orsay, au Conseil duquel siège le rédacteur en chef du Monde Diplomatique (lorsqu’il ne s’essaie pas à expliquer l’Islam en cosignant avec un certain Tariq Ramadan). Il y a décidément des proximités abominables qui ne dérangent que les consciences qui en ont une !

Par-delà les aspects militaires déjà énoncés, il est plus que probable que le régime népotique des El-Assad a joué un rôle prépondérant dans la gestion des fonds du régime de l’ogre irakien, des organisations terroristes basées à Damas, ainsi que dans le financement des actes de guerilla-terrorisme. Dans ces activités financières, El-Assad a fonctionné avec le concours des dirigeants collaborationnistes de l’Etat libanais occupé, toujours très proches de l’Elysée.

Pour ces raisons, l’Administration américaine a choisi de remplacer le pouvoir des El-Assad, après qu’elle aura dévoilé ses crimes, plutôt que de le réparer. C’est ce qui explique, entre autres, que l’on voit poindre dans les médias globaux l’expression de l’opposition syrienne démocratique - et notamment le Parti syrien de la réforme - avec le soutien de Washington. Ce parti, qui prône la démocratie, la paix, le progrès, la justice et l’exploitation du patrimoine exceptionnel de la Syrie plutôt que la guerre.

Il est assurément des procès que nous attendons avec impatience, cependant que d’autres les craignent avec une appréhension qui nous semble justifiée. On va peut-être enfin savoir… comme le chante Pierre Perret.



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